En ce 31 octobre, il n'y avait, étrangement, personne dans les rues. Pourtant, à Jack's Hollow, il y avait bien souvent des enfants qui chahutaient là. Surtout à cette date !
De coutume, ils animaient les allées monotones, armés du célèbre « Des bonbons où un sort ! » adressés aux habitants des maisons cossues qui s'alignaient. D'accoutrements grotesques tout en couleurs et censés faire peur, ces enfants brisaient les silences des nuits enneigées de la petite ville.
Ce soir pourtant, rien, personne. L'année dernière encore on courrait dans les rues, les grosses maisons brillaient de couleurs d'automne. La forêt au bout de la rue rendait le tout poétique, et les jeunes du coin en profitaient pour faire les idiots et grappiller quelques verres d'eau-de-vie.
Là, la forêt était presque glauque, donnait une impression d'étouffement. Un lampadaire manquait à l'appel, les maisons semblaient comme en deuil. Par dessus tout, la lune, seule, ne parvenait pas, au secours de sa lumière blafarde, à éclairer les allées.
Cette rue autrefois repaire à bonbons était devenue terne et morne, vide de toute présence humaine. Peut-être était-ce en lien avec cet étrange sentiment qui rôdait, sournois et vicieux.
Un étrange sentiment, qui portait avec lui une sensation d'horreur, comme si l'esprit d'Halloween s'était réveillé ce soir-là pour déverser la panique et faire vivre à tous ce qu'était censé représenter cette fête : la peur.
Peut-être que l'absence de vie dans les rues était dûe à la neige qui tombait doucement, au calme des flocons qui tourbillonnaient dans une danse élégante. Seulement ce devait être une faible explication, d'ordinaire cela n'avait jamais découragé les gamins...
Quoi que fût la raison de cette absence, l'homme s'en fichait bien. Vêtu d'un imper sombre, il avançait de maison en maison, et ce vide l'arrangerait dans les minutes à venir.
Il n'avait pas besoin de public. Pas besoin de lampadaire, pas besoin de belles maisons éclairées, de bonbons, de costumes et de fausses araignées en plastiques.
Le bruit de ses pas était absorbé par la couverture blanche de la neige. Dissimulé sous son chapeau, le nez dans son écharpe, il avançait d'un pas décidé vers la demeure qu'il cherchait. Enfin, il arriva à destination.
Une grosse maison couverte de son manteau blanc, c'était ça, le numéro 13. Numéro assez ironique vu la date du jour. La date, et les événements à suivre d'ailleurs... Le petit village de Jack's Hollow tout entier s'en souviendrait.
Dans cette maison cossue, n'habitait qu'une riche. Veuve depuis un certain temps, la pauvre femme avait perdu sa petite-fille, unique famille, un an plus tôt et vivait seule depuis. Seule et fortunée ! Une personne facile : rongée par la tristesse, elle vivait dévorée de solitude. Vieille. Comment pourrait-elle lui poser problème ?
Si l'homme venait ici, c'était uniquement pour la richesse de cette Lady. Et si cette fois, il voulait pêcher un si gros poisson, c'était parce qu'il voulait faire un joli coup. De quoi s'offrir à lui-même pour son anniversaire à venir, quelques richesses, de quoi bien vivre quelques années : il avait bien calculé son coup, il savait ou étaient les coffres, il connaissait les codes pour accéder aux objets tant convoités.
Son anniversaire était deux jours plus tard, le 2 novembre, fête des morts. Ainsi, pour ce jour funeste d'une année impaire, il allait accomplir son crime et se délecter ensuite de la recette faite par ce vol. Il ne faudrait pas longtemps pour revendre les beaux bijoux. Et personne ne croirait la vieille sénile, pensant qu'elle les avait égarés.
Un verre de champagne à la main, riant avec son meilleur ami d'enfance qu'était son complice dans leur entreprise de crimes, c'était ce qu'il voyait de l'avenir. Oui, tout irait bien.
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One Shots
Short StoryCeci est un recueil de nouvelles très courtes, traitant de tous sujets : des fanfictions, une histoire sur la seconde guerre mondiale ou encore la lettre d'un enfant de CE2... Ou tout à la fois ! Tant que l'inspiration est là, je publierais ces pet...