Partie 2 : "Toi qui répares les cœurs, peux-tu prendre le mien ?"

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Elle réparait un jour un cœur quand le fil qu'elle tirait s'arrêta, se coupa. Elle regarda l'ouvrage, et compris qu'elle pourrait ne finir que celui-ci. Elle continua, faisant bien attention au fil qu'elle utilisait. Il s'évapora comme les autres, et la petite fille resta seule, hésitante. Elle jeta un œil par sa fenêtre, et vit un jeune garçon qui hésitait, allait et venait. Elle l'avait déjà vu auparavant, mais jamais il ne s'était arrêté.

La petite fille sourit, et reprit son poste. Le garçon n'était pas là, mais d'autres s'arrêtèrent. Leurs demandes ne changeaient pas.

Aide-moi.

C'était là son souhait le plus cher. Alors elle tendait les mains, et prenait. Elle rentrait, observait les blessures, les fêlures, les accrocs. Elle les touchaient délicatement, puis posait sa main contre sa poitrine. Là, elle sortait son cœur, ravalait ses larmes, et comparait. Elle prenait un bout entre ses doigts, tirait légèrement. Et elle assemblait les deux.

Elle eut peur, la première fois, que cela échoue. Mais le premier cœur qu'elle répara s'évapora en brillant comme les autres. Elle sourit encore, ignorant la douleur infime qu'elle sentait en elle. Heureuse, elle reprit son poste devant son impasse.

Longtemps, cela dura. Longtemps, elle utilisa son cœur pour guérir celui des autres, acceptant la douleur grandissante en échange de la joie de ceux qui voyait leur bien le plus précieux réparé.

Un matin d'hiver, elle se postait comme d'habitude devant son impasse, le jeune garçon s'arrêta. Il la regarda longuement, puis enfin formula sa requête.

Toi qui répare les cœurs, peux-tu prendre le mien ?

Elle sourit en tendant sa main.

J'accepte vos sentiments blessés.

Contrairement aux autres, le garçon tendit une petite bourse en tissu, fermée. La fillette sourit néanmoins, et attendit que le garçon parte. Il ne le fit pas, il attendait qu'elle ouvre la bourse.

Elle prit tout son temps pour le faire, et ce qu'elle vit la fit ouvrir grand les yeux de surprise. Le cœur était intacte, plus beau, plus pur et lisse que tous les autres. Il n'était pas blessé. Il n'était pas abîmé, il ne comportait aucune rayure. Incrédule, elle le caressa, leva ses yeux vers le garçon, qui lui dit:

C'est pour toi.

Elle sortit le sien, et une larme coula sur sa joue. De son cœur ne restaient que des lambeaux.

Lui, tu dois le garder, le protéger. Tu ne dois pas l'utiliser comme tu l'as fait. Toi qui répare les cœurs, peux-tu me laisser réparer le tien ?

Elle serra contre elle le cadeau du garçon avant de le lui retendre.

Je ne peux accepter, qu'auras-tu, toi, alors ? Il me vaut mieux vivre avec un cœur meurtri que sans cœur, reprends ton bien.

Il prit encore une fois la parole :

Échangeons, dans ce cas. Je prends ta tristesse, ta peine. Prends mon cœur.

La fillette ferma les yeux sans répondre. Ses lèvres tremblèrent, et elle laissa échapper ce qu'elle avait toujours gardé pour elle. Son bonheur, la joie qu'elle ressentait au départ, n'étaient plus là depuis bien longtemps. La douleur, qu'elle croyait accepter, la noyait et commençait à la dévorer. Le garçon, voyant la détresse de la petite, prit donc le petit organe mutilé pour le bercer lentement. Il continua jusqu'à ce que les larmes de la réparatrice des cœurs se tarissent. Il ne s'arrêta pas.

Quand la petite fille rouvrit les yeux, en face d'elle il n'y avait personne. Son cœur blessé et fêlé avait disparu également. Dans ses mains, en revanche, le joli objet du garçon était resté. Elle le serra fort dans ses bras, se recroquevillant autour de lui. Elle posa ses lèvres d'enfant sur le cadeau du garçon, et malgré sa peine, un sourire naquit sur son visage.

Elle murmura au cœur, tandis qu'autour d'elle se pressaient des étincelles rouges scintillantes :

Toi qui m'as donné ton cœur, je t'aime.

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