Le journal d'une femme enceinte

Tends la joue gauche

Multimédia: Camara

Mardi 23 juillet 20**

Cher journal,

Je m'suis fait un ami aujourd'hui.

Oui.

Ça fait bientôt 4 mois que je ne traîne plus avec des gens de mon âge mais aujourd'hui, c'est fini. J'ai un ami.

Il s'appelle Camara, il a 18 ans.

Bon, attends je te raconte comment je l'ai rencontré: j'étais allée à carrefour, j'avais faim parce que je revenais de mon p'tit boulot de baby-sitter

(oui, je te l'ai pas dit mais j'ai finalement trouvé une famille qui a bien voulu me prendre malgré le fait que je sois enceinte, parce que oui: les parents n'étaient pas d'accord que je m'occupe de leurs enfants avec un enfant dans le ventre. Peut-être parce que je suis moi-même encore une enfant)

Donc, j'étais au rayon confiserie pour m'acheter des schokobons malheureusement il était tout en haut de l'étagère et je mesure 1,60m. Oui.

J'ai vu un bras venir au dessus de ma tête pour attraper les schokobons et voilà comment notre rencontre c'est faite. Il m'a demandé si j'avais besoin d'aide et oui, j'étais pas censé m'acheter d'autres choses mais les hormones, ça fait faire des choses débiles. Donc, il m'a aidé à faire mes petite emplettes tout en discutant.

C'était la première fois que je discutais avec quelqu'un sans qu'il ne me parle de mon ventre, me regarde avec dégoût ou me juge dans sa tête en pensant que je ne m'en rends pas compte.

Mais bon, toute bonne chose à une fin.

On était en train de marcher quand j'ai vu Shaïma, Mawa (parce que oui, maintenant elles sont potes) et une autre fille. Franchement, je voulais à tout prix les éviter, je connais l'effet de groupe, je sais que quand on est en groupe, on fait les choses les plus méchantes, juste pour s'intégrer.

Comme tu t'en doutes sûrement, elles m'ont bien évidemment repéré, hein, une naine avec un bide de femme enceinte et un visage de bébé, ça se repère au loin.

« Ahhh, donc t'as déjà trouvé un nouveau gars? » -Shaïma

À partir de ce moment, je savais déjà que ça allait être la merde. J'ai fais genre de n'avoir rien entendu, ou bien de ne pas savoir qu'elle me parlait mais bien sûr il a fallut qu'elle vienne de plus près.

« Hey, j'te parle, pourquoi tu fais zehma t'entends pas?! »

Camara a vite compris qu'elle parlait a moi mais ce qu'il comprenait pas, c'est pourquoi je répondais pas.

Mais, c'est pas ma nature à moi: ça à toujours été la grande gueule, qui dit ce qu'elle veut peu importe si ça blesse, « the fiery vixen »

Moi j'ai toujours été calme, douce, aimante... Peut-être que ça me porte préjudice mais je n'arrive pas à changer, faire du mal aux autres ou rendre le mal par le mal, c'est pas moi.

Certaines personnes sont plutôt du genre « œil pour œil, dent pour dent » mais moi c'est plutôt « si on te gifle la joue droite, tends la joue gauche »

Au final, c'est Camara qui a parlé à ma place parce qu'il en avait marre de les voir nous suivre (elles nous ont suivi, oui) et m'insulter.

Des insultes puériles en plus du style: « Attends d'accoucher au moins avant de chercher un nouveau boug », « Mais tu vois pas qu'elle est en manque d'affection, personne la calcule dans la tess, elle cherche un ami », « Ouais, bah si c'était pas une pute, elle aurait toujours des potes mais bon, elle préfère faire le tour des potes des gens » « Blahblahblah.... »

Puis Camara s'est tourné et a dit, calmement: « Putain mais hey, vous avez pas d'autres choses à faire sérieux? Il fait beau, il fait chaud, mais vous pétez vos bouches qui puent pour pourrir la journée des gens.  Toi (Mawa), au lieu de t'occuper d'avec qui elle sort, occupes-toi de ton tissage fatigué, on dirait ça fait 6 mois il est posé sur ta tête, là, tchiiiiip. »

Après ça, on est parti. Je sais pas si c'était le choc mais elles n'ont rien répondu du tout.

Ensuite, il m'a accompagné jusqu'à chez moi (je crois qu'il avait peur qu'on m'insulte encore) et m'a demandé qui c'étaient, ces meufs.

« Celle du milieu, c'était mon ex meilleur amie. »