Lorsque nous avons pris la décision de prendre un appartement tous les deux, nous nous étions mis d'accord pour nous séparer de tout ce qui pouvait nous rattacher à nos passés respectifs. Seulement, bien que leurs retrouvailles se soient déroulées deux ans plus tôt, Hayden et Luna n'ont jamais vraiment discuté de leurs parents, de l'accident de leur mère, et je ne peux pas en vouloir à Luna d'avoir des questions. Elles auraient dû parler de tout cela il y a bien longtemps déjà. Je préfère donc quitter la pièce, les laisser discuter toutes les deux, et revenir plus tard.
J'espère qu'après, nous n'aurons plus besoin de revenir fouiller dans cette boîte avant d'avoir eu des enfants qui, peut-être, souhaiteront connaître leur grand-mère décédée injustement et beaucoup trop tôt. Mais pour le moment, je veux que nous continuions d'avancer, de construire notre avenir et cet appartement est une étape importante. Le passé n'a rien à faire dans notre nouveau lieu de vie et je suis impatient que nous soyons enfin complètement installés.
Je descends les escaliers et récupère les cartons empilés les uns sur les autres dans le hall. Quelques allers-retours plus tard, et avec l'aide de ma belle-mère, on ne distingue plus la couleur de mes sièges arrière, dissimulés sous la masse de boîtes. Déménager mi-août, sous la chaleur accablante, n'était pas une si bonne idée. Je regrette presque que nous ayons pas attendu encore un peu.
Je monte au volant et prends la route de notre appartement situé à quelques kilomètres à peine de la maison où a grandi Hayden. C'était important pour elle de rester près de chez sa mère tout en s'éloignant de cette ville qui ne nous rappelle pas que de bons souvenirs.
Lorsque j'ai rencontré Hayden au lycée, sa relation avec sa mère adoptive était tendue et nous ne pouvons pas dire qu'elle allait en s'arrangeant. Aujourd'hui, tout est différent. Elles se sont énormément rapprochées et s'entendent merveilleusement bien.
Je me gare sur le parking en bas de l'immeuble et commence à monter les nombreux cartons au troisième étage. Une fois tous entassés dans l'entrée, je pénètre dans l'appartement et souris. Je m'empresse d'ouvrir les volets de la cuisine et du petit salon. Le soleil illumine aussitôt la pièce principale que nous avons installée la veille. Cela fait quelques jours que nous passons notre temps dans cet endroit afin de l'aménager au mieux. Ce soir, nous dormirons ici pour la première fois. C'est angoissant, mais tellement grisant de prendre enfin son indépendance avec la personne que l'on aime.
J'ai toujours autant de mal à croire que nous allons vivre ensemble. Après deux ans à évoquer cet éventuel projet et à le repousser, c'est assez incroyable. Si mes amis m'avaient dit ça il y a quelques années, je leur aurais sûrement ri au nez. Dévasté par le décès de Kelly, j'avais perdu espoir, je me suis comporté comme un connard avec Hayden et aujourd'hui encore, je le regrette amèrement. Je ne sais toujours pas vraiment pourquoi, mais elle est restée, elle m'a aimé et m'a donné la chance de réparer mes erreurs tellement de fois. Et maintenant, nous emménageons ensemble alors que je ne la mérite sûrement pas.
J'ai hâte que nous soyons définitivement installés, que la décoration soit terminée et que nous soyons enfin chez nous. Nous avons encore tellement de projets à concrétiser, mais celui-ci était le plus important, le plus gros, et je ne réalise toujours pas que cet endroit est mon nouveau chez moi.
Je quitte l'appartement quelques minutes plus tard et reprends la route, effectuant le chemin en sens inverse. Lorsque j'arrive, il est midi passé et je commence à avoir faim. Luna et moi sommes arrivés très tôt ce matin pour faire les cartons d'Hayden. Il est vrai que nous n'avons pas perdu de temps lorsque nous avons eu les clés de l'appartement et selon nos parents, nous brûlons les étapes, mais je pense que nous nous en sortirons très bien.
Je pousse la porte et trouve la mère de ma petite amie dans la cuisine. La table est déjà mise et une bonne odeur de rôti flotte dans l'air. Elle m'informe que nous allons bientôt passer à table, je décide donc de ne pas remonter voir les filles. Nous terminerons les cartons après manger. J'ai de toute façon beaucoup trop faim pour me replonger dans le tri des vêtements d'Hayden.
PDV de Hayden
Je regarde la seule photographie, recollée, de notre famille au complet. Luna, ma mère, mon père et moi. Je n'en ai qu'une seule de nous quatre. L'unique preuve de l'existence de notre famille. Une seule photo qui prouve que je n'ai pas inventé toute cette histoire, que je ne suis pas folle, que ce n'est pas mon imagination de petite fille qui a fabriqué des parents qu'elle a à peine connus.
Ma sœur et moi étions petites et notre ressemblance était vraiment frappante à l'époque. Prise d'un excès de rage et de tristesse, j'avais déchiré cette photographie, il y a plusieurs années, lorsque mes démons me hantaient encore. J'ai fini par recoller les morceaux, consciente qu'elle était le seul souvenir que j'avais de mes géniteurs.
– Tu as déjà revu papa ? me demande Luna passant son pouce sur le visage de notre paternel.
– Jamais. Pour être honnête, j'espère que ça n'arrivera pas.
– Moi non plus, en fait.
Elle me sourit et replace nos souvenirs à l'intérieur de la boîte. Je la prends entre mes mains, soupire longuement et la glisse dans le carton contenant toutes les choses que je souhaite apporter à l'appartement.
Je dois garder le minimum d'objets me retenant prisonnière de mon passé, mais jeter ceux-là est pour moi tout bonnement impossible. Je serais incapable de me séparer des dernières photos et de tout ce qui me rattache encore à ma mère. Elle est, et sera, toujours dans mon cœur. Je ne veux pas l'oublier, pas elle. Ces souvenirs qu'elle m'a laissés sont aujourd'hui ma faiblesse, mais aussi ma force, et je ne compte pas les laisser ici. J'ai besoin d'elle pour continuer à avancer.
Je ferme le carton plein à craquer et nous reprenons le tri de mes affaires jusqu'à ce que la voix de ma mère nous interrompt.
– Les filles ? crie-t-elle depuis le salon.
– Oui ?
– Venez manger !
– On arrive.
Je finis de plier mes vêtements et nous descendons dans le salon. Stan est déjà à table avec ma mère et Noah. Nous nous installons avec eux et déjeunons dans la bonne humeur. La discussion tourne autour de notre déménagement, sans aucune surprise.
– Il te reste encore beaucoup de choses à transporter ? me questionne Stan.
– Non, pas plus de deux ou trois cartons.
– Les derniers meubles que nous avions commandés sont arrivés au magasin, il va falloir aller les chercher, annonce-t-il.
– Déjà ?! s'exclame ma mère, manquant de s'étouffer avec ses petits pois.
– Oui.
– Dans ce cas, nous devrions les récupérer cet après-midi pour pouvoir les monter, déclare-t-elle après avoir bu une gorgée d'eau.
– Maman, nous avons encore le temps, tu le sais ?
– Pas question de perdre une seule seconde ! Nous allons nous en occuper aujourd'hui. Vous comptez vous en servir quand, de cet appartement ? Le siècle prochain ?
– Évidemment que non, mais..., tenté-je avant qu'elle ne me coupe la parole.
– Il n'y a pas de mais qui tienne ! C'est tout décidé.
– D'accord, cédé-je.
VOUS LISEZ
Pas si différents - Tome 2 - [ ÉDITÉ ]
RomanceIls se sont testés jusqu'à se détester puis, il a séché ses larmes, elle a pansé ses plaies et ensemble, ils ont appris à s'aimer. Bien que tout les opposait, Stan et Hayden ont finalement trouvé l'équilibre qui manquait à leur relation tumultueuse...