Prologue

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23 Décembre 2010 – Caen

Enfoui au fond de mon lit, la nuit étant tombée depuis bien longtemps, je cherchais depuis déjà quelques longues minutes le sommeil. Mais je n'y arrivais pas, mon regard fixé sur le plafond de ma chambre encore enfantine de chez mes parent, mes pensées n'étaient que pour une seule personne depuis plus de 3 mois déjà.
Mon meilleur ami, Aurélien. Ou devrais-je plutôt dire Orelsan maintenant. Il me manquait tellement, et pourtant, je fis mine depuis son départ, que toute cette situation ne m'atteignait pas, que j'en avais strictement « rien à foutre ». En vérité, les derniers événements me brisaient littéralement le cœur. Et tous les soirs, le rituel était le même : enroulée sous la couette, les yeux embués par des larmes que je retenais, le souffle coupé et la boule au ventre que provoqué mon énorme tristesse.

Et ce soir encore, je repensais à tous ces bons moments que l'on avait partagés, lui, Gringe et moi. Nous étions le trio inséparable de Caen. Tout avait tellement changé depuis la sortie de son album, tout était tellement différent. Je dois dire que je suis presque jalouse de la musique, celle qui a été la cause de l'éloignement d'Aurel et moi.
Je suis pourtant si fière du succès de cet album « Perdu d'avance ». J'ai été là à chaque écriture de chaque texte, et à chacun des enregistrements. Toutes ses pensées me font perdre la tête.
Les yeux de plus en plus lourds, ma vision de plus en plus floue, la tristesse et la fatigue se faisaient excessivement ressentir.


Assise au fond du canapé entre mes deux acolytes, une journée comme les autres, pleine de rire et de bouteille de bière. Je ne voudrais être nulle part ailleurs qu'ici.
Nous fêtions de la meilleure manière qu'il soit le succès d'Aurel et de son album, soit en se marrant à des blagues ridicules, enchainant les cigarettes et à trois, seulement nous trois, comme à l'époque où le monde ne tournait qu'autour de notre trio. Je me chamaillais avec Gringe pour savoir qu'elle serait le titre le plus écouté de se nouveau projet, tout fraichement dans les bacs. Aurélien, devenait de moins en moins euphorique au fur et à mesure de la journée. Son sourire s'estompait peu à peu, au fil des heures et de la conversation.

- Tu comptes nous dire ce qui te tracasse ? Ou tu préfères faire ta grande dépression de fin de soirée comme à chaque fois avant de parler ? Lui dit Gringe avec une voix sarcastique et moqueuse.
- Non, il faut que je vous parle honnêtement, sérieusement !

Il finit par lever son cul du canapé, se tenant face à nous la tête baissée. Mon cœur commençait à s'accélérer. Le comportement d'Aurel n'annonçait rien de bon.

- Ecoutez, j'ai dû prendre une décision importante. J'y ais réfléchi très longtemps sans jamais vous en parler, et elle a été prise depuis un bon moment aussi. Mais je n'arrivais pas à vous le dire, j'ai retardé ce moment le plus de temps possible. Mais aujourd'hui je n'ai plus le choix ni le temps. Déjà je voulais que vous sachiez encore une fois que je vous aime les gars.
- Abrège Aurel s'il te plait ! Soufflais-je
- Je vais aller vivre à Paris, je pars demain.

Je restai sous le choque. Paris ? Pourquoi Paris ? Pourquoi maintenant ? Non, je ne suis pas d'accord non. Pas maintenant, pas déjà. J'avouerais avoir pensé à la probabilité qu'ils doivent un jour partir vivre sur la capitale pour ses projets professionnels, mais je ne pensais pas si tôt.
Cela faisait déjà bien une minute que le salon était passé d'une ambiance de folie à un froid glacial. Je cherchais le regard de Gringe, et quand je réussi à trouver celui-ci, je le vis s'accompagner d'un large sourire. Guillaume décide de briser se silence insoutenable en allant prendre son pote dans les bras.

- Tu vas me manquer mec, mais on se verra, je viendrais souvent ! Et ça veut dire que ta carrière va s'accélérer maintenant, je suis tellement fier de toi ! Cria Gringe surexcité dans les bras de son copain

Et moi, je restai assise là, encore choquée de ce que je venais d'apprendre. Regardant fixement mes amis se prendre dans les bras. Mes larmes montaient, ma vison devenait floutée et embuée, la gorge serrée. Aurel me regarda dans les yeux quelques secondes, je le fixais, une, deux, trois secondes, et la première larme se déposa sur ma joue. Gringe nous fit signe qu'il nous laissait quelques minutes pour que l'on puisque discuter pendant que mes larmes s'enchainaient, doucement, les unes après les autres.
Aurélien accroupit devant moi, attrapa mon menton entre ses doigts et releva ma tête. Mes yeux plongés dans les siens, mes larmes déferlées de plus en plus vite, accélérant ma respiration, l'envie de m'écrouler, de fondre en sanglot ne quittait pas mon esprit. Mais il fallait que je sois forte pour lui. Il essuya du bout des doigts mes larmes après de longues minutes de silence, me regardant toujours au plus profond des yeux.

