3; the boy who scattered stardust.

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✩ Les yeux éplorés... ✩

Mes parents en ont rien à péter d'mon existence.  

En public, ils s'font passer pour deux adultes concernés et affectueux, ils racontent à qui veut bien l'entendre qu'ils sont si fiers (si fiers !) d'avoir un prodige dans mon genre comme fils.

En vrai, j'sais très bien qu'ils s'en foutent de moi.

Ils ont toujours fait comme si j'existais pas quand y avait personne pour les juger.

J'suis juste qu'un héritier pour mon père, et un moyen d'se vanter auprès des commères qui lui servent d'amies pour ma mère.

Ils sont tellement riches qu'ils savent même plus quoi faire d'leur argent, alors, tout c'qu'ils m'donnent, j'le mets d'côté, et j'me débrouille par moi-même, avec le strict minimum, ici, au cas où.

J'sais pas trop quoi mais au cas où.

J'me tourne vers toi et croise ton regard désolé, t'as l'air de t'en vouloir d'avoir posé la question ; pourtant moi j'm'en fous, ça fait des années que j'm'y suis fait et maintenant qu'j'ai accepté ça va largement mieux.

J'essaye d'sourire pour t'rassurer, histoire qu'tu comprennes bien qu'ça m'affecte plus vraiment maintenant, qu'le manque d'amour a laissé place au vide d'la lassitude, mais eh, y a pire que moi hein ?

J'vis chez mon frère depuis qu'j'suis si jeune, j'ai aucune idée d'la gueule d'mes propres parents, tu finis par lâcher à ton tour, alors qu'tes doigts jouent nerveusement avec les miens, et qu'tu t'recroquevilles un peu plus contre mon torse contre lequel t'as l'air bien installé actuellement.

T'es pas obligé d'm'en parler, t'sais.

Je sais.

J'ai envie.

Hm.

Mon pouce vient entreprendre de p'tits mouvements circulaires sur le dos d'ta main droite, la gauche pianotant doucement sur tes propres cuisses.

Mes parents ont eu mon frère quand ils n'étaient encore qu'ado.

Ca a été compliqué pour eux, mais ils ont réussi à l'élever et à prendre à peu près soin d'lui.

Ils enchaînaient les p'tits boulots, ont arrêté les études même, mais ils ont réussi à prendre soin d'leur premier né.

Puis, cinq ans plus tard, ils ont eu une fille.

Mort-née.

Ils se sont juré d'plus jamais avoir d'enfants après ça.

Pourtant, une quinzaine d'années après la naissance d'Mingyu, j'suis arrivé.

Mon père a jamais voulu la laisser avorter, il me voulait, sincèrement.

Ma mère a pas supporté, elle a voulu s'barrer juste après ma naissance.

Il l'a pas laissé faire, au point d'limite la séquestrer à la maison avec Mingyu et moi, alors, au bout d'deux ans, elle s'est suicidée.

Mon père a pété les plombs, il a agressé des gens, puis a fini en taule.

Mon frère venait tout juste d'atteindre sa majorité, alors, ils m'ont confié à lui.

J'ai quitté la maison à seize ans, quand il s'est marié et qu'il a eu sa fille, j'voulais pas m'imposer ; j'avais d'jà l'impression d'avoir gâché la moitié d'sa vie.

J'me débrouille par moi-même depuis.

J'sens qu'tu trembles légèrement, alors, j'te sers fort contre moi et dépose quelques baisers sur ta nuque pour essayer d'te calmer un peu.

Et ton père si c'est pas trop indiscret ?

Mon frère l'a toujours empêché d'me voir depuis qu'il est sorti d'prison.

Il a essayé d'me contacter plusieurs fois mais j'ai jamais répondu.

A c'qu'il paraît il est retourné là-bas après avoir commencé à dealer et d'autres trucs pas cools, mais j't'avoue qu'j'en sais trop rien.

