Sixième Eclat

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Jimin s'appuya contre le mur, en se retenant de pleurer. Par fierté, il avait voulu faire le tour de son étage sans son fauteuil et il le regrettait fortement.Il s'écroula au sol : une perle de sueur glissa désagréablement le long de son visage. Ses jambes tremblaient si fort et le tiraillaient tellement qu'il avait l'impression de ne même pas pourvoir faire un pas, affalé comme il l'était contre le mur froid et sale.

Il pensait à Yoongi.

Il n'arrivait pas a comprendre comment son conjoint avait pu lui cacher une aussi grave nouvelle... C'est vrai que ces derniers temps ils ne se parlaient plus tellement, enfin, plus comme avant en tout cas. Mais ils avaient toujours étés si fusionnels, malgré la haine de Yoongi qui laissait des traces sur sa peau ils se racontaient tout.

Quand avaient-ils parlé dernièrement? Quand s'étaient-ils enlacés, murmurés des mots doux?

Quand s'étaient-ils aimés pour la dernière fois, de l'amour pur et sain qui les avait unis ?

Il se remit à pleurer, sans vraiment savoir pourquoi, juste épuisé par les évènements. Il revoyait encore et encore la pâle silhouette du minuscule Yoongi dans son lit d'hôpital, son regard cruel lorsqu'il le frappait, l'infirmière lui annoncer non sans peine la terrible maladie de Yoongi... Tout se mélangeait dans sa tête, un amas de sons et de couleurs.

Il voulait tout effacer, ne plus ressentir et être vide, une loque informe et sans but, ne plus aimer pour ne plus être blessé, tout oublier de Min Jimin.

Qui était-il avant ? Avant Yoongi ? Où était le Park Jimin qu'il avait connu ? Où était le danseur, le chanteur, où était le fêtard sociable, où était celui qui aimait tant ses proches ?

Il se rendit compte que, peu à peu, sans qu'ils ne s'en rendent compte, Yoongi comme lui s'étaient enfermés dans une bulle, un monde noirci de mauvaises choses, un monde où il n'y avait qu'eux deux, fragiles et déjà brisés. Un monde si loin de la réalité et qui éclatait soudain en milles morceaux devant Jimin.

Désormais il se trouvait seul, réellement seul, parce qu'il ne parlait plus à sa famille, qu'il s'était disputé ou éloigné de tous ses amis, qu'il ne parlait plus à personne et que son amant ne parvenait même plus à ouvrir les yeux.

L'amour les avait conduits vers la folie, de la vraie folie.

Jimin réussit, au prix d'efforts incroyables, à se diriger vers les toilettes qui se trouvaient quelques mètres plus loin : mais plus il avançait et plus la douleur diminuait.

Il poussa la porte des toilettes et s'observa un instant dans la glace : les yeux rougis, gonflés, de gigantesques cernes vieillisant son visage, luisant de larmes et de sueur. L'impression de ne pas se reconnaître se fit plus forte encore et le fantôme blessé qu'il était frappait ses paupières, s'imprimant sur sa rétine et se bloquant dans ses pupilles dilatées.

Il passa un peu d'eau fraiche devant ses yeux puis se dirigea vers la sortie lorsque, soudain, il crut entendre un reniflement. Un bruit en somme toute anodin, mais qu'il l'interpella assez pour qu'il ne fasse l'effort de marcher jusqu'à la porte d'où semblait provenir le son. Il ouvrit la porte et la referma pour faire croire qu'il partait. Il faisait ces geste pour le moins étranges presque instinctivement. Le Jimin qu'il était avant, celui qui était impulsif, instinctif, et pas celui qui consultait Yoongi à chaque décision, voilà qui se dirigeait vers la porte.

Il s'avança délicatement vers la cabine : le loquet n'était pas mis.

Avait il rêvé ?

Mais des bruits de pas et une ombre qui passait devant la porte lui fit comprendre que quelqu'un bougeait bel et bien dans l'espace clos, l'intriguant encore plus.

Un bruit se fit entendre : un bruit horrible, que Jimin connaissait : quelqu'un vomissait. Son coeur se mit à battre démesurément et sa respiration se coupa. Il haïssait ce bruit, il en avait la hantise, la phobie presque.

Parce qu'à une époque où il ne s'aimait pas il l'avait beaucoup trop entendu, beaucoup trop vécu.

Il toqua délicatement à la porte : la personne sembla se figer. Mais pour le jeune homme aux jambes affaiblies il n'était plus question de partir ou de douter même. Il suffirait que l'autre ne se soit réveillé dans le même cauchemar qu'il avait vécu pendant des mois pour que Jimin ne se sente terriblement coupable de ne pas l'aider.

Jimin poussa le panneau de bois : il apercut alors un homme. La chevelure brune, le visage fin, les joues creusées, les yeux bruns soulignés par des cernes trop foncées, le corps maigre, les oreilles percées, les lèvres pâles et pulpeuse. Son regard noir, bien trop noir, laissant paraître les pensées d'encre qui brûlaient son âme d'ombre, tachait sa jeunesse et le faisait paraître plus âgé : mais sa maigreur presque extrême contrastait en lui donnant un corps frêle et enfantin.

Le plus bel homme qu'il avait jamais vu : enfin, il en avait vu des plus beau, sans aucuns doutes, des plus épais aussi, mais celui-ci avait, particulièrement dans le regard quelque chose de spécial, de particulier, il était différent, pas dans les standards de beauté coréenne, il était... Juste... Tellement unique.

Tellement unique que ça frappa Jimin et que son coeur repartit de plus belle, mais pas pour la même raison cette fois.

Le jeune garçon essuya sa bouche puis partit en courant.

Les jambes de Jimin se mirent à lui courir après, sans qu'il ne réfléchisse un instant, oubliant même la douleur qui le déchirait.

Parce que dès que l'autre s'éloigna de lui, un vide incompréhensible se mit à lui tirailler le coeur.

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