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Bien souvent, c'est dans les pires moments de notre vie qu'on estime le plus sa valeur. C'est quand on s'apprête à mourir qu'on comprend à quel point respirer est fantastique, de la même façon qu'on prend conscience de la véritable valeur d'une personne au moment où l'on s'apprête à la perdre. On repense à toutes les choses insignifiantes qui nous prenait la tête l'heure précédente. À cette dispute futile qu'on a eu avec le voisin sur la largeur un peu trop massive de sa haie. À ce dîner bien trop inutile qu'on s'acharne pourtant à rendre parfait pour ses beaux-parents. À ce vase brisé à l'origine d'une grande colère envers son fils beaucoup trop maladroit.

Tout nous paraît soudainement bien moindre, et on se sent idiot d'y avoir accordé autant d'importance. Le problème, c'est que ces révélations, pourtant essentielles, arrivent toujours beaucoup trop tard.

Au bout de l'allée, des supplications larmoyantes torturaient les couloirs de toute leur longueur. Les gémissements d'agonie et les hurlements de colère des élèves pavaient le sol d'une morbidité désarçonnante, faisant naitre une terreur sourde chez ceux qui pouvaient encore les entendre. Terreur qui s'amplifiait considérablement lorsqu'ils étaient réduits au silence par le bruit net et reconnaissable d'un coup de feu. En dix minutes à peine, l'école fleurie avait laissée place à un univers sanglant, cerné par la perfidie d'un être en quête de vengeance. La transformation avait été si brutale que le soleil lui-même avait choisi de déserter l'endroit.

Désormais il n'y avait plus que la noirceur, et une centaine d'âmes apeurées de finir leurs jours ici, une balle collée entre les yeux et un avenir réduit l'état de poussière.

- Baekhyun... Murmura la voix étranglée de la jeune femme à sa droite.

Ses jolies cheveux blonds semblaient soudainement ternis par l'horreur qui l'habitait. Ses yeux encore rougies par les larmes peinaient à soutenir le regard perdu de son collègue. Il n'était pas difficile de deviner qu'à cet instant, il demeurait aussi terrorisé qu'elle.

À la première détonation, c'est Johanna qui avait eu le premier réflexe de survie en fermant brusquement la porte du bureau administratif. Elle avait poussé Baekhyun à l'intérieur, cloisonnant l'entrée pour s'enfermer à double tour. Le brun avait rapidement posé ses dossiers sur la table de bois, se ruant vers la micro-fenêtre qu'il y avait près de la porte pour observer le couloir du deuxième étage.

Ils avaient attendu, la respiration coupée pour quelques secondes, s'imaginant de multiples scénarios grotesques avant que Johanna rigole d'une voix légèrement tremblante.

- Il fond les essais pour les feux d'artifice ces idiots. Avait-elle déclaré avec un sourire fragile.

Baekhyun lui avait rendu sans y croire vraiment, puis alors qu'il posait ses doigts fins sur la poignée de la porte, une détonation brisa chaque parcelle de son être. Un premier hurlement s'éleva un étage plus bas. Puis un autre. Puis encore un autre. Et sous leur symphonie désaccordée, le cauchemar de Lycée Liberty High School débuta.

C'est aux alentours de 11 heures, heure locale, que le drame de Daegu a débuté, entre les murs pourtant bien calmes du lycée international Liberty. Pour l'instant, aucune revendication terroriste n'est confirmée. Une équipe de police ainsi qu'un comando spécialisé a été dépêché sur place suite aux appels d'alerte du directeur de l'établissement ; Monsieur Kim Yeong Min. Les premières estimations font office d'une dizaine de blessés. Les étudiants qui ont réussis à s'extirper de l'école sont actuellement pris en charge au moment où je vous parle.

- Il faut qu'on sorte d'ici.

D'un bond, Baekhyun se remis sur ses deux pieds, ses jambes le portant presque sans trembler, et semblant prêtes à courir le marathon. À ses côtés, Johanna le lorgnait, les yeux révulsés et le teint bien plus pâle que la seconde précédente.

Une balle à la fois (ⓒⓗⓐⓝⓑⓐⓔⓚ)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant