楤 dead leaves ⁺ ᵖʲᵐ

I

« Je ne peux plus t'attraper, je ne peux plus m'accrocher à toi »
- Jungkook, 'Dead Leaves'

Je pense qu'aujourd'hui était le réveil le plus dur de ma vie. Enfin, le deuxième réveil le plus dur. Le premier, je l'ai eu il y a quatre ans. J'avais mal à la tête, bordel. Ce matin-là, j'allais devoir tout réalisé. Tout réalisé, et en plus faire semblant d'aller bien. Alors qu'au fond de moi, j'étais juste brisée. Il était seulement 6 heures, et j'avais extrêmement mal dormi cette nuit. On se demande pourquoi. Je me levai pour aller dans ma salle de bain. Oh, merde. J'avais les yeux rouges de la veille, ainsi que d'énormes cernes sous mes yeux. Et je devais être présente à 9 heures 30 dans les loges, pour ensuite, faire un shooting photo pour une grande marque de luxe à 10 heures. Un shooting. Avec cette gueule de zombie. J'ai eu un bug de plusieurs secondes, en fixant mon miroir d'un regard vide. Je sortis de la pièce et me précipitais sur mon téléphone pour taper un numéro que je connaissais par cœur.

« - Jae-Hwa ? Ça va mieux ?
- Oui, ça va. Vraiment, tu peux venir chez moi s'il te plaît, c'est urgent.
- Maintenant ? Y'a un autre problème ?!
- Juste... viens s'il te plaît. »

Ma voix se brisa vers la fin de ma phrase. Ne pleure pas, ne pleures pas. J'avais vraiment besoin de voir Rae. C'était ma meilleure amie. On a vécu toutes nos joies et nos galères ensemble, et ce, depuis mes onze ans. Elle m'avait toujours soutenue, même si, dans ma vie, j'avais fait d'énormes erreurs. Irréversibles. Maintenant, je suis une mannequin franco-coréenne. Je ne vais pas le cacher : j'étais vraiment fière de mon parcours. Il y a quatre ans, jamais je n'aurais cru que cela arriverait. Je vivais dans un grand appart, au cœur de Séoul. Mon père est français et ma mère coréenne. J'ai 21 ans, et toutes mes dents ! Ma tentatives d'humour (à moi-même) tomba à l'eau. J'eus pour la énième fois les larmes aux yeux.

« - Jae-Hwa, je suis arrivée ! »

Dieu merci. J'avais tellement besoin d'elle. Rae était une jeune coréenne brune, avec les yeux marrons. Elle dégageais un putain de charme. Je la trouvais juste magnifique.

« - Rae !...
- Oh non ma chérie ! Ne pleure pas, s'il te plaît... Explique-moi, dit-elle en voyant mes yeux bouffis.
- Je... je ne sais pas. C'est trop frais dans ma tête...
- Ça va te faire du bien, Jae-Hwa. Ça va t'enlever un poids.
- C'était... hier soir. Je... j'inspirais profondément pour m'éviter de succomber.
- Attend, me coupa Rae. Viens-là. »

Elle me pris la main et m'entraîna pour la deuxième fois de la matinée dans ma salle de bain. Elle ouvrit mes tiroirs et sortis mes masques pour me visages, soins pour la peau, huiles...

« - Approche-toi.
- Merci. Vraiment, merci Rae. Je ne sais pas ce que je ferais sans... sans toi !...
- T'inquiète pas. T'aurai fait la même chose pour moi, me sourit-elle en m'appliquant un soin sous mes yeux. Maintenant, raconte-moi ce qu'il s'est passé. J'ai absolument rien piger à ce que tu m'as dit hier. »

En effet. Hier, j'étais littéralement au bord du gouffre. J'avais appelé Rae en speed, mais j'étais tellement en train de pleurer toutes les larmes de mon corps qu'elle n'avait dû rien comprendre. J'étais partagée entre pleins de sentiments différents : la tristesse, l'abandon, le dégoût... la colère. Pas contre lui, mais contre moi.

« Hier soir, Jimin m'a envoyé un message. Il m'a dit qu'il voulait me voir. J'étais juste... heureuse. J'imaginais bien qu'il voulait parler de... ce qu'il s'était passer... la dernière fois, mais au moins il voulait toujours me voir.
- "La dernière fois"... ta... tromperie ?
- Oui. Il n'avait pas... tirer un trait sur moi, tu vois. Bref. J'ai été le voir, dans un bar à Hongdae. Je l'avais vu au loin. Nous étions tous les deux camouflé pour passer inaperçus. Sinon, des fans seraient venus nous voir, et ce n'était... juste pas du tout le moment. Je souriais, même si j'avais le trac. Il m'avait vu, lui aussi. Mais il n'avait pas souri. C'est à partir de ce moment-là où j'ai eu un mauvais pressentiment. Mais j'ai continué d'avancer. Quand je fus en face de lui, j'ai voulu... l'embrasser. Je ne sais pas si c'était courageux ou stupide de ma part. Il m'a repoussé. Rae... Tu ne peux pas savoir à quel point ça m'a fait mal. Je... Je l'ai regardé en levant la tête. Il m'a dit : "Jae-Hwa... il faut que je te parle". Il n'a pas dit "Il faut qu'on parle". Il ne m'a pas non plus appelé "Hwa-Hwa", comme il le faisait souvent pour m'embêter. Il sait aussi bien que toi que je n'aime pas ce surnom. Plus j'y repense, plus je me dis que c'est juste stupide de ma part d'avoir pensé qu'il me pardonnerait aussi facilement. J'aurais eu la même réaction, à sa place... Rae... Désolée, mais je ne peux pas te dire mot pour mot ce qu'il m'a dit... je... je pense que... ça me rendrais encore plus triste, tu vois.
- Fais comme tu le sens, Jae-Hwa. De toute façon, je serais toujours là pour te soutenir.
- Il m'a dit... il m'a dit qu'il voulait qu'on... qu'on... se sépare, dis-je, la voix tremblante et les larmes aux yeux. Je... Je lui ai dit que c'était juste... juste pas possible, parce qu'on s'aime ! Qu'on est fait l'un pour l'autre. Je n'avais jamais été aussi vulnérable. Je lui ai dit que je pourrais lui expliquer ce qu'il s'était passé... l'autre jour. Il m'a crié, il m'a supplié de tout lui expliquer. Mais quand j'ai vu les regards se tourner vers nous... je lui ai dis que ce n'était pas possible maintenant tout de suite, mais que je lui dirais tout plus tard, qu'il fallait qu'il patiente juste... un peu. Il a dit qu'il en avait marre d'attendre pour avoir des réponses à ses questions. Et puis, il est parti. Je me suis retrouvée seule. Une nouvelle fois. »