Chapitre 20

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Hannah

-Quoi ? Pourquoi ? Répondis-je étonnée.

-Je peux entrer.

-Oui bien sur, dis je déconcertée par ce qu'il venait de dire.

-Tu veux quelque chose à boire...Euh..je ne sais pas si on a encore des trucs à boire. Dis-je gênée consciente de ma connerie.

-Non ça ira merci, je ne suis pas venu pour prendre un café.

-Ah... c'est si grave que ça ? Demandais-je inquiète.

-A vraie dire, oui. Tu dois t'être aperçu que j'évite Jackson.

-Euh... oui répondis-je sceptique, mais je pensais que c'était parce que tu avais peur...

-Peur ? Ce gars a littéralement foutu ma vie en l'air. Il m'a pris tout ce que j'aimais, tout ce que j'avais de plus précieux. Il m'a volé mon coeur, mon âme, ma vie... plus vite qu'un aimant puisse s'attacher à un autre, il m'a détruit.
Ainsi  j'ai continué, en vie mais pas vivant, éveillé mais pas conscient.

J'étais outrée. Mais qu'a pu faire Jackson. C'est la première fois que je le voyais dans cet état, tout tremblant, la tête baissée, lutant contre ses démons passéistes qui reviennent lentement prolongeant sa douleur, comme un saut dans une vaste étendue d'eau, conscient de la chute, conscient de la mort qui s'approche, tu fermes les yeux et l'accueilles au creux de tes bras. Arrivé au fond de cette vaste flaque, tu ouvres tes paupières et laisses l'eau pénétrer tes poumons, lentement, tu souffres... Souffrir pour mieux survivre...

A travers la mince distance je pouvais ressentir sa douleur, une douleur immense, un masque tombé, des démons révélés, et pourtant, il ne pleurait pas. Il était trop déprimé, trop blessé pour pleurer. Comme si Jackson lui avait volé toutes ses larmes..

Je séparais cette distance pour trouver refuge dans ses bras. Il souffrait... il a toujours souffert...

-Qu'est ce qu'il t'a fait ? Demandais-je d'une voix, que je fis plus rassurante que possible

Il releva la tête et me regarda dans les yeux. Son regard... il était perdu.. il y avait quelque chose qui avait trouvé refuge dans son regard que jamais je n'aurais pu idéaliser, même dans les cauchemars les plus horribles.

-Tu ne peux même pas imaginer...

-Silteplais dis le moi...

-Il...il...
J'aimais quelqu'un à l'époque, j'avais quatorze ans. Elle s'appelait Lyria, elle était belle, qu'est ce qu'elle était belle..., il eut un sourire nostalgique puis continua, c'était une nouvelle au collège, elle était arrivée un jour d'été, je me souviendrais toujours de ce jour, dès qu'elle entra dans la salle, elle l'illumina. Je ne lui prêtais pas vraiment attention parce que tous les mecs de la classe étaient à fond sur elle, tous..tous sauf moi et Jackson. Aussi mignonne qu'elle pût être avec ses tâches de rousseurs, elle n'était pas son style, c'était le genre de type qui d'un claquement de doigt pouvait avoir tout ce qu'il voulait, mais à aucun moment il ne s'est préoccupé d'elle.
Un jour, alors qu'il n'y avait plus de place dans la cantine, elle vint s'assoir à côté de moi. Je n'avais pas d'ami, je n'étais pas très sociable, mais avec elle c'était différent...
Elle demanda si elle pouvait s'assoir, chose que je lui accordais. Elle se présenta, comme si nous nous étions jamais rencontrés, puis elle me sourit...ce sourire, Dieu sait que jamais je ne pourrais l'oublier, elle aurait pu tout avoir juste avec un sourire. Mais avec le temps j'appris qu'elle ne souriait pas beaucoup. A partir de ce jour, on devint ami, pour moi elle était ma seule amie, pour elle j'étais un ami parmi d'autre... mais j'étais le seul à la faire rire. On se rapprocha et je finis par m'y attacher ...plus qu'il ne le fallait, mais elle ne s'intéressait pas à moi comme moi à elle, pour elle j'étais juste le bon ami...elle aimait déjà quelqu'un d'autre. Ce quelqu'un d'autre ne fut personne d'autre que Jackson. Elle me parlait sans cesse de lui, avec une telle admiration, avec une telle passion, qui m'en brisait le coeur...Mais le jour où elle comprit que Jackson ne s'intéresserait jamais à elle, elle se rapprocha de moi et un jour, lors d'une balade dans un parc, elle m'embrassa. J'te jure, c'était magique. Son baiser était comme l'été, chaud, doux, parfumé...
On revint à l'école le lendemain, main dans la main. Jackson nous surprit un jour, elle le dévora du regard, il me fit un sourire narquois et passa, je ne m'inquiétais pas plus que ça, et pourtant... j'aurais dû. Je tombai malade et je dûs rater quelques jours de cours, mais quand je revins le lundi suivant, il était avec elle... ses lèvres étaient posées sur les siennes. Ce jour là, la flamme de mon amour me consuma. Il me vit et me sourit, un sourire vainqueur. Il ne m'aimait pas, il ne m'avait jamais aimé, et pourtant, je ne lui avais rien fait... et ce jour là il me prit ce que j'aimais le plus. Pourtant ce n'était rien à côté de ce qui me fit vivre après. Il s'amusait à me ridiculiser, à me rabaisser, il me pourrissait la vie. Je n'avais déjà pas d'amis mais ce fût pire. Dans les couloirs on ricanait quand je passais, on se moquait, on m'insultait. A la cantine, aucune place ne m'étais accordée. Je dûs souvent manger dans les toilettes. Tous le collège suivait Jackson et me harcelait. Je ne voulais plus aller à l'école, je trouvais toutes les excuses possibles, mais aucunes ne marchaient...Après l'école je me faisais battre, on me tapait, on m'insultait, on m'arrachait mes vêtements. Lyria assistait à tout ça, et elle ne disait rien... elle observait, le visage neutre, mais ne disait rien. Jackson participait toujours à ces mutineries..et pourtant, je ne l'avais rien fait. Chaque fois que je La croisai, mon coeur se brisait un peu plus, jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien à briser. Jackson ne l'aimait pas... il se jouait d'elle, la maltraitait aussi.. mais refusait qu'elle parte parce qu'il aimait me voir souffrir. Elle souffrait. Elle n'était pas heureuse. Elle ne souriait plus, elle ne rayonnait plus, cette étincelle dans ses yeux s'était tûe en même temps que sa joie de vivre. Elle était morte ainsi que son éclat. Durant les deux années de collège que j'eus à passer, je dûs me cacher chaque jour, de peur de me faire battre, de peur de retourner à l'hôpital, parce que oui, à cause de lui et de ce qu'il m'a fait je me suis retrouvé à l'hôpital avec les côtes et le nez cassé. Tu vas peut être me prendre pour un minable qui ne savait pas se défendre, mais quand presque tout le collège se retournait contre toi, quand à chaque mot sortit de ta bouche on t'insultait parce qu'on disait que tu n'étais pas digne d'être entendu...Ma moyenne avait commencé à baisser, mes crises d'angoisses étaient devenus de plus en plus fréquentes..J'avais peur...J'avais tellement peur de le croiser. J'avais perdu toute confiance en moi, j'étais stupide, moche, inutile, je voulais juste m'en aller, je voulais juste que Dieu m'accorde mes ailes. Il avait violé Lyria et l'avait filmé, et avait partagé la vidéo. Elle était dévastée, détruite. Il la menaça en lui disant que si elle portait plainte, il détruirait sa vie, mais ce qu'il ne savait pas c'est que sa vie était déjà détruite...elle était tellement détruite que Lyria n'y tenait même plus, elle y tenait tellement plus qu'un jeudi...oui c'était un jeudi après-midi, le temps était maussade, aussi maussade que mes pensées. Le principal annonça qu'on avait retrouvé son corps au fond d'un lac, elle s'était noyée. Tout le monde pensait qu'elle s'était vraiment noyée, qu'elle ne savait pas nager. Mais moi je savais très bien qu'elle en avait juste eu marre, je le savais car c'était la nageuse la plus douée que j'avais vu, elle n'était pas aussi forte que celles qu'on voit à la télé, mais elle était douée...elle en avait juste eu marre..

Il s'arrêta un instant et ferma ses yeux...puis reprit.

-Sa mort m'accabla et je devins vide...vide d'émotion, vide de ressenti, vide de savoir...vide, comme une chrysalide après le départ du papillon, vide comme le poussin ayant quitté son oeuf...vide. La fin d'année approcha, puis les vacances et je me disais que le lycée serait une nouvelle vie, une nouvelle porte qui s'ouvrait, j'espérais...et cet espoir a nourri le peu de force qui me restait, je suis devenu plus fort, mentalement mais aussi psychologiquement. Je n'ai jamais raconté cette histoire à personne... absolument personne, il se tourna vers moi et plongea son regard dans le mien, Hannah, si je te raconte cette histoire, c'est parce que j'ai appris...pour toi et lui...parce que j'ai pris connaissance de votre rapprochement soudain, et je voulais te mettre en garde...Hannah silteplais, ne t'engage pas dans une relation qui causera ta perte... silteplais, fais attention à ce que tu fais et aux décisions que tu prends, parce que je peux te l'assurer, il n'y a rien de bon en ce garçon, et je ne supporterais pas de perdre encore une fois quelqu'un qui m'est chère.

Une fois terminée, je fus choquée... choquée ne pouvant même pas décrire mon ressenti en cet instant. Comment...? Juste comment on pouvait faire un tel mal à quelqu'un? Comment pouvait-on lui faire vivre un tel malheur.

Je pris Kev dans mes bras, énormément touchée et outrée par son douloureux passé...

-Ne t'inquiètes pas... lui murmurais-je.

Au même instant mon téléphone vibra. C'était lui, c'était Jackson.

Je ne répondrai pas..

Je ne réponds pas au pourriture, parce que oui, Amber Jackson tu es une pourriture.

HimOù les histoires vivent. Découvrez maintenant