Une autre fin.
Je me laisse tomber dans le fauteuil en soupirant. J'allais enfin pouvoir me replonger dans le tome 1 du Labyrinthe. Cette trilogie, je l'ai lue et relue, mais je ne peux m'empêcher de la relire, encore et toujours. C'est vraiment mon coup de coeur. Je m'enroule dans mon plaid et m'empresse d'ouvrir le livre au niveau de mon marque page. C'est bientôt la fin. Encore une trentaine de pages, et je devrai ranger ce chef d'oeuvre et passer au suivant. Au moment où mes yeux se posent sur les premiers mots, une vive lumière m'éblouit au point de me faire immédiatement fermer les yeux. Je me sens aussitôt tomber et je sers le livre contre moi tout en me rendant compte que j'ai perdu mon plaid.
Enfin, je sens le sol sous mes fesses. "J'ai dû tomber de mon fauteuil. Roh, quelle maladroite je fais !" J'ouvre les yeux mais rien n'avait changé. Je mets un instant à comprendre que je me trouve dans le noir total. Je me relève avec précaution en desserrant mon étreinte autour de... Mon livre ! Il a disparu lui aussi ! Soudain, j'entends des bruits sur ma gauche et un cri strident déchire le silence.
- Continue à taper Teresa !
Teresa ? Mais, c'est le nom de la fille dans mon roman ! Je ne comprends plus rien. Qu'est-ce qui se passe ? Où suis-je ?
- Les griffeurs se rapprochent !
Mon coeur se bloque et je manque de m'écrouler. Les griffeurs, ces monstres géants d'acier de mon livre. Rien qu'en les imaginant à travers les lignes, ils me terrifient. Cette fois je n'ai plus aucun doute : j'étais bel et bien tombée dans mon livre. C'était impensable ! Je devais être en train de rêver.
- Thomas ! Je n'arrive pas à rentrer le dernier mot !
Non je ne rêvais pas. Cette réplique je la connaissais par coeur. Thomas allais tuer le griffeur avec lequel il était en train de se battre avant de courir rejoindre Teresa. Il ne fallut pas longtemps à cette histoire pour confirmer mes doutes. J'entendis un bruit mat, comme un corps qui s'écroulait, suivi d'une troisième voix que je ne reconnue pas tout de suite.
- Tu l'as eu !
Mais oui. Comment avais-je pu l'oublier ! C'était Chuck ! Je voulus signaler ma présence quand quelque chose me percuta de plein fouet et je m'écroulai en criant.
- Aïe ! Teresa qu'est-ce que...
- Non ! Ce n'est pas Teresa. Je suis... Alice.
- Beu, t'es qui toi ? Jamais entendu parler. T'étais au bloc ? Tu nous as suivis ? Tu sors d'où ?
- Euh... c'est un peu... compliqué et...
- Ok très bien, on verra ça plus tard. Magne toi.
Je sentis Thomas me tirer par le bras et m'amener jusqu'à Teresa. J'avais encore du mal à réaliser que le personnage sur qui j'avais toujours fantasmé me tenait à présent par le bras. Cette pensée me fit sourire, malgré la gravité de la situation.
Quand il me lâcha enfin, je l'entendis demander :
- Qu'est-ce qu'il y a ?
Je formai la réponse de Teresa dans ma tête "j'ai saisi tous les mots un par un; ils sont apparus à l'écran, et puis j'ai entendu un bip et ils ont disparu..."
- ... Mais quand j'écris le dernier mot il ne se passe rien !
Bingo. Elle avait répété mot pour mot sa réplique. Normal. C'est l'histoire qui est écrite comme ça. Mais ça veut dire que... Oh non ! Le griffeur !
- Thomas ! Hurla Chuck derrière nous.
Pas le temps de tergiverser. Je connais ce roman comme ma poche, je peux les aider !
- Teresa, le bouton par terre ! Appuie dessus !
