Entrée en clinique .. Lundi 04 Juin 2018
10h30, salle d'attente.
« Tu sais, il va réellement se plier si tu continues de le triturer comme ça ». Je souris à Maman et regarde ses mains tremblantes poser la plante, en réalité mes quatre frêles pousses de haricots blancs, au sol, près de la valise et du sac surchargé de cours. On attend tous les trois, avec papa, que l'infirmière vienne m'accueillir dans le service. Nos derniers instants ensemble, réunis, et chacun de nous le sait malgré le fait que nous ne le mentionnons pas. Ce sera une semaine d'isolement sans contact avec l'extérieur, durant laquelle nous affronterons seuls de notre côté l'éloignement et la promesse d'un changement, l'achèvement d'une année de vie compliquée au quotidien anormal. Tout ne tient qu'à moi maintenant. Je prends enfin mes responsabilités et soulage mes parents du poids que j'étais malgré moi et malgré eux devenu, même s'ils ne le diront jamais.
Après une demi-heure nous voilà les trois assis dans le bureau face à l'infirmière, à passer en revue tout l'administratif et les papiers concernant ce séjour qui, selon elle, durera plus d'un mois. Mais je m'accroche au fait que l'on soit parti sur une base de vingt jours pour le paiement, je ne compte pas rester mon été ici, peu importe le confort de vie qu'il y a au sein de l'établissement. J'ai d'autres choses à faire. Et pour cela, il faut que je me débarrasse de ce boulet qui me suit depuis trop longtemps déjà.
Tout se déroule normalement et on rencontre une deuxième infirmière ainsi qu'une aide-soignante qui nous accompagnent jusqu'à ma chambre. Ce n'est évidemment pas du cinq étoiles mais elle a le mérite d'être spacieuse, lumineuse, et j'aime le fait qu'elle soit au deuxième étage même si je ne saurais expliquer pourquoi. La prochaine étape sera de rendre cet environnement mien, de me l'accaparer et de m'y sentir bien, ce qui ne nécessitera pas d'efforts surdimensionnés vue l'optique de courte durée de séjour à laquelle je m'accroche désespérément.
Mais la visite s'achève rapidement avec l'ECG et le rendez-vous chez le médecin généraliste qui m'attendent. Il y a des regards qui parlent mieux que les mots, et celui que l'on a échangé avec mes parents à ce moment-là en fait partie. Pas besoin de beaucoup de paroles, des Je t'aime fort fort fort et des larmes, des étreintes et des câlins. Est-ce que je réalise ce qui est en train de m'arriver ? La suite de la journée me révèlera que j'étais bien loin d'avoir compris ce que je faisais là.
On se quitte, papa, maman, je promets de guérir vite pour vous retrouver. Je vous le promets vraiment.
Après cette séparation, je me retrouve guidée pour l'ECG et globalement les examens d'entrée.
Premier rapport : bradycardie extrême, 38bpm et 8 de tension.
La fatigue et le manque d'énergie qui s'installaient de plus en plus et paralysent ma vie ont finalement une explication. Je me rappelle le mercredi et le jeudi de la semaine précédente, lorsque j'ai cru que je n'allais pas réussir à rentrer à la maison, que je sentais mes jambes menaçant de ne plus me supporter et mon souffle me manquer. C'était mon corps tout entier qui semblait me lâcher, réunissant toute la frustration que je peux éprouver à ne plus être capable de faire du sport, de suivre les cours, de me concentrer, de garder de l'énergie pour profiter pleinement de mes amis. C'est pour retrouver tout ça que je vais me battre en premier lieu. J'arrive à saturation. Je suis une fille de 17ans avec l'énergie d'un vieux, et ça doit changer maintenant avant que je regrette d'avoir perdu autant de temps.
VOUS LISEZ
Effet plume
Non-FictionCe ne sera pas une oeuvre littéraire, ni la pièce d'un prochain Molière, mais seulement un amoncellement de pensées quotidiennes, une plongée au coeur des eaux tumultueuses ayant remplies l'esprit d'une fille. Recueil de périodes de combats mêlées a...