Chapitre 2

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Ça fait maintenant deux semaines que je me prends des vents par Benjamin. Même si, au point où j'en suis, c'est plutôt des ouragans. Avec Em' et Alice, on s'est échangé nos numéros, et on est maintenant un groupe. J'ai oublié de préciser que quelques fois Benjamin me jette des rapides coups d'œil. C'est peut être à cause de mes cheveux. C'est vrai qu'on ne croise pas une fille comme moi tous les jours. Il me semble que je ne me suis pas décrite. Alors faisons simple : j'ai un nez tout ce qu'il y a de plus normal des fossettes, un teint plutôt pâle, des yeux qui tirent vers le turquoise, et de très longs cheveux blonds platine avec une mèche de la même couleur que mes yeux. Mais quand je dis très longs, c'est vraiment très longs. C'est-à-dire qu'ils m'arrivent à mi-cuisse. Je ressemble à une albinos, sauf que je le suis pas. Si vous me croisiez dans la rue, vous vous diriez sûrement que je suis bizarre. Tout ça pour dire que je suis tout, sauf banale. D'ailleurs, à cause de ça, j'ai souvent pris des remarques des gens de mon ancien lycée. En parlant de ça, ce n'est pas qu'à cause de mes cheveux que j'essuyais les remarques, mais aussi à cause de mon âge. Parce que ouais, je suis en Première, mais j'ai 16 ans. Comme vous l'aurez sûrement déjà deviné, en effet j'ai sauté une classe. La Cinquième pour être plus précise. Je suis comme qui dirait une «intello». Personnellement, je trouve que je suis dans la normalité scolaire. Je n'ai pas 18 de moyenne, mais je n'ai pas non plus le QI d'une huître handicapé en plein Sahara. Dans mon ancien lycée, et collège qui plus est, je n'avais aucun ami. Mais quand je dis aucun, c'est que vraiment personne ne voulait de moi. Ça tombe bien, moi non plus je pouvais pas les saquer mes blaireaux de «camarades». Ils me  détestaient, je les détestais. Intérêts communs. Sauf qu'un jour, un mardi, une personne est entrée dans ma vie. Et cette personne, c'était lui. Lui qui était nouveau. Lui qui ne connaissait personne. Lui qui voulait devenir ami avec moi. Lui qui, au bout d'à peine deux semaines, connaissait tout de moi. Lui qui avait les cheveux en bataille tous les jours, mais que je trouvais tellement doux. Lui qui avait des yeux en amandes, mais dans lesquels je pouvais me noyer. Lui qui était toujours souriant. Lui qui me faisait rire quand je pleurais. Lui qui était toujours à mes côtés quand ça n'allait pas. Lui qui venait, chaque matin, me retrouver sur un banc, dans la cour. Lui qui a fait chavirer mon cœur dès le premier jour. Lui qui s'appelait Roméo. Ça aurait été parfait si on m'avait appelé Juliette. Et oui, vous n'avez pas rêvé. J'ai bien dit qu'il s'appelait Roméo. Non, il n'est pas mort. Enfin j'espère pas. Il a juste... disparu. Comme ça, du jour au lendemain. Je me souviens encore de ce qu'il m'a dit ce jour-là.

Flasback

Comme chaque jour, j'attends Roméo. Soudain, je vois arriver mon beau brun. Il court.

-Ashley !, me dit-il, essoufflé.
-Mais Roméo, pourquoi t'as couru ?, demandai-je.
-Pas le temps de t'expliquer. Demain, je pars d'ici.
-Attends, tu veux dire que tu t'en vas ?
-Oui. Je quitte le pays. Je n'ai pas le temps de t'expliquer. Je...je suis venu pour te dire adieu.

Sans m'en rendre compte, mes larmes ont commencé à couler.

-Mais, tu p-peux pas m-me l-laisser, sanglotai-je. T-Tu m'as promis...

Il me prend dans ses bras. Mes pleurs mouillent son t-shirt.

-Je sais, me consola-t-il. Tu peux me croire, si ça ne tenait qu'à moi, je resterais. Malheureusement, je n'ai pas le choix.
-Mais t'as pas le droit !, m'exclamai-je. Tu peux pas me laisser seule ! J'ai besoin de toi !

Mes larmes coulent de plus belle.

-Je suis désolé, Ash, murmura-t-il dans mes cheveux. Moi non plus, je veux pas te quitter.
-Mais tu comprends pas !, m'énervai-je. J'ai besoin de toi ! Tu es toute ma vie ! Si tu pars, c'est toute mon âme qui s'en va avec toi ! Depuis le premier jour ! Roméo, je t'aime !

Une larme coule sur sa joue. Il essuie les miennes de son pouce et, avant que je dise quoi que ce soit, m'embrasse. Ce baiser est doux comme du coton.  Malheureusement, au bout de quelques secondes, il s'écarte de moi et repart du côté par lequel il est arrivé.

-Roméo !, criai-je, désespérée.

Il se met à courir. Mes genoux touchent le sol avec fracas, mais je m'en fou.

-Roméo !

Il tourne au coin de la rue, me laissant seule avec mes sanglots. Ce jour-là, il s'en est allé avec mon cœur brisé.

Fin du flashback

Encore aujourd'hui, ma plaie ne s'est toujours pas refermée. J'y pense sans cesse. Il était tout pour moi. Toute ma vie. Depuis, plus jamais je n'ai pleuré. Pas une seule fois. C'est comme une promesse à moi-même. Il y a 3 mois, mon grand-père est décédé. Lui et moi, on était très proche. Comme des complices. C'est lui qui m'a aidé à tirer un trait sur Roméo. Ou du moins, il a essayé. Il m'a poussé vers le haut quand on m'attirait vers le bas. Il était mon ange gardien. Grâce à lui, j'ai appris à royalement ignorer les réflexions. J'ai appris à me défendre et à me battre. C'était comme un moyen de m'évader. Je pensais à Roméo ? Ça valait 30 coups de poing dans le sac de frappe. Tous les jours, j'allais chez lui pour me défouler. Évidemment, quand j'ai appris la nouvelle, ça m'a énormément attristée. Mais je n'ai pas versé une seule larme. À son enterrement, ma famille me prenait pour une insensible. Ils disait que je «n'avais pas de sentiments» et que je ne «méritais pas de faire partie de la famille». Qu'ils pensent ce qu'ils veulent, ça ne me fait ni chaud ni froid. Parce que depuis que les deux seules personnes qui comptaient pour moi sont parties, je suis devenue une coquille vide.

Noir À Vif (ou Ashley et les clichés)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant