Ils avançaient en rythme dans le dédale de couloirs souterrains qui passaient sous la cité. Abandonnés depuis des lustres, ces sombres passages n'avaient rien de rassurant. De drôles de bruits se faisaient entendre assez régulièrement, de minuscules silhouettes se détachaient de l'obscurité pour disparaitre trois pas plus loin, et une odeur infecte, dont il valait mieux ne pas connaitre l'origine, emplissait tout l'espace. Et pourtant, se sentant enveloppée par l'aura chaleureuse de son cousin, Aliya avançait sereinement. Il dégageait une onde de confiance tellement apaisante qu'elle se contentait d'avancer tranquillement dans ces couloirs humides et obscurs. A ses côtés, elle n'avait jamais peur.
Ils cheminèrent en silence quelques temps, en symbiose totale, puis, Bohdan la fit entrer dans une pièce mal éclairée. Il s'agissait vraisemblablement d'un ancien salon car on pouvait apercevoir un assortiment de vieux meubles tels que des fauteuils en tissu, ou une petite table basse. Le temps que ses yeux s'habituent à l'obscurité, puis, Aliya perdit son sourire. Face à elle, assise sur une chaise branlante, se trouvait une grande femme brune au visage constellé de taches de rousseur.
– Bonsoir Aliya.
– B... bonsoir tante Eileen, répondit-elle d'un air perdu.
– J'imagine que tu es surprise de me trouver là, peut-être même un peu fâchée, mais n'en veut pas à Bohdan. Il n'avait pas le choix. Je lui ai fait promettre de me prévenir s'il se passait quelque chose, s'il estimait qu'il y avait un espoir.
– Un espoir ?
– Oui, ma chérie, l'espoir de voir un Don actif s'ajouter aux nôtres ! L'espoir de pouvoir s'allier pour en finir avec tout ça !
– Tu veux dire que toi aussi tu cherches une solution pour partir ?, demanda Aliya, interloquée.
– Evidemment ! Tu ne pensais tout de même pas être la seule à vouloir quitter cet endroit ?
– Non, bien sûr. Mais, vous autres, les adultes, vous semblez si passifs et résignés ... On ne croirait pas que vous voulez tenter de vous enfuir !
– Ah ah ah ! C'est l'effet escompté, ma puce. Ils nous jugent inoffensifs grâce à cela. Ils ne sont donc pas sur leurs gardes et ne soupçonnent rien. Et, si on veut que ça continue ainsi, tu vas devoir te montrer plus prudente.
– Bohdan te l'a raconté ... Tu lui en as parlé ! Traitre !
Un sourire amusé naquit sur les lèvres du jeune homme.
– Aliya ...
– Pardon tante Eileen ... Mais quand même, c'était un secret ...
– Je comprends bien, mais qu'auriez-vous fait tous les deux après en avoir discuté ?
– Eh bien, nous nous serions entrainés pour réaliser à nouveau un portail. Et ...
– Et après ?
– Nous aurions prévenu la famille ...
– Et comment penses-tu que nous aurions pu tous nous éclipser d'un coup, sans attirer l'attention ? Et, que ce serait-il passé pour les autres prisonniers ? Tu t'es fait des amis ici, non ?
– Nous serions revenus les chercher !
– Alors, ils seraient morts, et nous aussi en revenant chercher leurs cadavres.
Aliya en resta bouche bée. Depuis sa découverte, pas une fois elle n'avait songé aux autres malheureux qui se trouvaient prisonniers avec eux. Il est vrai que cela changeait la donne. Et puis, sa tante avait raison, évidemment, mais elle ne pouvait pas faire comme si rien ne s'était passé. Elle avait créé un début de portail, c'était donc la porte ouverte à une tentative d'évasion ! Mais, Eileen avait douché son enthousiasme. Elle se laissa tomber dans un fauteuil troué installé en face de sa tante. Tout un tas de questions nouvelles tournaient dans sa tête et ses rêves d'évasion s'éloignaient peu à peu. Son cousin s'approcha d'elle et posa une main sur son épaule.
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La fille du Vent
FantasíaAliya va entrer dans l'âge adulte. A ce moment crucial de sa vie, elle devrait avoir le choix de sa Voie. Mais, étant l'une des dernières représentantes de son peuple, seules deux possibilités s'offrent à elle. Et, toutes deux la laisseront dans l'o...