CIEL BROUILLÉ

2

Je suis rassurée quand je vois le peu de dégât qu'a causé cet accrochage et d'après l'expression de l'homme qui se tient à côté de moi, je peux en dire autant de lui.

- Ça va, c'est rien, souffle-t-il.

- Vous êtes sûr ? le questionnais-je.

- T'inquiète pas, c'est pas ouf. Et s'il te plaît tutoies-moi, je sais que je suis un vieillard mais quand même.

- Je... D'accord... Mais t'as pas l'air si vieux...

- Nettement plus que toi je pense, me répond-il, quel âge?

- 20 ans bientôt !

- Wouah, comment t'es vieeeille ! fait-il d'une mine faussement choquée, moi j'ai 27 ans...

-  Oh, on dirait pas en tout cas...

- Ah enfin quelqu'un de gentil avec moi !

- Bon, je veux pas être rabat-joie mais j'étais censée être à la salle à 8h et il est plus de 9h... je déclare en affichant un petit sourire gêné, il y a pas l'air d'avoir de dégâts trop sérieux, je peux te demander ton numéro ? Je te rappellerai pour qu'on parle de ça plus tard parce que là je vais me faire tuer !

- Tu vas à la salle à 8h du mat? T'es trop motivée toi ! Il faut que tu me passes ton téléphone par contre parce que j'ai rien pour écrire sur moi, m'affirme-t-il.

-  La salle fait un peu partie de mon métier en fait, riais-je un peu gênée en lui tendant mon téléphone, tiens !

- Il est verrouillé, annonce-t-il d'un air moqueur, beau fond d'écran hein. 

- Ah oui pardon, je... Merci... 

Ce mec est intimidant et ça m'embête de bégayer comme une gosse devant lui car c'est clairement pas dans ma nature. 

Je souris en voyant mon fond d'écran. Il a raison, il est beau. Je me décide enfin à déverrouiller mon téléphone après quelques regards insistant de l'homme en face de moi. Il entre son numéro et me rend mon téléphone. Je le remercie.

- J'espère que c'est pas un faux.

- Envoie-moi un message ce soir, tu verras bien, dit-il en esquissant une fois de plus un sourire, à plus!

Et il repart en direction de sa voiture comme si de rien n'était. Comme si cet accident n'avait pas existé. Ordinairement, quand on emboutit une voiture un lundi matin à un feu rouge, on est énervé, non? Ça n'avait pas l'air d'être son cas, pourtant.

Moi non plus, en vérité. Je suis plus frustrée d'être encore plus en retard que je ne l'étais déjà, qu'énervée. Je pense que c'est le fait que je ne sois pas tombée sur un vieux con vulgaire qui aurait voulu ma peau alors que ce n'est même pas de ma faute. C'est rassurant.

Après avoir repris la route qui mène à mon travail, j'arrive sur les lieux 30 minutes plus tard. Enfin "sur les lieux" est un bien grand mot. Je me situe dans la bonne rue, quoi. Maintenant il faut trouver une place. Ça m'étonnerait que je trouve une place dans cette rue, à cette heure-là, mais je ne désespère pas. Je vis une femme sortir précipitamment d'un immeuble, avec dans la main, son jeune enfant qui suit comme il peut. Ils doivent être en retard pour l'école. Je ralentis en espérant qu'elle ait une voiture garée pas très loin, histoire qu'elle me laisse sa place.

Bingo!

Elle part aussi vite qu'elle était sortie du bâtiment et je me gare plutôt rapidement, malgré le fait que cela soit une place de créneau avec une automobile qui empiète légèrement sur ma place de stationnement. Je sors de la voiture, énervée par ce trajet.