Le journal d'hier

9 juin 2018

Cher journal,

Comment dire? Je m'en veux d'être moi-même. Tout ça, tout ce qui arrive... Je n'ai jamais demandé ça... Mais c'est juste parce que je suis moi! J'aurai du être un autre, changer mon comportement, haïr sans raison, blesser inlassablement, fuir à chaque moment.

Je ne veux pas perdre ceux auxquels je tiens. La solitude m'emprisonne déjà assez comme ça. S'ils me laissent tous encore une fois, que vais-je devenir dans cet océan de noirceur ambiguë, qui mêle torrent de tristesse et lac d'indifférence. Comment survivre sans un échappatoire. J'ai fumé ce matin, oui. Je regrette ça, mais j'ai adoré le faire. Ça m'a libéré, l'espace d'un instant, et j'ai pu me replonger dans mes profondes réflexions. J'ai pu oublier ce monde autour de moi, pour plonger dans un autre qui me correspondait mieux. J'ai pu revoir tout ce que je voulais, j'ai pu penser librement, profondément. Puis ça s'est arrêté, soudainement, et ma migraine m'a rappelé où j'étais et qui j'étais. Ah je suis jeune, à peine 19 ans, et pourtant j'ai l'impression d'en avoir vécu des choses. Ce ne sont pas des périodes mais des époques pour moi. Douces époques où j'étais un peu insouciant, où je pouvais me défonce à volonté, sans réfléchir aux conséquences. Horrible moment où j'appris que je devrai survivre. Légère sensation quand tout se fut fini. Libération du lourd fardeau pendant quelques heures d'inconscience. Violente redescente sur Terre pour me réveiller de ma léthargie. Prise de conscience douloureuse de l'état stupide sans lequel j'étais. Et enfin, tourbillon de malheur et de bonheur mitigés, indécision croissante et envie d'abandonner.

Je me perds et je me retrouve, infatigable sentiment. Ne plus se reconnaître pour mieux se découvrir. Je suis un être instable, je ne connais pas la douce constance. L'amour me donne aussi bien des ailes que des chaînes. Aussi bien des plumes que des poignards. L'amour, c'est une caresse douce et rêche, un souffle léger et lourd, une eau limpide et poisseuse. J'aime, pour être détesté. Je déteste pour être aimé. Et au final, je me déteste d'être aimé.