– Stan tu es sûr ?
– Oui Mégane on en a déjà parlé. Je préfère y aller seul.
La jeune femme sort du lit puis vient se blottir dans les bras de son amant. Elle passe ses bras autour de sa taille, embrasse son épaule nue puis ferme les yeux. Mégane le sert fort, faisant en sorte qu'il ne puisse plus bouger.
Stanislas essai de se retirer, repoussant doucement la jeune femme en riant.
– Aller Mégane laisse-moi faire ma valise ! Mon avion est dans une heure et je ne suis même pas habillé !
Mégane s'écarta, alla se chercher un café dans la cuisine puis revient à la charge.
– Mais pourquoi tu ne me laisse pas partir avec toi ? Demanda-t-elle.
– Parce que je ne veux pas. Je n'y vais que pour l'enterrement de ma mère, et ensuite je reviens. File-moi mes clopes. Ordonna Stanislas, replaçant une mèche brune derrière son oreille.
Mégane s'exécuta, apportant au passage un briquet puis ouvrit la fenêtre. Stanislas s'alluma une cigarette, souffla la fumée de manière triste puis continua sa valise. Il savait que Mégane ne le lâcherait pas. Seulement il devait rentrer, et seul, pour son bien comme le sien.
– Mais je n'ai jamais rencontré ta famille... larmoya la jeune femme, se rapprochant doucement de Stanislas.
Il détestait. Il détestait quand elle faisait l'enfant de cette manière. Ça ne l'attendrissait pas, ça ne faisait que l'énerver, et l'envie de partir lui était encore plus grande. Il tira une latte de plus, puis demanda calmement :
– Est-ce que ça pose vraiment un problème Mégane ? Ce n'est que ma famille après tout.
– Mais toi tu connais la mienne.
Son envie de lui mettre une claque se faisait de plus en plus grande. Stanislas se retourna, plongeant ses grands yeux verts dans ceux de sa copine.
– Écoute Mégane, je ne suis pas proche de ma famille. Je ne veux pas que tu la rencontre d'accord ? Ça n'a aucune importance, je rentrerai assez vite. Et puis ça ne va être qu'un enterrement, ce ne sera pas très amusant. Lui sourit-il du mieux qu'il put.
– Mais pourquoi ça ne t'atteint pas ! Enfin c'était ta mère tout de même ! S'énerva Mégane.
Sa mère putain. Cette femme qui avait fermé les yeux sur tout. Stanislas ne répondit pas. Il jeta sa cigarette, s'en alluma une autre puis partit dans la cuisine se servir un verre de whisky. Le jeune homme regarda sa montre à gousset ; 8h55. Un peu tôt pour un verre. Il le vida d'un seul trait puis retourna dans la chambre. Mégane l'attendait sur le lit, muette. Au bout de six mois de vie commune, elle avait l'habitude de son fonctionnement et savait comment se comporter avec lui. Ses verres, sa drogue et ses clopes ne la choquait même plus. C'est aussi pour cela que Stanislas devait partir. Il se rapprocha d'elle, doucement. Il embrassa l'une de ses mains puis la prit dans ses bras en lui murmurant à l'oreille.
– Mégane je reviendrais vite d'accord ? Je n'ai jamais été proche de ma mère ni de ma famille. Je ne veux pas que tu les rencontres, ce ne sont pas des bonnes personnes. Laisse-moi partir seul, je serais là dans moins d'une semaine. D'accord ?
La jeune femme se ravisa. Elle tendue une chemise à Stanislas, acceptant son triste sort. Son homme l'enfila tout en continuant de fumer. Elle se décida quand-même d'ajouter :
– Stan ça fait presque un an qu'on est ensemble... Et j'ai l'impression de ne rien savoir de toi...
L'homme serra ses poings, essayant de ne pas s'énerver. Il décida de l'ignorer, encore, et de finir sa valise le plus vite possible.
– Tu peux me donner L'antéchrist s'il te plaît ?
– Il est où ? Demanda Mégane, ne prêtant pas attention au fait qu'il venait de l'ignorer.
– Sur la table dans l'entrée.
Mégane lui rapporta le livre, le posant dans la valise ouverte. L'antéchrist de Nietzsche. Le livre préféré de Stanislas. Depuis qu'elle le connaissait, il le lisait en boucle. Cependant la jeune femme ne cherchait pas à savoir pourquoi ; comme tant d'autre chose sur lui d'ailleurs.
Stanislas ferma sa valise, la posa dans l'entrée puis alla se servir un deuxième verre dans la cuisine. 9h10. Son avion allait décoller dans vingt minutes. Il fallait qu'il parte, il le savait.
Rejoindre cette famille, encore une fois. Retrouver Florent, Louise, Laure et tous les autres. Il savait que la mort de sa mère n'était pas un accident, que son père avait dû la tuer suite à une cuite, encore une fois. Bien sûr, personne ne le saura. Stanislas était le plus intelligent de la confrérie, savait profusément des choses que les autres ignoraient. Malgré cet enterrement, Stanislas n'avait aucune envie de rentrer au pays, en France. De retourner dans ce maudit village et dans cette maison profanée. Seulement il n'avait pas le choix ; tous les membres de cette famille, aussi fou soient-ils, s'attiraient depuis toujours comme des aimants.
En vidant son deuxième verre, Stanislas se rendit à l'évidence ; il ne reviendrait pas au Danemark. Il ne reverra pas Mégane. Néanmoins, il avait appris à faire taire ses émotions il y a longtemps. Pour ne plus avoir mal, pour ne plus tomber à chaque claque ramassée. Avec ses émotions, Stanislas n'aurait jamais survécu. Cette force mentale qui le pousse à agir de manière juste, si elle n'était pas là, il n'aurait pas subsisté. Maintenant, plus aucun sentiment, plus aucune émotion ne pouvait l'atteindre. Il ne pouvait que faire semblant.
– Mon cœur ? Tu devrais y aller, le taxi est en bas. Il ne faut pas que tu rate ton avion.
La voix de Mégane le sorti de ses pensées. Stanislas posa son verre, s'alluma une cigarette puis mit son blazer noir par-dessus sa chemise. Il regarda une dernière fois l'heure sur sa montre à gousset ; 9h15. Il devait vraiment partir. Il allait falloir tout oublier, car les souvenirs sont ses pires ennemis. Il devait aller de l'avant, toujours. Le jeune homme prit sa valise, embrassa Mégane puis déposa un baiser sur son front en signe de protection. Il ouvrit la porte puis dit :
– Au revoir Mégane.
– Au revoir, Stanislas Honoré.