Hannah
Le trou béant qui m'aspire vers l'inconscience est absurde, je n'arrive pas à lutter. Il m'appelle de sa voix suave, il m'appelle et son cri est une caresse sur ma peau blanche comme neige. Il me tente. Je suis tentée. En réalité je cours vers lui comme un enfant courrais vers une friandise flamboyante qu'il apercevrait au loin. Son appel est sucré et enivrant. Il m'aspire peu à peu au fond de son abîme. Et je ne résiste pas. Qu'il me prenne, moi, mon corps, mon esprit et...mon passé. Ainsi que la partie de ma vie où se cache Jackson, avec son regard sournois, plein de désir. Je ne vois plus que ça quand son nom résonne dans ma tête. J'aimerais que le trou dans lequel je sombre m'absorbera au plus profond de son être pour que je ne puisse plus en sortir. Pour que je ne puisse plus m'enfuir. Je veux qu'il m'absorbe entière. Il fait tout noir, mais sa caresse sur mon visage est chaude, elle me berce. Je crains ne pas pouvoir résister à son chant mélodieux. Il m'emporte et me berce.
Une voix lointaine se fait entendre, comme un écho venu de loin, et plus il se rapproche, plus je reconnais cette voix. Cette voix sournoise. Cette voix qui m'a causé tellement de mal. Cette voix qui est la raison de mon coeur meurtri, de mon âme flambée. Et plus je l'entends moins je veux me réveiller. Je veux fuir. Fuir au plus loin. Je ne veux pas qu'il m'attrape, qu'il laisse ses marques au fer rouge, parce que ça fera mal, et je ne pense pas pouvoir me relever.
Je ne veux pas me réveiller. Je ne veux pas être confronté à cette réalité fulgurante. Je ne veux pas. Et pourtant mon prénom résonne de plus en plus fort à mes tempes, et il s'abandonne à la lisière de mon oreille. Mais je l'entends, il est bien là, à crier mon nom, à implorer mon réveil, à espérer que je ne dorme pas. Peut être aime-t-il se jouer de moi, jouer avec mon coeur fragile et déchirer mon âme sensible.Peut être....
Je sens la brise matinale faire danser mes cheveux ébouriffés. Je sens mon corps s'enfoncer dans quelque chose de mou. Et cette fois, ça me frappe, car je l'entends à pleine voix prononcer mon nom.
-Hannah...!
Il le murmure, un murmure à peine audible, mais il me fracasse les oreilles. Mon nom à sa bouche sonne comme une imploration, une supplication. Mon nom à sa bouche me fait peur. Je souhaite continuer à dormir, à ne plus exister, qu'on m'oublie. Mais ma vision se brouille et les couleurs apparaissent à mes yeux, comme une explosion. Tout est flou, mais tout semble net. Et la vision que je vois à mon réveil me plait plus que ça ne le devrait. Jackson, là, assis à côté de ce qui me semble être un lit, me tenant la main, le visage rempli d'une détresse apparente. Les yeux plissés, inquiets.
Le choc est si violent que le réflexe qui me vient est de retirer ma main et de me tourner pour qu'il ne puisse pas entrevoir mon visage.
Il lâche un soupir de soulagement. Puis il se lève et sort, emportant ce qu'il restait de mon misérable coeur. Les larmes commencent à envahir mes yeux. Je les refusent. Je ne veux pas pleurer. Je ne veux pas qu'il gagne, encore une fois.-On est enfin réveillé à ce que je vois. Sonne une petite voix derrière mon dos.
Je me retourne, intriguée. Une jeune femme, vêtue d'une robe bleu à fleurs blanche et vertes, qui lui arrive juste au dessous du genoux. Elle porte une barrette dans ses cheveux de jais qui retient sa frange. Sa peau est assez basanée. C'est une femme des tropiques, ça se voit. Je suppose que c'est la remplaçante de l'infirmière du lycée.
J'esquisse un faible sourire à sa réplique. Puis je me lève.-Je vois que tu n'as rien et que tu te portes en parfaite santé. Le gars qui était là, c'est ton petit ami ? Parce que c'est lui qui t'a emmené et il est resté là jusqu'à ce que tu te réveille, c'est à dire à peu près une heure.
Petit ami...
Je craque. Des flots de larmes me submergent et l'infirmière semble décontenancée face à cette explosion. Puis elle s'adoucit et vient vers moi.
-Je vois, c'est...difficile c'est ca ?
Ça semble ne pas attendre de réponse car au même moment elle me prend dans ses bras.
-Tout va s'arranger, ne t'inquiète pas, laisse le temps au temps.
