Chapitre 8

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Banlieue de Séoul,
6 heure du matin.

Le jour se lève sur Séoul et Seokjin aperçoit désormais les immeubles qu'il cotoie tous les jours depuis maintenant deux ans. Les feuilles d'arbres dansent au contact de l'air et quelques oiseaux commencent à chantonner. Une lueur rosâtre dans le ciel laisse place à un bleu des plus clairs. Une bonne journée s'annonce pour tous mais Seokjin sent déjà ses paupières tomber au fur et à mesure de sa promenade.

Jin lève les yeux vers de hauts bâtiments qui s'élancent sans frontière dans le ciel. C'était aussi un coin de verdure -mal entretenu certes- mais les arbres et les plantes sont légion dans ce coin de la ville. En fait, ce quartier, cette banlieue, il la déteste sans pouvoir s'empêcher de l'apprécier. Il lui est comme rattaché sans qu'il ne le veuille vraiment. 

En inspirant une bouffée d'air, il se rend compte du calme presque céleste qui règne ici. Sous cette légère brume, les habitants ne tarderont pas à sortir et la ville va recommencer à vivre comme si la nuit ne les avait jamais figés. Une fine lueur l'illumine et le sort de sa torpeur, il ne peut pas s'empêcher de penser à la soirée qu'il vient de passer. Ce n'est pas rare de les voir ensemble mais une bonne soirée ne peut que le réconforter de l'idée de sa routine. Désormais adulte, il a l'impression qu'il lui est interdit de décompresser et que bientôt, il devra s'investir dans une vie de famille bien ficelée mais il n'en a que faire. Quand il joue au parent avec ses amis, il ne cherche qu'à les protéger mais il ne ressent aucune pression, c'est ça qu'il aime.

Chez eux, Rin doit l'attendre. Furieuse, elle sait quelle odeur il porte sur lui. Jin boit rarement et c'est toujours avec modération mais bon Dieu, qu'est-ce que ça peut lui faire du bien. Soudain, une voiture le dépasse, manquant de peu de l'écraser, il a presque oublié où il se trouvait, quelle ironie quand on pense au fait que ce lieu le hante. Au petit matin, il en oublierait presque la dangerosité des lieux. Cet endroit si paisible qui renferme des destins si tragiques et ici, les gens n'ont pas peur de se salir les mains.

Une fine brise traverse sa chemise ouverte le faisant frissonner. Il se retourne et observe le lever du soleil tout en prenant une grande inspiration. Si paisible, pense-t-il. Seokjin a maintenant l'esprit tranquille. 

Après quelques minutes, il arrive en face de son immeuble quelque peu sali par le temps et il aperçoit une masse sombre avachie sur un banc. Le visage caché sous sa capuche, cet adolescent se tord sur lui-même, il a l'air exténué. Ce ne doit pas être un clochard vu la propreté de ses vêtements, peut-être un adolescent en fugue ? Seokjin s'approche alors de lui, inquiet -surtout intrigué- par cette masse noire. Il remue son corps frêle et en sentant une main se poser sur son épaule, il relève la tête.

C'est un fin voile de lumière que découvre Yoongi. Devant lui, l'immense des dunes et toute la beauté du matin. Des tons dorés s'offrent à lui et en un clin d'oeil, un océan de couleurs lui explosent au visage. Sans même connaitre la provenance de ce bruit, un fin murmure arrive à ses oreilles, comme une caresse. Une voix retentit dans son esprit, celle de sa mère.

Rapidement, il regarde dans tous les sens autour de lui avant de s'apercevoir qu'il est manifestement seul. Il commence alors à courir mais ce paysage sans faille qui ne peut le mener qu'à un point de non retour. Il s'arrête et sa respiration bruyante le pousse à fermer les yeux. Un geste répétitif, presque rassurant, apparait alors au bout de ses doigts. Un fin toucher s'éprend de lui mais Yoongi daigne bouger. Il refuse de faire peur à cette voix maintenant si proche de lui. Toujours les yeux clos, il tend ses mains vers l'avant, sentant un souffle léger devant lui, et dans un geste peu sûr, du bout de ses doigts, il ressent une légère pression. C'est en face de ses yeux qu'apparait un homme. Le teint terne, la bouche souriante, il fixe Yoongi. La voix féminine a cessé au moment même où il a touché l'homme. Ce visage si familier, pourtant si inconnu. Son père.

loneliness [myg;pjm]Where stories live. Discover now