L'Ancestrale {COLLECTION LES ANCESTRAUX}

CHAPITRE I - une rentrée bouleversante

Une semaine s'était écoulée depuis que Sofia et ses parents avaient emménagé dans l'arrière-pays niçois. Les événements s'étaient enchaînés rapidement. Le logement était déjà meublé, ne laissant plus qu'à installer leurs effets personnels. La maison était spacieuse, dotée d'un grand jardin avec une piscine en contrebas, d'un salon avec une cuisine ouverte, de deux salles de bains dont une attenante à la chambre des parents de Sofia, ainsi que de trois autres chambres.
Aujourd'hui marquait la rentrée des classes tant redoutée pour Sofia. Pas d'amis en vue, juste l'appréhension de se retrouver dans une classe de 4ème où les groupes étaient probablement déjà formés. Elle connaissait à peine deux jumeaux de son âge, prénommés Olivia et Gaëtan. Peu importe d'être seule. Je partirai bientôt, comme d'habitude, se résigna-t-elle en pénétrant dans l'établissement. Assise sur un banc, elle observa la cour avec peu d'enthousiasme. Elle était vaste, agrémentée de quelques arbustes. En face des salles de classe, un terrain de basket et de football s'étendait, accompagné d'un long corridor en plein air pour les exercices d'athlétisme. Peu à peu, le monde s'agglutinait. Sofia attendait la sonnerie avec impatience. Elle n'osait pas aller vers les autres, de peur d'être apprivoisé, car l'on risque de pleurer un peu si l'on s'est laissé apprivoiser... Elle se mit à lire Le Petit Prince par Antoine de Saint-Exupéry. Le Petit Prince était le livre qui l'avait bercé toute son enfance, voire toute sa vie. Quand elle se retrouvait seule, il était là pour la réconforter. Une fois, en sixième, elle était en train de relire le roman et une fille de son âge s'est approchée. Elle se pencha pour y découvrir la page de couverture et y lut le titre. Elle lui demanda :

- S'il te plaît, dessine-moi un mouton !

Sofia releva la tête, réalisant qu'on lui avait parlé.

- Pardon ? Qu'as-tu dit ? Excuse-moi, je ne t'ai pas écouté...
- S'il te plaît, dessine-moi un mouton, répéta-t-elle !

Sofia sourit à ces mots. Elle mit son marque-page, referma son bouquin, puis chercha un bout de papier et un crayon dans son sac. Une fois trouvés, elle s'appuya sur l'œuvre et dessina une boîte.

- Le mouton que tu veux est à l'intérieur.
- Il est parfait. C'est exactement comme ça que je l'imaginais.

Les deux filles se mirent à rire. Au fil des jours, elles passèrent de plus en plus de temps ensemble. Sofia s'était faite sa première vraie meilleure amie, prénommée Annabelle. Mais au moment de repartir, seulement six mois plus tard, elles étaient apprivoisées et l'on risque de pleurer un peu si l'on s'est laissé apprivoiser...
La sonnerie la sortit de ses songes. Elle se dirigea vers le mouvement de foule. Les élèves s'étaient tous réunis devant l'entrée du hall, là où la cour se rétrécissait légèrement. Sofia ne savait pas vraiment à quoi s'attendre. Une classe entière fut appelée, puis une autre et encore une. La quatrième fut la bonne. Se retrouver dans la même classe qu'Olivia et Gaëtan la rassurait étrangement. Elle aurait bien aimé aller leur parler, mais la peur de se faire à nouveau apprivoiser était beaucoup trop présente. La jeune fille s'assit, seule, au fond de la salle. Le professeur fit l'appel. Lorsqu'il prononça le nom de Sofia Alvárez, les trente autres élèves se retournèrent vers celle-ci. Personne ne l'avait jamais vu, mis à part les jumeaux. Deux heures de longues paperasses administratives plus tard, la récréation vint. Les deux blonds allèrent voir leur ancienne amie :

- Salut Sofia ! Ça fait un bail !
- Salut ! Oui, ça fait longtemps. Comment allez-vous ? Répondit-elle assez tendu, les mains dans les poches.
- Bah écoute... Tutti va bene !

Quelques gouttes de sueur coulaient sur le front de Gaëtan. La brunette observa son comportement et son apparence. Un teint beaucoup trop pâle pour une saison aussi chaude, à la limite d'être malade, une respiration saccadée, son regard penché vers sa nuque... Il avait vraiment l'air ailleurs.