PROLOGUE

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Cinq ans plus tôt...

J'avais mal partout. Mon bras devait être cassé. Ou peut-être était-ce mon corps tout entier qui était brisé. Mon cœur aussi. J'avais dissimulé mes cheveux sous la capuche de mon sweat, en espérant que ça suffirait à passer inaperçue. Elle dormait dans mes bras, blottie comme un bébé, inconscient de ce qui se passe autour. Mon cœur battait à cent à l'heure. Mes yeux scrutaient le hall de la gare routière, dans l'espoir qu'il n'était nulle part, qu'il n'avait envoyé personne à nos trousses. Peut-être n'avait-t-il pas encore remarqué notre absence.

Je n'avais pas le choix. Je devais partir, et vite. Je regrettais simplement de ne pas l'avoir décidé avant. J'avais pris bien trop de risque. Pour moi. Pour elle. Qui sait ce qu'il aurait pu faire. Je l'avais mis en colère ? Et alors ? Je n'étais pas sa chose. Il n'avait pas à me faire mal. Pas alors qu'elle était dans mes bras. Pas alors qu'il n'en avait aucun droit. Alors j'étais partie, dès qu'il s'était endormi sur le canapé pourri de notre appartement. Enfin, si on pouvait appeler ça un appart. Un dépotoir, voilà ce que c'était. Un squat pour ses potes et ses magouilles. Un endroit qui n'était pas fait pour elle. J'avais emmené le strict minimum dans un tout petit sac. L'histoire de ma vie, de la sienne, tenait dans un sac à dos qui ne pesait rien. Mais c'était suffisant, pourvu qu'on s'éloigne d'ici.

La voix, dans le haut-parleur, annonçait le départ imminent. J'avais payé nos billets avec le peu d'argent que j'avais mis de côté. Je grimpais les marches, la tête baissée, et me faufilais jusqu'au fond du bus. J'avais peur de souffler, de respirer, de pleurer. J'observais une dernière fois les lumières de la ville, tandis que nous nous éloignons de l'enfer dans lequel j'avais sauté à pieds joints, des années plus tôt. J'avais pris une décision. J'avais tenté de me rassurer. C'était une bonne décision. C'était la seule.


Pour elleWhere stories live. Discover now