Le cellier

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Il y a quelques années, ma famille et moi étions partis en vacances à Cape Cod dans le Massachusetts où mes parents avaient loué une vieille maison pour deux semaines. La maison était des plus traditionnelles : le rez-de-chaussée comprenait une cuisine, un salon et une salle de bain. Les chambres à coucher se trouvaient à l'étage. Le sous-sol avait été partiellement aménagé et la pièce comprenait un espace buanderie côtoyant un canapé et une télévision.

Lors de la première nuit, nous fûmes tous réveillés en sursaut par des hurlements provenant de la chambre de ma sœur. Mon père se rua dans sa chambre, alluma la lumière et découvrit ma sœur debout sur son lit, hurlant et pleurant à chaudes larmes. Mes parents passèrent de longues minutes auprès d'elle essayant par tous les moyens de la calmer. À force de patience, ma sœur finit par être suffisamment apaisée pour nous expliquer ce qui l'avait mise dans un tel état.


Elle nous expliqua qu'elle avait brusquement été réveillée en pleine nuit par une odeur pestilentielle. Quand elle avait ouvert les yeux, elle avait vu sa chambre entièrement tapissée de sang, du sol au plafond. Il y avait du sang partout, des empreintes ensanglantées de mains sur les murs et des éclaboussures sanguinolentes au plafond. Après que ma sœur eut fini son récit, nous la rassurâmes avec bienveillance, elle avait fait un vilain cauchemar, voilà tout. Malgré nos consolations, ma sœur refusa de remettre les pieds dans cette chambre, c'est ainsi qu'elle dormit dans celle de mes parents le restant de notre séjour.

Quelques jours passèrent et l'incident fut vite oublié. Un soir, ma mère s'affairait en cuisine à préparer le dîner alors que mon père était parti faire quelques emplettes en ville. Ma sœur et moi nous trouvions dans la pièce au sous-sol et regardions la télévision quand, soudainement, les ampoules explosèrent et le téléviseur s'éteignit, plongeant ainsi la pièce dans l'obscurité la plus totale. Le cellier n'avait pas été achevé, les murs étaient faits de vieilles pierres qui donnaient à l'endroit une allure un peu sinistre. Pendant un instant, nous restâmes figées ne sachant que faire. C'est alors qu'une odeur fétide se fit sentir.

L'odeur qui nous montait aux narines était absolument insoutenable et nous fûmes très vite prises de nausées. Cela sentait comme de la viande avariée, à un stade de décomposition avancé. L'horrible odeur devenait de plus en plus forte et nous entendîmes tout à coup un bruit étrange, comme si quelque chose grattait le sol ou les murs dans l'obscurité. Ma sœur et moi hurlâmes en cœur, déambulant à l'aveugle dans la pièce toujours plongée dans de profondes ténèbres à la recherche de la porte de sortie. Nous y parvînmes finalement et nous remontâmes l'escalier à toute vitesse, appelant notre mère dans des hurlements hystériques.

Nous lui racontâmes tout de notre expérience, sans rien omettre de l'odeur pestilentielle et de l'étrange bruit que nous avions entendu. N'arrivant pas à nous calmer, notre mère consentit à descendre au sous-sol, remplacer les ampoules cassées et chercher d'où pouvait provenir cette soi-disant odeur. Elle se munit d'une lampe torche et d'ampoules neuves et descendit les escaliers en direction du cellier, toujours plongé dans le noir, alors que ma sœur et moi étions restés en haut des marches. Nous la suppliions de faire vite et de revenir sans tarder, mais il semblait qu'elle était en bas depuis une éternité.

Brusquement, nous la vîmes émerger des ténèbres et remonter les marches en courant avant de refermer la porte du cellier derrière elle et de s'empresser de la verrouiller. Quand elle se retourna vers nous, nous vîmes son visage livide qui avait perdu toutes ses couleurs et ses yeux écarquillés par la peur. Elle nous souffla d'une voix éteinte : « Je vous interdis de retourner en bas, c'est compris !!! » puis elle se rendit à la cuisine et téléphona à la police. Sans bouger d'où nous étions, ma sœur et moi entendîmes tout de même la conversation de notre mère au téléphone ; il y avait quelqu'un au sous-sol !

En attendant l'arrivée de la police, nous restâmes toutes les trois blotties les unes contre les autres au salon, le regard rivé sur la porte menant au cellier. Lorsque les forces de l'ordre arrivèrent enfin, ma mère les salua et les invita à entrer. Elle déverrouilla alors la porte conduisant au sous-sol et les officiers descendirent l'escalier, armés de lampes torches et leurs pistolets. Ils fouillèrent tous les recoins de la pièce, mais ne trouvèrent absolument rien. Il n'y avait aucune autre issue pour sortir du sous-sol, ni fenêtre ou autre porte que celle en haut des escaliers. Peu importe ce qui se trouvait en bas, c'était le seul moyen de sortir qu' « il » aurait dû emprunter. Sur ce, les policiers prirent congé et s'en allèrent.

Une fois seule, notre mère consentit à nous en dire davantage sur ce qu'elle avait vu. Ma sœur et moi l'écoutions parler d'une voix calme et posée. Elle nous dit qu'elle était occupée à remplacer les ampoules grillées quand elle commença à sentir la même odeur que nous lui avions décrite. Et elle aussi entendit un faible bruit, comme des griffures dont elle ne pouvait déterminer la provenance. Elle avait alors balayé la pièce avec le faisceau lumineux de sa lampe torche quand elle remarqua soudain une forme recroquevillé entre la machine à laver et le sèche-linge.

C'était un homme accroupi, « à quatre pattes » plus précisément. Ses habits étaient en lambeaux, ses cheveux sauvages et emmêlés et son visage n'avait rien d'humain. Ce dernier était figé dans une expression de pure haine. À ce moment précis, il avait regardé notre mère, ses yeux, tels des miroirs, reflétaient la lumière de la lampe torche. Puis l'homme se mit à ramper en arrière et disparut dans un mur de la pièce. Quand ma mère le vit s'évanouir dans l'air et disparaître ainsi, elle avait laissé tomber sa lampe torche et avait couru.

Après cela, aucun de nous ne retourna au sous-sol. Nous prîmes soin de laisser la porte fermée et verrouillée avec précaution. Les nuits suivantes, nous avons tous dormi dans la chambre de mes parents, que nous verrouillions également. Quelques jours plus tard, nous décidâmes d'un commun accord de raccourcir nos vacances et de reprendre la route de la maison.

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