Un silence se fait après ça, un silence lourd en non-dits et en ressentiments, envers la vie et sa triste ironie, envers nos familles et leur manque d'empathie.

Dis, tu veux bien m'embrasser ?

J'pose de nouveau mes yeux sur ton visage, pour t'sourire tendrement : t'as l'air si doux, quand tu m'regardes avec tes grands yeux innocents.

J'dépose brièvement mes lèvres sur les tiennes, chastement, moqueusement ; tu m'fais la moue en guise de résultat et j'me mets à rire d'amusement.

J'm'empare à nouveau de ta bouche, avec cette fois plus de profondeur, j'ai glissé une main sur ta joue et j't'embrasse comme promis, tandis que tu t'installes un peu mieux contre moi.

J'perds un peu la notion du temps et d'espace, n'existe plus que toi et toutes ces sensations qu'tu m'fais r'sentir, de la petite décharge électrique qui parcourt mon corps au noeud qui tord mon estomac, en passant par la rougeur de mes joues et la chaleur qu'enveloppe mon coeur.

J'suis pas du genre à verser dans le sentimental, j'sais pas pour combien d'temps notre relation est censée durer, j'sais pas si elle survivra aux aléas du quotidien bien longtemps, mais j'sais juste que là, maintenant, j'ai besoin d'toi.

J'ai atrocement besoin d'toi.

J'ai toujours été du genre indépendant, sans attache, je vogue de relations en relations, peu importe leurs natures et peu importe les sentiments, mais j'sais pas, avec toi c'est tellement différent, t'es tellement différent.

J'sais pas trop comment on en est arrivé là, mais j'ai retiré mon haut et t'as ôté l'tiens en même temps, et j'me suis dit qu'quand même, j'avais vraiment envie d'toi.

Je sillonne ton épiderme d'une pâleur irréelle de la pulpe de mes doigts, mon regard curieux découvrant cette nouvelle partie de toi à mesure que mes mains progressent sur ton torse.

T'es magnifique putain, tellement magnifique.

T'es définitivement c'genre de beau qu'on croise qu'une fois, et une fois seulement ; le genre façonné dans d'la poussière d'étoiles, avec une peau couleur lune et des lèvres comme les limites d'une galaxie, avec des soleils dans les yeux et des constellations au creux des reins.

Tu t'fais bien plus hésitant qu'moi, alors j'commence à prendre les d'vants, pour te rassurer, t'faire comprendre qu'il y a pas à s'inquiéter.

J'y vais doucement, j'veux qu'tu saches qu'on ira à ton rythme, on s'arrêtera quand tu l'voudras, j't'oblige à rien, j'veux juste qu'tu t'sentes bien.

T'sais, j'ai pas beaucoup d'expériences, alors...

J't'oblige à rien Minho.

T'es libre de tout arrêter quand tu l'entends.

J'te souris à nouveau pour t'rassurer encore une fois, j'attrape tes mains pour les serrer dans les miennes, je guette la moindre de tes réactions pour ne pas te faire le moindre mal.

Et dans tes prunelles noisettes peut se lire un accord silencieux, quelques mots timides qui semblent signifier vas-y, une incitation, une invitation à poursuivre.

J'viens avec précaution goûter à la chaire découverte de tes clavicules, j'remonte jusqu'au creux de ton cou et file jusque dans ta nuque, sous l'oreille, emprunte le chemin de ta mâchoire pour arriver à destination : tes lèvres.

Finalement, le reste de nos vêtements aura fini par r'joindre le sol de ma chambre un peu trop p'tite, et c'est dans la tendresse la plus absolue et l'affection la plus sincère, qu'nos deux êtres se seront unis ce soir, le silence symbolique de l'instant uniquement brisé par nos voix, nos rires, et le bruit de draps qui se froissent et d'corps qui s'consument.

poésie de minuit (la chambre d'en face) [minsung]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant