Ce soir là, comme nous n'avions encore rien à réviser, nous étions dispensées d'étude, et chaque dortoir était encouragé à organiser une petite fête afin de faire connaissance. Je n'avais jamais su comment me comporter pendant les fêtes, je redoutais plus ou moins celle-ci. J'étais convaincue que je devais y assister : si je voulais prendre un nouveau départ, je devais lutter contre ma solitude et créer des amitiés. Rien qu'a cette idée, je stressais. J'évitai donc d'y penser et feuilletai mon manuel d'Easton, allongée sur mon lit, pendant que Constance se préparait en racontant sa vie : - Quand on est enfin arrivés au pied de la montagne, j'étais complètement déshydratée et couverte de boue de la tête aux pieds. Le guide nous attendait en bas. Il nous a demandé si on n'avait pas vu la piste. Et là, on lui a fait : " Quelle piste ?"
Je souris, je sentais qu'elle me regardait et qu'a cet endroit de son histoire, elle devrait attendre une réaction de ma part. - Tu es prête ? me demanda-t-elle Le moment de vérité. Je posai mon livre. - Je descendrai un peu plus tard. Jusqu'à cet instant, honnêtement, je n'avais pas décidé de ne pas y aller. Pourtant, je restai sur mes positions. - Tu veux faire une entrée remarquée , plaisanta Constance. "Ah non, tout sauf ça "pensai-je. Je répondis sans réfléchir : - Oui, sans doute. Elle haussa les épaules : - Très bien, mais tu ne viendras pas te plaindre s'il ne reste plus de pizza ! - Ne t'en fais pas. La porte était à peine fermée que je regrettai déjà de ne pas y avoir été. Qu'est ce qui m'avait pris ? Jamais je ne me ferais d'amies si je passais mon temps seule dans ma chambre. J'avais beau le savoir, j'étais incapable de me forcer à y aller.
Je soupirai et m'adossai contre le coussin que mon frère m'avait offert. Puisque je m'étais imposé cette exclusion autant m'installer confortablement ! Je regardai mon nouveau chez-moi, une pièce carrée aux murs crème et au parquet craquant, meublée de deux lits, de deux bureaux identiques et de commodes à cinq tiroirs. Pour ma part, j'avais eu du mal à en remplir un. Cinq secondes à peine après avoir constaté que mon côté de la vaste penderie restait quasiment vide, Constance m'avait demandé : "Ça te dérange ?" et avait comblé l'espace avec plusieurs manteaux de laine et une doudoune noire. Cela avait renforcé mon sentiment de n'être pas à ma place ici. Ou, pour être plus précise, celui de n'être pas assez importante pour remplir un tel espace.
J'entendis un rire résonné derrière la fenêtre et me leva. Je m'assis sur le rebord de la fenêtre et regarda dehors. Un autre éclat de rire résonna dans l'obscurité. Que faisais-je ici ? Comment avais-je pu penser une seconde que venir étudier ici était une bonne idée?
Je pressa ma tempe contre la vitre et me retins de pleurer. Est ce que la maison me manquait? Mais quoi, exactement ? Notre lamentable vie de famille ? Les couloirs de parpaings de mon ancien lycée ? Je pensa à mon père et Justin, qui avait toujours été adorables avec moi. J'imaginai mon chien agitant la queue pour accueillir mon père a son retour. Il s'attendrait à ce que je sois là aussi, bien sûr. Je vis l'affreux papier peint à fleurs dont mes parents avaient tapissé ma chambre, avant que je montre mon caractère de garçon manqué : un papier que je détestais, mais qui pour moi, symbolisait à lui seul ma maison.
Pourquoi tout ça me semblait tout à coup si merveilleux ? La veille encore, je trépignais d'impatience à l'idée de tout laisser derrière moi. Une larme coula sur ma joue. Non! Il ne fallait pas que je pleure. J'avait fait mon choix. Pas question de téléphoner à Papa pour le supplier de venir me chercher. Il n'y avait rien pour moi à Easton. Je le savais, il suffisait juste que je me concentre là-dessus.
Je fixai les fenêtres éclairées des autres dortoirs, et me dis que ma place était ici, à Easton. Je tentai désespérément de m'en convaincre.《 Je vais être heureuse. Je vais me faire des amis. C'est le début d'une Nouvelle Vie.》
C'est alors que je l'aperçus. Une fille assise devant une fenêtre identique à la mienne, juste en face de moi. Elle était mince, avec des traits délicats, une peau claire et des cheveux blonds presque blonds qui tombaient en vagues sur ses épaules. Elle portait un pull blanc et un bas de pyjama et paraissait captivée par un livre posé en équilibre entre ses jambes pliées.
J'avais les yeux rivés sur elle, si bien que je ne remarquai rien d'autres dans la pièce, jusqu'à ce qu'une seconde fille, surgie de nulle part et lui arrache son livre des mains. Je me redressa. J'avais cru une seconde, qu'on l'avait agressée. Puis, je vis "l'agresseur", une grande brune, lança le livre qui retomba projeté sur un lit, oû se trouvaient déjà deux autres filles. Ces deux là riaient et mangeaient des chocolats qu'elles piochaient dans une boîte.
Je me tournai complètement vers la fenêtre et m'assis en tailleur sur le rebord. Les lumières s'éteignirent en face et je retins mon souffle. Un instant plus tard, une lueur surgit dans le noir, puis une autre, et encore une autre. La pièce s'éclaira peu à peu et la silhouette de la fille brune se dessina entre les ombres. Je compris qu'elle allumait de nouvelles bougies. Bientôt les quatre filles furent baignées dans une lumière chaude. L'une d'elles se leva et tendit des verres aux autres. Des verres pleins d'un liquide rouge sombre. Du vin. Elles sirotaient du vin, là, à la lueur des chandelles. Jamais, de toute ma vie, je n'avais vu personne qui leur ressemblait. Elles paraissaient plus vieilles. Pas seulement plus vielles que moi ; ce qui ne faisait aucun doute, mais trop vieilles pour être encore au lycée. Leurs gestes étaient gracieux et pleins d'assurances. Elles tenaient leurs verres comme si elle buvaient chaque jours dans un cristal délicat.
La fille qui riait but une gorgée de vin et esquissa un sourire. Elle portait une robe de soie rouge et discutait avec la deuxième fille aux boucles blondes et aux joues roses de poupée.
La brune hissa alors les mains au-dessus de sa tête ; sa chemise s'entrouvrit et j'aperçut une grande cicatrice rouge, qui barrait son ventre d'une hanche à l'autre. Puis elle s'approcha de son amie et se colla contre elle, et elles se mirent à danser.
La fille quitta violement les bras de son amie, s'approchant de la fenêtre et se figea. Je me raidis quand je compris qu'elle me fixait. J'avais d'abord cru qu'elle avait les yeux perdus dans la vague, mais je me trompait. Elle me voyait. Embarrassée, je me détournai et fis mine de m'intérresser à quelque chose, dans ma chambre. Quand je me résolus à la regarder de nouveau, je m'aperçus qu'elle me fixait toujours, en tenant les rideaux à deux mains.
J'était prise sur le fait. J'avais le souffle court, mais je ne la quittait toujours pas des yeux. Allait-elle me dénoncer à ses amies ? A l'administration ? Serais-je renvoyée d'Easton pour espionnage ? J'espérais qu'elle ne dirait rien. Pendant un long moment nous restions immobiles.
Puis elle sourit presque imsensiblement et ferma les rideaux d'un geste brusque.
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J'espère que le chapitre vous a plu et excusez moi pour le retard😅💗
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Nouvelle Vie
Teen FictionAshley Johnson, à 15 ans elle rentre en classe de seconde à la prestigieuse académie d'Easton ; le meilleure moyen d'échapper à sa mère accro aux médicaments. Sur le magnifique campus, tout n'est que luxe et raffinement. Ashley se sent exclue. Jusqu...