Sa voix est douce, elle me berce, me réconforte. Même si je n'y crois pas, elle me donne envie d'y croire pendant un instant. Je ferme les yeux et me laisse porter par le flot de son amour et de sa douceur.
Je finis par me séparer d'elle, et comme je n'ai pas envie de retourner en cours je m'assois et lui dévide mon sac. Je lui dis tout ce que j'ai sur le coeur. Tout ce que je ressens, toute la merde qui se passe en ce moment dans ma vie, de mes parents à Jackson en passant par mon cancer.Elle me regarde, elle m'écoute attentivement en gardant le silence, et quand j'ai enfin terminé, la sonne cloche, annonçant midi. Je la regarde et lui souris, un sourire de reconnaissance. Et je crois qu'elle l'a compris car elle me dit:-Reviens quand tu veux.
Puis je sors, mêler à la foule d'élèves affamés. Je monte au troisième étage ne voulant pas être dérangé. Mais en arrivant à l'endroit où je me cache, Il est là. Je me retourne vite et marche, le plus vite possible, mais cela ne sert à rien puisque rapidement il me rejoint et me plaque contre le mur, m'encadrant de ses bras pour que je ne puisse pas en sortir. Il me regarde et quand ses yeux verts rencontrent les miens, quelque chose se brise à l'intérieur de moi.
N'en as-tu pas marre de briser ce qu'il me reste d'entier Jackson.
Ses yeux ne sont pas remplis de haine, ni de colère, ils sont remplis d'une douceur inconnue.
Impossible.
Et pourtant...je sens mes paupières s'humidifier quand je détourne les yeux. Mais il prend mon menton et me force à le regarder. Sans que je m'y attende il écrase ses lèvres sur les miennes. Je prends part au baiser, trop savoureux pour que je le laisse filer, je veux me souvenir du goût qu'avait ses lèvres...menthe acidulée. Je sais que ce baiser me détruira, qu'il aspirera les débris de mon âme et les détritus de mon coeur, mais tant pis, de toute façon, il n'y a plus rien à sauver. Le baiser est doux, mais devient vite passionné. Il pose ses mains en coupe sur mon visage, provoquant une chaleur électrique et insère dangereusement sa langue. Je le laisse faire. Je veux me souvenir de tout. Du regard crémeux qu'il avait, de son baiser doux, de ses mains touchant ma peau. Il m'a manqué, c'est indéniable. Mais je sais qu'avec ce baiser, je ne le récupèrerai pas. Qu'il continuera de me filer entre les doigts et que ses flèches acérées continueront de me poignarder le coeur, mais ce n'est pas grave car rien ne vaudra ce moment chaleureux. Je sais que quand je romprai ce baiser, il redeviendra le Jackson que j'ai connu en arrivant. Le Jackson blessant, arrogant, sournois, sans coeur et méchant. Mais même si lui il oublie ce moment, moi je ne l'oublierais jamais, il est placé dans un coin de ma mémoire dédié à lui.
Je mets fin au baiser, contre mon gré, mais je ne veux pas qu'il pense que je suis le genre de fille facile. Le genre où il pourra toujours revenir facilement sans que je lui dise rien. Le genre qui lui pardonnera toujours. Aujourd'hui c'était la dernière fois, que j'étais ce genre de fille.
Je lui jette un dernier regard, je me défais de son emprise sur mon corps, mais pas sur mon coeur, et je cours dans la direction opposée. Jackson, aujourd'hui c'est terminé, tu n'auras plus d'emprise sur moi, sur mes décisions. Je ne serais plus la fille facile qui acceptera tout ce que tu feras. Je suis tombée, mais aujourd'hui, tout doucement je me relève, les genoux écorchés, les bras bleutés, les mains déchirées, le visage coupé, mais le temps guérit Jackson, le temps guérit. Ca prendra du temps oui, mais je serai guérie de toi. Je te l'affirme, je serai guérie de toi, peu importe le temps que ca prendra, les larmes que je verserai, les bouts de mon coeur que tu perceras, je guérirais.
Au loin je l'entends pousser un juron et cogner le mur. Mais il ne revient pas. Je crois qu'il a compris. Il a compris que désormais le renard devra s'attaquer à un autre lapin, parce que moi, je ne le laisserai pas me bouffer.)
VOUS LISEZ
Him
Teen Fiction[...] Elle me fit danser tel une ballerine sur une scène. Elle me fit danser tel un rappeur emporté par le flot de sa musique. Elle me fit danser comme une gymnaste lors de son premier gala. C'était magique, c'était apaisant. Elle me fit tournoyer à...