Ce jour là

Ce jour là, partie 1

Avant de m'endormir hier soir, j'ai pensé que j'aurais pu te retenir.

J'espérais pouvoir remonter le temps.
Revenir à notre premier jour, te souviens-tu de ce jour là ?

Installée tranquillement sur un banc comme les autres au fond du parc, je lisais le livre que m'a prêté un ami.
Il s'appelait "Vies Éphémères".
Avant de le commencer, je me suis posée une question, cette même question que tu as utilisée pour m'accoster pendant ma lecture.

《 De quoi peux parler ce livre avec un titre pareil ?》

Tu as dis cela tout en t'asseyant à mes côtés sur le vieux banc aux couleurs ternes. Ton assurance et ta curiosité m'avaient intéressée.

Chaque jour, tu me retrouvais au fond du parc, on s'installait tous les deux pour continuer nos grandes discussions intellectuelles. Cela me plaisait de parler avec toi sur ce banc, ce même banc qui a accuelli notre premier baiser...
J'aimais me blottir contre toi, je me sentais en sécurité.

Quel que soit le temps on venait sans fautes, tu te rappelles de cette après-midi pluvieuse ?
Ce moment où la pluie tombait tellement que des dizaines de flaques sans formes précises étaient apparues, tapissant les allées du parc.
Comme un enfant en manque d'amusement, tu m'as supplié d'aller y jouer. Puis nous nous sommes retrouvés à sauter dans l'eau et à rire aux éclats.
La pluie fraiche m'a trempée jusqu'aux os mais je suis tout de même rentrée chez moi le sourire aux lèvres.

On s'est même familiarisés avec les passions de l'autre, un jour tu as passé plus de deux heures à m'apprendre un très court morceau de guitare. Je ne comprenais rien et à plusieurs reprises j'ai pensé que tu allais abandonner, mais tu as persévéré encore et encore...
Tu ne te decourageais jamais, j'adorais ça.
Tu m'as aidé à devenir plus forte, j'ai réappris à m'amuser comme dans mon enfance.
Un jour alors que j'arrivais vers le banc, tu m'as demandé si je voulais jouer au Monopoly avec toi. Nous avons installé le plateau entre nous deux et avons debuté une partie.
Tu perdais toujours mais tu gardais ton énergie débordante à tout instant.

Parfois nous nous amusions à commenter l'attitude des passants, toujours assis sur le banc au fond du parc. On pouvais observer des choses très drôle, par exemple cette petite fille aux cheveux blonds qui dansait n'importe comment sur nous ne savions quel rythme.
Te rappelles-tu aussi du petit garçon qui courait partout et arrosait tout le monde avec son pistolet à eau ?
Quand il est arrivé vers nous, tu lui as demandé si tu pouvais voir sa magnifique arme et quand tu l'as eu en main, tu t'es mis à parcourir le parc pour faire comme lui.
Je m'étais dis qu'à ton âge ce n'était pas normal d'essayer de vouloir battre le record du plus de gens mouillés dans le moins de temps possible.

Avec du recul, je me dit que c'était cela qui me plaisait chez toi. Au premier regard, tes airs d'enfant cachait ta grande maturité, pourtant bien présente.
Si j'avais besoin d'un conseil, tu étais la personne parfaite pour en parler. Tu m'aidais souvent, j'avais l'impression que tu me donnais plus que tu recevais de moi. Alors pour me rattraper un peu je me suis mise à faire des gâteaux. Une véritable erreur. Tous les muffins ont brûlé, je les ai quand même amenés au banc pour les manger ensemble tu m'as rassuré en disant qu'il avait l'air délicieux. Après en avoir goûté un tu m'as fait promettre de ne plus jamais pâtisser, j'étais d'accord avec toi, ils étaient très mauvais.

Plusieurs temps après, il y a eu cette horrible après-midi. Au premier coup d'oeil cela aurait pu être une belle journée mais quand tu es arrivé au banc, il pesait une atmosphère qui me mettait mal à l'aise.
Tu ne souriais pas et tu ne t'es même pas assis sur le banc avec moi.
Tu m'as juste dit :

《 Excuse-moi mais je ne reviendrai plus ici. 》

J'étais dans l'incompréhension totale, je n'ai même pas eu le temps de demander pourquoi, tu étais déjà parti...
J'ai continué des semaines et des semaines à venir à cet endroit, où nous avions partagé tant de choses. Je ne t'ai jamais revu.

Maintenant encore, ne serait-ce que voir ce banc me fait ressentir une profonde haine envers toi. Je ne cherche même plus à comprendre pourquoi tu as fait ça.

La déception est un sentiment qui ne nous déçoit malheureusement jamais.