Chapitre 2

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James

- Allez viens Rocky ! m'écrié-je. T'as déjà passé la journée dehors, faut pas abuser des bonnes choses.

Je lance un coup d'œil agacé au pur sang qui me jauge un instant avant de se remettre à brouter comme si je ne venais pas de lui ordonner plusieurs fois de rentrer dans son box. C'est sans doute le cheval le plus têtu qu'il y a ici mais ça ne me fait pas peur. Je parviens désormais à le monter alors qu'il y a encore quelques mois, il ne laissait personne l'approcher.

- Rocky...

Je fais un pas vers lui puis un deuxième jusqu'à que je réussisse à m'emparer de ses rênes pour le ramener jusqu'à l'écurie.

- La fête est finie mon vieux.

Il s'ébroue en laissant échapper un hennissement de mécontentement mais il se laisse enfermer dans son box sans plus de caprice.  Je m'empare du râteau qui traîne dans un coin et commence à nettoyer l'écurie. Il fait une chaleur à se damner ici et je retrousse plusieurs fois les manches de ma chemise pour me soulager un peu.

- Ah, c'est là que tu te caches !

La voix de Coleen m'interrompt dans mon travail et je m'appuie sur le râteau tout en posant mon regard sur elle. Un sourire est dessiné sur son visage hâlé où quelques rides ont creusé un sillon. Ses yeux verts eau me fixent avec tendresse et je lui adresse un sourire en retour.

- Où veux-tu que je sois si ce n'est ici ? La patronne me donne tellement de boulot que je n'ai pas le temps d'être ailleurs, la taquiné-je avec malice.

Elle lève les yeux au ciel et s'approche pour me donner une petite tape.

- Arrête ! C'est toi qui t'obstines à travailler si dur ici alors que tu as déjà ton boulot au bar, me reproche-t-elle en faisant les gros yeux.

Elle n'aime pas que je me donne autant ici alors que je suis aussi cuistot et serveur dans un petit bar restaurant sympa sur la plage. Elle préférerait que je me consacre à mon boulot et surtout que je profite un peu plus de ma jeunesse comme elle me le répète aussi souvent. Mais c'est impensable pour moi de ne pas aider Coleen. Depuis que Phil, son mari, a eu une crise cardiaque, il n'est plus capable d'aider comme il le faisait avant et je me considère donc aujourd'hui comme l'homme de la maison. Je vois bien que Coleen vieillit et qu'elle se fatigue plus vite qu'avant. Si je peux l'aider à assumer la ferme et toutes les nombreuses tâches à faire au quotidien, je le fais sans me poser plus de questions. Je dois tellement à ce couple que pour moi c'est simplement normal de mettre autant la main à la pâte.

Coleen et Phil m'ont recueilli lorsque j'avais presque 18 ans pour éviter que je ne finisse dans une énième famille d'accueil ou pire, en taule. S'ils n'avaient pas été là, je ne sais pas où j'en serais aujourd'hui. Probablement pas ici. Je ne serais pas l'homme que je suis aujourd'hui, sain et serein, équilibré et travailleur. Avant qu'ils ne me laissent ma chance, j'étais un vrai branleur. Je ne sais même pas pourquoi ils ont cru en moi aussi fort alors que je n'y croyais plus depuis longtemps.

J'ai commencé à dérailler à la mort de mes parents et de ma sœur alors que je n'avais que 16 ans. Ils sont morts dans notre maison. Une explosion en pleine nuit. Tout le monde dormait sauf moi puisque j'avais fait le mur pour aller rejoindre ma bande de potes. Lorsque je suis rentré, les pompiers et la police étaient là et les voisins se pressaient autour d'eux pour nourrir leur curiosité malsaine. Le feu avait déjà dévoré toute la maison dans laquelle je suis né et ai grandi. Il ne restait que des cendres. Quand j'ai compris que j'étais désormais le seul survivant de la famille Whitehorse, je me suis effondré dans la rue, incapable de faire face à cette tragédie. Plus que tout, je regrette de ne pas être resté chez moi cette nuit-là. J'aurais préféré mourir auprès des miens que de rester ici, seul au monde.

Texas Love {sous contrat d'édition}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant