J'étais plongée dans mon livre, au plus profond de mes pensées, dans la tête de Kurt Cobain, ou du moins dans son journal. Adossée à cet arbre, je pouvais me reposer et m'évader avant que le cercle infernal ne se remette en route. Ce serait la sonnerie qui me sortirait de mes rêveries pour me ramener brutalement à la réalité et toutes ses difficultés. J'aurais tellement souhaité arrêter le temps, pouvoir respirer sans avoir à m'inquiéter du futur.
L'action arriva plus tôt que prévue, j'étais habituée à la violence au lycée mais deux bagarres en une journée, c'était un record. Tant plongée dans mon livre, je ne daignai bouger. C'était aussi une occasion pour être sûre d'être tranquille, qui se souciait d'un déchet social lorsqu'il y avait un spectacle gratuit juste à côté. Après un certain temps, les surveillants intervinrent enfin. Si ils se décidaient à se réagir c'est que cela devait être vraiment grave. J'entendais alors au loin des gens crier « Appelez les secours ! ». Ma curiosité se mit alors à me démanger de plus belle, j'étais incapable de me concentrer dans ma lecture.
Sans que personne ne le remarque, je m'étaisintroduite dans le centre de la masse d'élèves. Pendant un court moment, j'étais comme les autres. Je tendis l'oreille pour tenter de comprendre ce qui s'était passé. Nous dûmes reculer avant même que je puisse apercevoir la scène. Ce ne fut que quand les gens commençaient à reprendre leur activités normales que je reconnu, au milieu du sang, le jeune homme que j'avais aidé. A ma plus grande surprise, il n'était pas le seul à terre, Jason était à quelques mètres de là, pas mal abîmé lui aussi. Je réussis enfin à connaître l'histoire, la victime avait prit sa revenche sur le bourreau et cela c'était plutôt mal passé. Malgré ça, j'admirais le courage dont il avait fait preuve pour se rebeller, en fait, je l'admirais tout court.
L'ambulance arriva peu de temps après, ils emmenèrent le blessé assez rapidement, son état avait l'air critique. Quant au "dur à cuire", il alla faire un tour au bureau du principal. Autant dire que cette affaire était loin d'être terminée. J'entendais la sirène s'éloigner et sentis alors un léger pincement au cœur, peut être même plus, j'étais déstabilisée. Involontairement, je cherchais à reconstituer la scène, je voulais comprendre comment tout cela c'était passé. Non pas pour le scoop mais pour connaître la source de courage de ce souffre-douleur qui n'avait jamais rien demandé. A vrai dire, il envahissait totalement mon esprit, ce garçon que je ne comprenais pas mais qui pourtant m'était si similaire. J'avais peur pour lui, je l'avouais.
Je fus très vite ramenée à la réalité, c'était le moment des cours. La motivation y était encore bien moins qu'au réveil. En classe, j'étais incapable de me concentrer. Ne cessant de penser au jeune inconnu, mais pourquoi ne voulait-il pas laisser mes pensées ? C'était décidé, j'allais aller le voir à l’hôpital en rentrant le soir-même. « June, tu dors ? Veux-tu répondre à la question s'il-te-plaît? », demanda la prof de Maths. Je manquai de répondre oui à la première interrogation et non à la deuxième. Décidément, je n'en avais que faire de son cours. J'avais bien d'autres problèmes mais, elle, n'était pas au courant de tout cela, personne n'était au courant. C'était mon petit jeu intérieur, un jeu maléfique qui m'avait emprisonné dans ses règles machiavéliques. Et pourtant, j'étais la maîtresse du jeu. Les cartes étaient dans la main d'une suicidaire.
L'heure du repas arriva bien plus tôt que prévue, trop tôt à mon goût. Il était hors de question d'ingérer quelconque aliment, pas plus pour faire plaisir que pour survivre encore un peu. J'allais me contenter de faire semblant en jouant dans l'assiette, cela avait uniquement été une habitude à prendre. De toutes manières, je ne ressentais quasiment plus la faim tant mon estomac avait été réduit et c'était très bien ainsi. Mon état léthargique était ce qui me handicapait le plus mais je ne pouvais tout simplement pas me reprendre en main. Non, j'étais prise dans un engrenage infernal.
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Destructive Love
General FictionJe n'aime pas les histoires d'amour, à vrai dire, je déteste ça. Oubliez donc l'eau de rose et partagez cet amour destructeur, loin des doux contes enfantins. Dans une réalité effrayante où le rêve n'a de place que dans la tête, une jeunesse en déri...