Chapitre 1 : 2762

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       Cachée dans une vieille cabane en bois abandonnée, Annabeth attendait que sa proie tombe dans son piège. Elle avait placé des graines dont celle-ci raffolait, et qui se faisaient rares. Quand elle entendit l'animal s'approcher, elle se décala pour être en face de la fenêtre dépourvue de carreau, encocha une flèche sur la corde de son arc, le banda, visa sa cible et tira. La flèche fila entre les flocons et atteignit la bête au dos. Elle s'approcha de celle-ci qui agonisait sur le sol recouvert de neige, au pied d'une maison délabrée qui appartenait à un ancien village, et l'acheva avec son couteau. C'était une bréscaille, un animal de la taille d'un lapin avec une grosse fourrure noire pour se protéger du froid et des petites griffes pour creuser dans le sol et trouver de quoi manger. C'était assez rare d'en trouver mais c'était nourrissant. Elle ramassa le cadavre et siffla en mettant ses doigts dans sa bouche. Un grand loup surgit alors, un cadavre de cerf dans sa mâchoire. Les crocs plantés dans la chair supportaient le poids de l'animal. C'était un ancien loup sauvage qu'elle avait recueilli étant petit. Elle avait retrouvé sa mère à ses côtés, morte, une balle de fusil dans la tête. Alors elle l'avait adopté et l'avait nommé Akiro. Puis elle l'avait élevé, nourri et vu grandir. À l'âge adulte, elle lui avait laissé le choix de repartir dans la nature. Annabeth lui avait appris à chasser et à survivre dans son environnement naturel, mais il préférait rester avec sa maîtresse. Désormais, il l'aidait à chasser et lui servait de monture (car en évoluant, les loups devinrent plus gros, de la taille d'un petit cheval à l'âge adulte). Annabeth s'approcha de la bête colossale et la caressa au sommet de la tête, passant ses doigts dans ses grands poils blancs.

-Belle capture, lui adressa-t-elle tendrement.

Il répondit simplement d'un léger grognement affectif, en posant sa tête sur son épaule. Ensemble, ils marchèrent dans la neige en direction du groupe de chasseurs. Annabeth avait l'habitude de venir aux alentours avec sa mère et tous les volontaires du camp pour chasser. Pour son âge, elle était très douée à l'arc et au fusil, et savait se défendre. Cependant, même si son village avait des armes, les villageois préféraient utiliser des arcs pour pouvoir conserver les balles, qui se faisaient rares. Elle contemplait le triste décor qui l'entourait. Les maisons étaient réduites à l'état de débris. Des éclats de verre jonchaient le sol et un silence de mort pesait sur toutes ces ruines. Puis, intriguée, Annabeth remarqua quelque chose sur la neige aux côtés d'une vieille cabane. Soudain, elle écarquilla les yeux de terreur, monta sur Akiro et partit en direction du groupe au grand galop, effrayée. Quand elle arriva dans le groupe, elle mit pied à terre et déposa la dépouille au pied de sa mère :

- Bravo, Annabeth ! S'exclama cette dernière. Dépose-le dans la carriole. Ton père va être content !

- Maman, j'ai trouvé des grandes traces de pattes pas loin de l'ancien village. Mais ce ne sont pas des traces de cerf ni d'autre espèce vivant aux alentours, répliqua-t-elle, inquiète.

-Édouard n'est toujours pas revenu. Mais la nuit va bientôt tomber et une tempête ne va pas tarder. Qu'est-ce qu'on fait ? s'adressa un membre du groupe à la mère d'Annabeth.

Au moment de finir sa phrase, les villageois entendirent un cri, puis distinguèrent une personne au loin courir vers eux. Mais le brouillard était trop intense pour distinguer les moindres traits de l'inconnu. Soudain, il hurla :

-Ils sont là ! Les mordeurs ! Courez !

Annabeth reconnu sa voix. C'était Édouard. Sa voix reflétait une grande peur qui le faisait courir à une allure ahurissante, galvanisé par l'effroi qu'il éprouvait. Car d'après ce qu'il avait crié, des mordeurs le poursuivaient. Mais à peine sa phrase terminée, il fut tiré en arrière et disparut dans la brume en criant un bref moment. Des gerbes de sang en ressortirent et tachèrent le sol blanc de neige. Les villageois n'avaient pas eu besoin de voir ce qu'il s'était passé dans le brouillard pour comprendre qu'Édouard s'était fait engloutir par les mordeurs. Annabeth se figea de frayeur devant la scène à laquelle elle venait d'assister. Malgré la panique générale, elle demeura incapable d'agir. Ses yeux écarquillés restèrent fixés sur l'endroit où Édouard avait trouvé la mort. Sa mère la secoua en lui disant :

-Annabeth ! Prend tes affaires, on s'en va !

Les gens du groupe prirent leurs montures et s'en allèrent ventre à terre. Annabeth prit son fusil, visa maladroitement et tira sur une accumulation de glace et de stalactites qui dominait le toit d'un clocher. L'ensemble de glace et de neige s'ecrasa contre le sol, créant un petit barrage pour bloquer les monstres. Elle regarda derrière elle un dernier moment, elle n'arrivait pas à se faire à l'idée qu'elle n'allait plus jamais revoir Édouard. Il était adulte, contrairement à Annabeth qui n'avait que quinze ans. Mais cela ne les avait pas empêché pas d'être de bons amis. Une larme de tristesse et de rage coula sur sa joue. Les cris stridents des prédateurs qui faisaient frissonner de peur retentissaient de plus belle. Une grande menace que les humains ne pouvaient combattre. 

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Les chasseurs rentrèrent de leur expédition, le moral au plus bas. Ils arrivèrent devant l'entrée du bunker. C'était un grand bloc d'acier dissimulé en gros rocher. À l'intérieur se trouvait une allée souterraine qui permettait de traverser en-dessous du banc de grandes roches qui demeurait en face de l'entrée, dont le passage s'avérait difficile avec le verglas et l'immensité des pierres. La taille impressionnante des roches permettait de cacher et de protéger le lieu où résidait d'Annabeth. Le groupe traversa alors le passage et avança de nombreuses minutes dans le couloir de pierre qui les menait à leur village. Seules des torches accrochées aux murs éclairaient l'allée. À chaque pas, la chaleur devenait plus intense. Annabeth était au fond du gouffre. Des pensées noires hantaient son esprit et n'ayant rien pu faire face à la mort de son ami, des remords la rongeaient. Elle n'arrivait pas à croire qu'elle n'allait plus jamais le revoir et ne savait pas comment annoncer la triste nouvelle à son père. Ils aperçurent l'entrée de leurs habitats et l'intérieur du lieu se dévoila : le plafond d'acier pourvu de petites fenêtres en verre renforcé avec un double vitrages dominait à une trentaine de mètres du sol. Des dizaines de petites maisons en bois regroupées étaient placées aux côtés du bunker. Au centre se trouvait l'hospice du village, ainsi que la caserne, une échoppe où travaillait le tailleur et une grande tour en bois qui sortait du bunker. Celle-ci avait pour but de fuir rapidement en cas d'attaque ou d'invasion à l'aide d'une longue corde placée au sommet qui servait de tyrolienne, qui passait au dessus des roches et qui était inaccessible depuis l'extérieur. Les loups, servant de monture et dotés d'une agilité incroyable, pouvaient passer par le les rochers. Quand les chasseurs rentrèrent, les villageois les accueillirent chaleureusement.

- Les chasseurs sont rentrés ! Cria un homme.

- Alors, qu'est ce qu'ils ont ramené cette fois ? Se demande un autre.

Ils étaient heureux car ils ne savaient pas ce qu'il s'était passé durant leur périple. Mais, incapable de leur répondre, les chasseurs gardèrent le silence. Annabeth sentit sa manche être tirée et regarda au pied de sa monture. Une petite fille emmitouflée dans un gros manteau de fourrure se tenait à ses pieds et la regardait de ses petits yeux bleu azure. Une tresse de cheveux blonds dépassait de sa capuche et longeait son épaule.

-Madame, il est où mon frère ? Demanda cette dernière.

Annabeth savait qui était cette personne. C'était la petite sœur d'Édouard. Elle était bien trop petite pour comprendre que son frère n'était plus de ce monde et cette insouciance leur serrèrent la gorge. Annabeth était terrifiée et pétrifiée. Elle ne savait pas quoi dire, ni où se mettre. Pourquoi cela devait lui arriver ? Pourquoi à elle ? Les images de l'instant revinrent a son esprit aussi rapidement que ses larmes à ses yeux. Le moment où Édouard disparu soudainement dans la brume. Alors, elle éclata en sanglot. Son père arriva et la pris dans ses bras pour la ramener à sa maison. Les personnes ayant assisté à la scène eurent compris qu'il était arrivé malheur à Édouard.

Les Terres De GlaceWhere stories live. Discover now