2ème ECHO : Signes

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Hims s'éveilla, de fins rais de lumière éclairant son visage en cet instant encore matinal. Le jeune homme souleva ses paupières, ouvrit ses yeux marron foncé, et observa l'extérieur. La neige couvrait encore les larges étendues de l'horizon, ainsi que les troncs rabougris qui attendaient avec hâte le printemps, pour enfin retrouver leur verdure et offrir des couleurs chatoyantes à la forêt.

Hims prit conscience qu'il se trouvait à l'extérieur de la tente où leur équipée avait dormi. Il se souvint alors des marmonnements involontaires de Vlan durant la nuit, qui l'avaient poussé à achever sa nuit sous un ciel sans étoiles. Ce fut certes un sommeil dans le froid, mais dans un silence peu troublé. Depuis son départ de Evrettun, Hims avait oublié les nuitées passées en groupe, étant désormais habitué à dormir en solitaire.

Le jeune homme distingua, à travers la brume encore fraîche, la tente érigée sur ses piquets, où étaient encore allongés Vlan et le cocher - dont Hims avait égaré le nom.

Son regard se détourna de la tente,pour scruter l'horizon immaculé de blanc. Il perçut alors, au pied d'un arbuste, de petites pousses vertes tout juste épanouies, qui contrastaient à merveille avec la blancheur de la saison froide. En observant cette scène, Hims ne put s'empêcher de songer à sa relation avec son frère. Après tout, peut-être traversaient-ils un hiver trouble et glacial, long de plusieurs années, pour ensuite retrouver le lien qui les unissait auparavant, qui réapparaitrait sous la forme de petites pousses vertes, tel un espoir pour un avenir prometteur. 

Ceci dit, malgré tout l'espoir que Hims tenta de rassembla, cela lui parut peu vraisemblable que Vlan et lui se réconcilient un jour ; il n'espérait même pas qu'ils puissent se pardonner.

Hims détourna le regard de ces premiers signes printaniers, puis se dirigea à petits pas vers la tente, d'où provenaient des sons de couverture froissée. Le jeune homme comprit que quelqu'un émergeait de sa torpeur.

La silhouette imposante qui sortit de la tente fit rapidement comprendre à Hims que ce n'était autre que son frère qui venait de s'éveiller. Ce dernier riva ses yeux sombres sur les alentours neigeux et givrés, avant de les darder sur Hims. Puis il baissa son regard en direction de la forêt environnante, et vaqua à ses ablutions matinales.

Bien que le charretier n'ait pas encore ouvert les paupières, Hims débuta la préparation du petit-déjeuner, souhaitant grappiller du temps : il estimait que plus la durée de ce voyage serait courte, mieux cela vaudrait !

Vlan avait mis fin à sa brève toilette, mais ne semblait pas enclin à aider son frère. Hims n'en avait cure, puisqu'il était habitué à de lourdes charges aux Champs Fleuris ; en outre, il se méfiait grandement des capacités culinaires de Vlan.

Alors que Hims achevait la collation matinale, il put ouïr des pas progresser dans la fine couche de neige. Il se retourna en distingua la fine stature du charretier, largement plus proche de sa morphologie que de celle de Vlan.

L'homme se frotta brièvement les yeux, encore empli de sommeil, les salua :

- Bonjour !

Puis ajouta :

- Eh bien, vous êtes matinaux, tous les deux ! C'est de famille ?

L'homme dut prendre conscience de son erreur, puisqu'un léger tressaillement émana du côté de Hims, et un grommellement s'éleva de la gorge de Vlan. Toutefois, Hims savait le charretier aimable et aucunement coupable ; aussi, il lui répondit chaleureusement, en réprimant tout le dégoût qu'il éprouvait à l'encontre de Vlan :

- Peut-être bien, nos parents étaient tous deux boulangers. Nous entendions les bruits des fourneaux durant la nuit.

L'homme hocha la tête d'un air rassuré, mais ne poussa pas la discussion plus loin, conscient de la tension que pouvait engendrer ce sujet de conversation avec les deux frères.



***



Une fois dûment restaurés, les trois hommes poursuivirent leur progression au sein de la futaie silencieuse. De rares oiseaux firent entendre leur mélodie, et ils purent percevoir, au milieu de ces abysses blancs, un cerf discret, dont le passage furtif amena un bref éclat de vie au sein de ce silence.

Les marcheurs avancèrent ainsi jusqu'à que les premières lueurs de la nuit apparaissent. Ils se déplacèrent alors hors du sentier et avancèrent le long de la combe pentue, quêtant, pour l'installation de leur tente, un lieu où le sol se révélerait plat.

Les hommes se mouvèrent entre les arbres dépourvus de feuilles et la terre dénuée de végétation, pour atteindre une clairière découverte et entièrement enneigée. Seules quelques roches éparses étaient visibles à l'horizon, et les étoiles du firmament semblaient être les reflets des flocons de neige descendant du ciel nocturne.

Descendant du ciel ? remarqua intérieurement et  avec ahurissement Hims. Comment les flocons de cette large vallée pouvaient-ils tomber, alors que, lors de leur marche sur le chemin, le ciel était dépourvu des particules blanches ?

Le jeune homme songeait ainsi lorsqu'il ressentit une légère électrisation le long de son corps. Surpris, il se retourna, en quête de l'élément ayant pu provoquer un tel phénomène, mais seuls Vlan et le cocher étaient présents dans son champ de vision, la charrette laissée à l'écart dans la futaie. Sur ses gardes, Hims évolua avec précaution au sein de la vallée ; néanmoins, aucune autre étrangeté ne se manifesta. 

Les trois voyageurs disposèrent leur campement, puis Hims prépara leur dîner avec la denrée qu'ils avaient emportée de Ankeliev.

Une fois le repas fin prêt, ils s'installèrent autour du feu, puis entamèrent leur assiette. Le charretier brisa le silence :

- Ne trouvez-vous pas étrange que les flocons tombent du ciel dans cette vallée, alors qu'il n'y en avait aucun sur le sentier ?

Hims acquiesça de la tête, à la fois soulagé et inquiet que le cocher ait également perçu ce changement ; Vlan, pour sa part, répliqua froidement :

- Ils se sont certainement mis à tomber lorsque nous étions sur la pente ; les branchages ont bien pu nous cacher le ciel.

Il ponctua son intervention d'un signe de tête de mépris, paraissant considérer l'hypothèse du charretier comme peu logique. Le ventre de Hims se comprima d'une profonde rage à ces mots, et c'était tout juste s'il ne voulait pas arracher la tête de son frère, tant sa conduite l'insupportait.

- A ta place, je n'aurais pas un avis aussi tranché, le changement a été trop brutal entre les deux lieux, affirma Hims. Puis, hésitant : Et... j'ai également ressenti... Une... étrange électrisation lors de mon entrée dans cette vallée.

Les deux autres levèrent subitement la tête vers lui, les yeux comblés d'étonnement :

-Moi aussi, répondit le cocher.

-Pareil, confirma Vlan.

A cet instant, un frisson naquit dans le dos de Hims, et remonta le long de son échine. Suite à cela, une certitude prit naissance dans son esprit : les flocons tombaient uniquement dans cette vallée, qui paraissait coupée du monde extérieur comme le symbolisait l'électrisation que tous avaient ressentie.

Le jeune homme s'éloigna du campement afin de repérer la pente qu'ils avaient parcouru pour se rendre dans la vallée, afin de vérifier s'il neigeait de l'autre côté. Ce fut alors que le frisson qui avait parcouru le dos de Hims il y avait quelques instants se mua en tremblements de frayeur saccadés. 

A sa grande horreur, la forêt et le sentier d'où ils étaient venus avaient disparu.





***


Désolé pour le retard, j'étais en vacances, mais dès maintenant je vais reprendre mon rythme habituel au niveau de l'histoire.

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⏰ Dernière mise à jour : Sep 04, 2018 ⏰

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