- Hein ? Quel bouton, qui...
- On n'a pas le temps, appuie vite ! Il stoppe le labyrinthe !
Elle se jeta à terre, aperçut le bouton, le pressa et un silence total s'abattit sur nous. Et puis, plus loin dans le tunnel, on entendit coulisser une porte.
Après, tout se passa très vite et exactement comme je l'avais lu. A l'exception près que je dû expliquer à Thomas,Teresa et les autres garçons d'où je venais. "Je n'en reviens pas... Je peux enfin rencontrer Minho ! AAAH ! Qu'il est beau !" Ils ne me crurent pas et la plupart étaient très dubitatifs en pensant que je me foutais d'eux. Ils acceptèrent cependant de m'emmener et, après avoir suivi un chemin que je connaissais parfaitement sans y avoir jamais mis les pieds, nous arrivâmes enfin dans une immense salle souterraine. Je tournai aussitôt le tête vers les vitres derrière lesquelles les Créateurs nous observaient. Les garçons n'allaient pas tarder à...
- Regardez ! cria quelqu'un.
Et voilà. C'était quand même très perturbant de tout savoir à l'avance. Après avoir échangé de nombreuses paroles, les garçons agités se figèrent en voyant une femme et un homme encapuchonné rentrer dans la salle et s'avancer vers eux. Je me mis sur la pointe des pieds et murmurai à l'oreille de Thomas :
- C'est Gally. Mais méfie toi, ils l'ont complètement possédé.
Il me regarda avec des yeux ronds, avant d'ajouter :
- Pff... c'est toi qui est possédée...
Mais quand, quelques minutes plus tard, Gally enleva sa capuche, Thomas me regarda bouche bée. Je lui fis un petit signe de tête, l'air grave. La discution commença alors, telle que je la connaissais, mais je n'y prêtais plus attention.
Mon coeur s'était figé. Ce roman je le connaissais par coeur. Dans quelques minutes à peine, Chuck allait mourir. Je ne savais pas comment empêcher ça. C'était l'histoire après tout. Elle avait été écrite comme cela et il fallait s'y tenir. Pourtant, je ne pouvais me résoudre à laisser ce pauvre Chuck mourir. Je l'avais déja vu disparaitre à chaque relecture. A chaque fois, une larme avait coulé. Je ne voulais pas repenser aux cris déchirants de Thomas. Je ne voulais pas repenser à son visage baigné de larmes. Je ne voulais pas repenser au corps du pauvre Chuck dans les bras de Thomas. Je voulais changer l'histoire.
Quand j'aperçus Gally lever son couteau, je n'eus pas besoin de réfléchir, je vis le couteau partir en direction de Thomas. Je vis Chuck sauter devant lui pour le protéger. Je m'élançai à mon tour et reçus le couteau en pleine pointrine à la place de Chuck. Le choc fut si violent que je m'écroulai sur lui.
Il hurla et se laissa tomber à mes cotés avec Thomas. J'utilisai le peu de souffle qui me restait pour murmurer :
- Chuck... Je le... savais... Je ne voulais pas que... tu meurs. Retrouve tes parents... Sois heureux...
Je laissai s'échapper mon dernier souffle sans regret. Je crois même que je souriais. J'avais pu sauver le petit protégé de mon héros et cela valait tout l'or du monde pour moi. Je lui avais épargné tant de larmes. Tant de malheur...
Maintenant, dans le dernier tome du Labyrinthe, Chuck retrouve ses parents et n'arrête pas de leur vanter tout le mérite d'une mystérieuse fille, sortie de nulle part, qui lui à sauvé la vie. Thomas quant à lui, décide d'adopter une petite fille, qu'il appellera Alice.
N'ayez pas honte de rêver. C'est avec l'imagination que l'on peut réellement changer notre destin.
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Un thème, une histoire
AcakConcentré de plein de petites histoires écrites avec un thème à respecter chaque semaine.