Chapitre 5 Rose

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"Comment as-tu fait pour l'endormir ? Jean-François me sonde, son regard se fixe sur moi. Il est arrivé il y a quelques minutes. Je lui réponds naturellement.

- Piqûre de morphine.

En attendant que mon cher ami menotte mon adorable plombier, j'attrape une belle pomme jaune sur le buffet. Quand je croque dedans, le jus chargé de vitamine me fait un bien fou. Le goût sucré et la fraîcheur me coule le long de l'œsophage. Mon corps, bien éveillé maintenant, se réanime doucement.

Marcel, lui, ne s'est toujours pas réveillé. Il est étalé au sol comme une larve, les mains liées par des menottes de fer gris. Marcel...Jean François m'a expliqué rapidement que son nom entier est Marcel Manny. Avec un nom pareil ça ne m'étonne qu'à moitié qu'il ait finit ainsi. Manny... des images du dessin animé de mon enfance apparaissent , « Manny et ses outils »... la tête du plombier remplace celle du personnage enfantin. Je me rappelle toujours du générique entraînant et des personnages qui nous apprenaient l'espagnol.

-Comment ça une piqûre de morphine ? Mon policer lève la tête avec un temps de réaction relativement long.

-Chacun son métier, chacun sa vie. Je fais mon boulot et toi le tiens. Rétorquais-je pour me défendre."

Son regard vert m'évalue de nouveau avant qu'il ne hausse les épaules. Je jette le trognon restant de ma succulente pomme.

Jean-François ne peut rien faire contre moi.

Sans moi, c'est lui qui n'a plus de boulot. Je lui déniche souvent les plus grosses affaires une fois par mois, en l'occurrence ici l'affaire a une corpulence assez dodue. Mes trouvailles lui permettent de vivre et moi d'avoir une rentrée d'argent assez conséquente. Jean-François a une femme et une petite fille, il a vraiment besoin de son boulot pour elles.

J'ai déjà vu sa fille, Alice, une fois. Il a voulu que je la garde la soirée de la Saint-Valentin pour qu'il puisse emmener son petit bout de femme dans un beau restaurant 3 étoiles. Je n'ai pas refusé, je n'ai jamais rien de prévu lors de la fête des amoureux.

Je me souviens encore des yeux pétillants de la jeune fille de 6 ans. La même forme en amende et le même vert profond que son père. Elle me posait des tonnes de question de façon naïve, sans aucun filtre. Je répondais à chacune d'entre elles, patiemment. Alice ne me jugeait pas, elle souriait et était toujours satisfaite, j'aurais aimé respirer le bonheur et les rêves comme elle lors de mon enfance.

Ne pas avoir peur du regard des autres.

Le soir, elle s'est endormie dans mon lit et moi sur le canapé du salon, satisfaite de notre soirée autour d'un plat de nouille sauté. Vers 2h du matin, alors que je regardais un film pour essayer vainement de dormir, la voix enfantine avait retenti dans tout l'appartement. Je me suis précipitée dans la chambre. Elle était au bord du lit, j'ai allumé la lumière et vu les yeux noyés de larme d'Alice. Elle m'a expliqué qu'un monstre était caché sous le lit.

Je lui ai affirmé que non. Les monstres ne se cachent pas sous les lits, les monstres ils sont là, dehors, ils se cachent dans le cœur des gens.

J'ai regardé avec elle, pour lui prouver qu'il n'y avait rien, on a rampé sous le lit et on est restées là. Elle m'avait expliqué que le monstre avait dû lui aussi ramper pour sortir de la pièce lorsque que je suis arrivée. Mais les vrais monstres n'ont peur de rien, ils ne fuient pas. On est sorties de notre cachette et nous nous sommes allongées sur le lit.

Je me souviens encore de ces petits yeux qui scrutaient mon visage pour se plonger dans mes pupilles. « J'aime beaucoup tes yeux, on dirait que tu as la moitié de mes yeux, et la moitié de quelqu'un d'autre. Je voudrais les mêmes, tu es trop belle. »

Keep it magicalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant