La tête baissée, le regard dans le vide, Lucien écoute les notes qui résonnent, la musique dans sa tête.
Mi, fa, ré, sol... Les notes dansent dans son cerveau sans que personne d'autre ne les entendent. Le tempo lui donne envie de danser, les paroles envie de chanter.
Bien étrange sensations dans sa situation. Ses lèvres ne chuchotent pas les paroles, et seuls les doigts de sa main gauche bougent, tapotant frénétiquement sa cuisse sous la table.
Il ferme les yeux et espère qu'Il ne le verra pas. Il faut qu'il se concentre, mais le bruit autour le parasite. Celui ci, d'ailleurs, devient soudain plus fort."Eh Lucien, qu'est ce que tu fais? Tu m'écoute ?"
Non, il ne l'écoute pas. À vrai dire, il pensait qu'en parler le libérerait, que sa famille le comprendrait. Et il s'est, encore une fois, trompé. Il n'a que faire des insultes et des reproches.
Mais son père à l'air vraiment énervé. Il tente:
"Je suis désolé mais..."
Muai. Peu convainquant. Et puis il est tout, sauf désolé.Son père sert le poing fort a s'en faire ressortir les veines. Lucien en a marre, il se lève avant même d'entendre une réponse. Mais évidemment, on
l'interpelle:
"Eh! Mais où est ce que tu comptes aller comme ça ? Jte parle bordel!"Cette fois Lucien n'y échappe pas, et la main de son père le frappe en pleine figure. Sa mère, à quelque pas, le regarde sans réagir. Est t-elle d'accord avec lui ou a t-elle peur de se faire frapper à son tour? Lucien n'a pas le temps de réfléchir à cela. D'un mouvement sec, il se détache et cours. Il ferme la porte de sa chambre quelques secondes avant que son père n'y entre. Celui-ci force contre la porte, et le garçon peine à s'enfermer à double tour. Il vocifère des insultes, tembourine contre le rectangle de bois. Mais Lucien ne l'entend déjà plus. Il se jette sur son lit, attrape son téléphone...un seul message. Thomas. Son seul nom le fait sourire. Des gouttes envahissent sa vue et son écran; il est en train de pleurer. Il se sèche d'un geste de la main.
aujourd'hui à 21h30
De: Thomas
"Alors? Tu leur a dit? Comment ils l'ont pris?"Lucien hésite un instant à dire la vérité, avant d'opter pour un simple "pas trop mal". Il ne veut inquiéter personne.
Quelques instants plus tard, il lance la Playlist en aléatoire et Queen retentit dans son casque audio.
Il ferme les yeux et là, il s'évade.
Tout disparaît. Le lit sur lequel il est allongé, les larmes qui coulent, la pluie frappant au dehors, son père lui hurlant d'ouvrir. Les tembourinements incessant lui semblent un lointain écho, et il y distingue même un tempo.
Il murmure chacunes des paroles et se laisse guider par l'infini fil de sa pensée. Paradoxalement, il se sent bien. Son corps est léger, sa joue ne lui fait plus mal. Il est heureux et seules des pensées positives semblent pouvoir le travarser.
Il a l'impression de planer; il est ailleurs. Au fil des morceaux, il immagine des dizaines de choses. Un instant il est astronaute flottant en plein milieu de l'espace, un autre il est un chef d'orchestre prodigieux. Un autre, enfin, il est Freddy Mercury écrivant Bohemian Rhapsody.
Et puis il fini par rêver d'un monde meilleur, un monde où la pauvreté n'existerait pas et où les mots d'ordres seraient simplement liberté et égalité. Un monde dans lequel ce qu'il est ne serait plus une honte, un monde où il serait compris et pourrait être heureux. Pendant un temps, il y pense, et sa situation lui paraît enfin bien moins complexe.
Finalement il sort de sa transe et se lève. Un idée, aussi folle qu'elle soit, emmerge dans son cerveau embrouillé.
Dehors, il ne pleut plus,et la nuit semble tombée depuis un moment. Un cadre idéal pour partir d'ici...
Lucien sort un grand sac et y range le stricte minimum: quelques vêtements, son manteau préféré, son chargeur, son violon, un peu d'argent ..Là où il va, il n'aura pas besoin de beaucoup plus. Bientôt, il franchit la porte près de laquelle son père s'est heureusement endormi. En le voyant ainsi il hésite une fraction de secondes; malgré tout, il serait presque pris de pitié...Mais il détourne bien vite le regard.
Après un SMS à Thomas et un dernier regard au petit appartement, il part. Il se serait sûrement fait virer de toute façon, alors peut être que c'est mieux ainsi. Et puis, il reviendra sans doute.
Quand? Lui même l'ignore.
Dans un mois, Dans des années. ..Peut être même jamais. Peu importe ce qui lui arrivera, peut importe ce qu'il laisse derrière lui, car il ne veut plus jamais vivre ainsi.-"Désolé..." il murmure en fermant la porte.
Et puis, enfin, il part. Il s'en va vers l'inconnu, vers son amour, vers le bonheur qu'il n'a jamais eu. Vers la liberté, enfin.
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Songes
RandomParce que le temps passe Parce que les gens changent Parce qu'il m'est venu l'envie de coucher ici ces mots, ces phrases, ces pensées, ces histoires. Des réflexions sur le monde, sur la vie, sur tout, sur rien. De simples songes, en somme. Alors...