Day 1 : Insomnia

41 7 4
                                    

Je ne dors plus . Je ne sais même plus depuis combien de temps je n'ai pas fermé l'oeil plus d'une ou deux heures . Je pense que c'est ces heures volées parfois en pleine journée dans mon bureau ou dans mon canapé qui me permettent de ne pas m'effondrer . Dans Fight Club , le docteur dit à Edward Norton qu'on ne peut pas mourir d'insomnie.. mais pourtant tenter l'expérience m'effraie grandement . Parfois les nerfs lâchent et je fond en larmes . L'autre jour c'est arrivé dans le rayon des chips au supermarché . Un enfant m'a vu et à rigolé . Il tenait des Dorito's et mastiquait bruyamment . Je pense pas que ça aurait été inquiétant si je ne m'était pas mis à éclater de rire aussi . Il à changé d'expression et il est parti en courant vers sa mère . Mes sentiments sont devenus les esclaves de ces heures de sommeil perdues .

La nuit est un autre monde lorsqu'on ne ferme pas les yeux . Je regarde des séries , des films , j'écris , j'écoute de la musique , et parfois je ne me souviens même pas de ce que j'ai fait . Je pourrais être un tueur en série . Je pourrais collectionner des os dans mon grenier sans même m'en rendre compte . Je ne sais pas ,je n'ai plus de réponses même aux questions les plus faciles.

Parfois j'essaie de dormir , mais mes pensées viennent se heurter dans mon cerveau en rythme avec le tic-tac du réveil . Je l'ai éteint mais je l'entend toujours . J'ai essayé tout les moyens médicaux et alimentaires pour mieux dormir . Mais on dirait que je ne veux pas dormir . Comme un enfant qui n'aurait pas sa peluche et qui ferait un caprice . Mais que représente cette peluche pour moi ?

Je suis sortit dehors une fois . Je marchais dans les rues éclairées d'une couleur orange ou jaune par ces lampadaires disposés de part et d'autres . Comment faisaient les insomniaques au 11ème siècle ? Marchaient t'ils dans la tourbe ? S'embourbaient t'ils dans une boue mêlée à de la bouse de vache ? Il n'y à personne dans les rues , sauf des gens qui promènent tardivement leurs chiens et qui me demande si j'ai une clope . J'ai une clope . J'ai ressenti l'obligation de fumer récemment car je stresse et que dans mon cas c'est de l'huile sur le feu de se faire de la bile . En parlant de bile , j'ai des crampes d'estomac , je sens des bruits sinistres dans mon ventre . Je donne une clope au maître de ce bouledogue et je fuis vers un autre endroit .

Cette fois ci ce n'était pas un promeneur de chien . Qui était ce ? C'était une personne qui claudiquait , en costume jaune topaze . Il était chauve , avec un bonnet à pompon sur la tête . Je l'ai rencontré dans le parc non loin de chez moi . Je connaissais ce monsieur . Je l'ai crée. Je suis écrivain . D'ailleurs , j'ai longtemps écrit des cauchemars que je faisais, je le fais encore , car il me reste des souvenirs de quand j'arrivais encore à m'assoupir plus de 120 minutes sur 24 heures . Je pense que j'écris toujours mais je ne me souviens pas . C'est peut être bourré de fautes ...je déteste les fauts .

Je suis en pyjama . Cet homme qui s'appelle Dwight Moro me l'a fait remarquer car il à dit :

«J'adore ton pyjama mon gars»

avant de me faire un clin d'oeil . Je n'ai plus conscience de ce que je fais . Mais maintenant ce n'est plus le seul objet de mon imagination à prendre vie . Je vois tout mes personnages et mes monstres se déverser sur ma vie. Je suis mon cauchemar , je suis mon univers .

Je vais rentrer . J'entend de la musique sans avoir d'écouteurs . Du métal . Je cours maintenant . Faut échapper aux chauves souris dévoreuses d'hommes , aux déséquilibrés , aux loups sauvages et j'en passe sûrement . Je tambourine à une porte dans une rue que je ne connais pas . Un enfant défiguré m'ouvre . Sa peau pend et bouillonne , des gouttes de sang tombe sur le sol . Il me supplie , mais je ne peux pas arrêter ce que je ne contrôle plus . Il me suit , me prend pour son père , difficile de voir clairement avec le visage passé au micro-ondes . Je me ramasse héroïquement sur les géranium et grommelle une armée de jurons . J'ai peur de ce que j'ai écrit .

Manquait plus que les morts-vivants . J'étais cerné par les créatures sorties du papier et de l'encre de mon stylo . Des dents claquaient , des yeux fixaient le rien sidéral , des bras cherchaient un point d'encrage . Je voulais hurler mais je riais . J'avais oublié que ce n'était pas à moi de décider ce que je ressentait . Mais heureusement que je me fais aider par les protagonistes de mon histoire post-apo . Les groupes de survivants sauvent leurs dieux . Comme cela est ironique . D'ailleurs , dans notre fuite , nous entendons des échos de guitare électrique familiers .

L'un des nôtres .....enfin... des miens se fait attraper par l'une des chauves souris , nous allons pas tarder à nous dissiper dans le néant nous aussi .

J'ai envie de tout arrêter car j'ai tout crée mais c'est râpé . Je ne contrôle même pas mon sommeil alors je ne suis rien dans cet immense foutoir . Je n'avais que l'illusion de contrôle maintenant je ne possède plus que l'incompréhension. Vous savez , je suis spectateur de ces instants . J'aimerai rentrer chez moi mais je ne peux parler aux autres car le monde gronde , la ville émet un bruit assourdissant de chaos . Leurs visages sont déformés par la terreur . Imaginez Goscinny à ma place .Iznogoud,Le petit Nicolas , et Astérix dans un match pour la domination du monde . Parfois on fantasme des univers ou nos personnages préférés sont ensemble . Le vivre c'est cent fois moins amusant quand on est MOI .

Nous sommes arrivés tant bien que mal à un repaire , celui là aussi je l'ai crée . Les survivants se sont présentés mais bien sûr je les connais déjà . Ils me parlent de leurs vies que j'ai tracé sur une feuille bristol avant de les suspendre à un fil dans mon bureau , dans mon appart . C'était une chose que mon ex copine ne supportait pas . Elle voyait cette pièce comme un foutoir alors que c'était MON MONDE. C'était d'ailleurs un fait trop important pour que je ne la quitte pas . J'ai faim . Alors on m'a fait manger les rations trouvées dans un 7/eleven . C'était pas bon . Je n'allais pas faire manger des bonnes choses à mes survivants , c'est sûr . C'était l'apocalypse . Je suis resté un long moment à observer mon univers devenu matériel quand on me dit «essaie de dormir» . C'est une blague ? Le puis-je ? Moi qui ai perdu la notion de la réalité , du temps , est ce que je peux me sortir de ce délire que je ...

Je suis dans mon lit . Mon lit . Mon lit ! Dans mon appart, dans ma ville , dans ma société et ma réalité . J'avais oublié que je rêvais que je ne rêvais plus . Un regard à ma fenêtre m'apprend qu'il fait beau dehors , il est peut être temps de sortir un peu . 

Writober 2018Où les histoires vivent. Découvrez maintenant