Les branches des arbres me fouettent le visage et me cisaillent le corps dans ma course folle au travers de ce bois.
Ma compagnie et moi avions été parachutés pour un exercice de survie.
Mon paquetage pèse lourd et je sens que je commence à faiblir au fil des heures et au fur-à-mesure de mes pas qui tambourinent la terre.
Je ralentis ma cadence et m'aperçois que depuis un moment, je suis seule à courir sans mes compagnons.
Mais où peuvent-ils être ? Comment on a fait pour se retrouver séparés alors qu'on a ordre de rester groupés ?
Je m'octroie une pause bien méritée contre un vieux chêne et rumine contre mes chefs de section qui ont subitement eu cette superbe idée de nous faire faire en fin de journée un genre d'exercice de cohésion....
Cohésion de mon cul, oui.... Renforcement fraternel censé nous unir en tant que frères et sœurs d'arme, de faire de nous une fratrie, une deuxième famille...
La nuit commence à tomber, les bruits des animaux nocturnes se font entendre et je sens une angoisse monter en moi à l'idée de me retrouver à la merci des bestioles qui hantent cette satanée forêt.
Je décide malgré tout de me trouver un endroit où pouvoir bivouaquer pour la nuit et tenter de réparer mon talkie-walkie qui s'est cassé lors d'une de mes nombreuses glissades sur les feuilles humides qui parsèment le sol.
Je finis par me poser dans un coin derrière un fourré que j'ai au préalable fouillé avec un bâton « très courageuse la fille, je sais ! » et m'y installe.
J'espère que mes collègues vont finir par s'apercevoir de mon absence et me chercher avant qu'un animal me dévore. Je dois arrêter de regarder des films d'horreur, ça ne me réussit pas. Sinon on pourra éventuellement d'ici quelques jours voir apparaître dans les journaux :
« Le corps non-identifié d'une jeune recrue de l'armée française retrouvé démembré, dévoré par les loups et autres insectes... Les causes de son décès sont à ce jour indéterminées mais une autopsie est en cours pour en trouver la raison. » : Triste éloge funèbre.
J'en ris sous cape car c'est mon seul moyen pour ne pas craquer.
Je repense à tout ce que j'ai traversé, vécu depuis que j'ai décidé de servir la Patrie comme on dit, aux épreuves où j'ai dû prouver que j'avais ma place en tant qu'engagée, en tant que militaire malgré mon jeune âge.
J'aurai 18 ans dans 4 mois, je suis émancipée et j'ai tout fait pour quitter le carcan familial à mes 16 ans.
Ma mère me manque, c'est indéniable, tout comme mon petit frère de 12 ans qui est un vrai démon. Mais les nombreux amants de ma mère, je suis ravie de ne plus avoir à les voir, à les supporter et à subir leurs nombreuses attaques morales, physiques comme sexuelles.
Quand à mon père, il a pris la poudre d'escampette à la naissance de mon frère Léo, estimant qu'il était trop jeune pour être père de deux enfants et qu'il ne voulait pas passer à côté de sa jeunesse. On n'eut plus jamais de ses nouvelles au grand dam de mes grands-parents paternels qui eux, nous chérissaient plus que tout jusqu'à leur mort soudaine lors d'un accident en mer.... La croisière de la mort, c'est le nom que je donne à leur triste fin...
Je secoue vivement la tête pour chasser de mon esprit ces douloureux souvenirs, tout me manque d'un coup maintenant que je suis abandonnée à mon sort.
Je me frotte le visage pour effacer ces souvenirs et reviens au présent. Rien ne sert de regarder en arrière.
Je décide de plier bagage et de continuer à marcher, espérant tomber sur un village avoisinant la forêt car fichue pour fichue, je ne peux pas m'endormir de peur qu'il m'arrive quelque chose dans mon sommeil.
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Deux choix, une seule raison...
FanfictionQuand deux mondes que tout oppose se rencontrent, quelles en seront les conséquences ? Quand une humaine se retrouve malgré elle entre deux hommes, quel choix doit-elle faire ? Et si tout changeait, et si ces deux mondes décident d'unir leurs forces...