- Pourquoi tu pleures ? Je ne pars pas à l'autre bout du globe Cheryl.
- Non. Mais c'est déjà beaucoup trop loin de moi, beaucoup trop loin de nous... soufflais-je entre deux sanglots
- Tu sais, c'est beaucoup plus simple pour tout le monde. Il faut que je bosse sur mon prochain album, et pour ça j'ai besoin de Skread et Ablaye, qui eux sont à Paris. Je serais mieux sur place plutôt que de faire des allés-retours plusieurs fois par semaine. C'est pour le boulot Cheryl. Mais ce n'est pas pour ça que je vais vous oublier, loin de là, je vous aime trop pour ça. On se verra toujours, on trouvera des moyens pour ça. Et puis tu n'es pas seul, Gringe est là, avec toi. Me dit-il avec la voix la plus douce et rassurante qu'il soit.

Malgré ses explications que je connaissais déjà sans même qu'il en parle, je sentais ma gorge se serrer encore plus, petit à petit, de plus en plus, l'impression d'étouffer. Ca y'est, je sentais le moment arriver, ce moment où j'allais craquer. Je me laissai tomber en avant, ma tête enfouie dans le cou d'Aurel, éclatant en sanglot.

- Tu vas tellement me manquer Aurel, ça ne sera plus pareil sans toi, personne ne me connait par cœur comme tu me connais, personne n'est aussi proche de moi que toi tu l'es. Personne ne me comprend comme tu me comprends, personne n'est là pour moi comme tu es là pour moi. Personne ne me console aussi bien que toi. Personne ne m'aide comme tu m'aides. Personne n'arrive à me faire rire alors que je suis dans la pire des colères appart toi, tu es le seul capable de me faire passer des larmes aux rires en une fraction de seconde. Personne ne peut être aussi complice que nous le sommes. Personne ne m'aime comme tu m'aimes, personne ne t'aime comme je t'aime.

Après cette tirade déclarant tout l'amour que je porte à mon meilleur ami, Aurel relâcha son étreinte et releva ma tête du bout de ses doigts, plongeant une nouvelle fois son regard dans le mien. Je le fixais, de mes yeux pleins de larmes et les joues trempées. Il caressa l'une de mes joues du dos de sa main, ses yeux se remplissaient de larmes peu à peu, et lorsque la première larme glissa le long de sa joue, il m'attrapa le visage de ses deux mains et déposa un baiser surprise sur mes lèvres. Il retira sa bouche de la mienne, me regarda quelques secondes, et cette fois-ci c'est moi qui décide de recommencer cette expérience délicieuse en collant mes lèvres aux siennes. Baiser qu'il prolongea de longues minutes avant de s'assoir à côté de moi. Il me prit dans ses bras, je déposai ma tête au creux de son épaule, les yeux fermés, encore perturbée de tout ce qui vient de se produire.

- On s'appellera tous les jours, je reviendrais à Caen un week-end sur deux et toi quand tu auras des vacances tu viendras me rejoindre à Paris. On va y arriver Cheryl, j'y crois.


J'ouvris les yeux, et d'un sursaut je me retrouvai assise sur mon lit, dans la chambre encore enfantine chez mes parent. Je venais en effet, dans mon rêve, de revoir cette dernière journée avec Aurel, il y a un peu plus de trois mois. J'étais vraiment perturbée de revoir tout ça, en quelque sorte, de revivre tout ça. Mais surtout de réentendre, à travers un rêve, les belles paroles d'Aurélien.
Oui, ça faisait un peu plus de trois mois que je n'avais plus aucunes nouvelles de lui, pas un appel, pas un seul message, rien du tout. La colère montait en moi rien que d'y penser. J'avais essayé de l'appeler, de lui écrire, sans jamais aucunes réponses. Je n'aurais jamais deviné qu'il puisse me faire ça un jour.
Et c'est cette nuit là, à 4h26 du matin, après un rêve que j'eu enfin ce putain de déclic, oublier « Orelsan », tout était fini, terminé. LA FÊTE EST FINIE.

La fête est finieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant