1. Le chat de Schrödinger

260 11 8
                                    

L'autre jour, je me baladais en ville lorsque j'entendis une série de miaulements déchirants, provenant d'une petite maison donnant sur la rue. "Un chaton abandonné", pensais-je. "Pauvre bête". N'écoutant que mon bon cur, je sonnais à la porte. Pas de réponse, mais les miaulements reprirent de plus belle. Je m'enhardis à pousser la porte qui n'était pas fermée. L'intérieur était obscur.

"Il y a quelqu'un ?" Demandais-je, interdit, sur le seuil.

- Fermez cette porte ! Cria alors une voix d'homme. Le chat va s'enfuir !

- Excusez-moi, répondis-je. Je ne voulais pas vous déranger...

- Attrapez ce chat ! Cria-t-il alors. Il est devant vous !

Mes yeux s'étant alors accoutumés à l'obscurité, je parvins à distinguer en effet un chaton qui tentait de se glisser entre mes jambes pour sortir. En me baissant vivement, jarrivai à lattraper. Le chaton miaula derechef.

- Ah merci ! Dit lhomme. Ce satané chat va me rendre fou ! Mais Entrez, je vous prie.

Je fis un pas en avant, et distinguai un homme dâge mur qui me souriait.

- Je ne me suis pas présenté, reprit-t-il. Erwin Schrödinger, physicien quantique.

- Enchanté, dis-je, en lui tendant le chaton. Quest-ce que cest, un physicien quantique ?

- Voulez-vous maider à le mettre dans cette boîte verte, là-dedans ? Me demanda-t-il sans me répondre.

Je regardai autour de moi. Jamais je navais vu un intérieur aussi étrange. Quel bric-à-brac ! On aurait dit un laboratoire, plein dappareils étranges et de câbles électriques courant en tous sens. Mais il y avait effectivement dans la pièce une sorte de congélateur dont la porte munie dune imposante serrure de coffre-fort était ouverte, et qui contenait effectivement une boîte verte posée sur un rayon. La chose bizarre, cétait le gros pistolet, solidement fixé, pointant vers lintérieur de la boite, dont la gâchette était reliée à un gros appareil bizarre. Tout ça dans un congélateur !

- Vous voulez vraiment mettre ce chat la dedans ? Mais pourquoi ce pistolet ?

Schrödinger me regarda comme si jétais le dernier des idiots. Sans répondre, Il posa le petit chat dans la boite, en referma prestement le couvercle, et enfin referma le congélateur, sans toutefois le verrouiller à clef. Enfin, il daigna me parler.

- Mais pour prouver ma théorie, jeune homme ! La théorie quantique ! Vous voyez, Dès que jaurais appuyé sur ce bouton (Il y avait en effet un gros bouton rouge sur le congélateur, avec une étiquette marquée «armement du système» !)... un compteur Geiger va commencer à compter les radiations émises par le plutonium que contient cet appareil, et au premier tic larme devrait tuer le chat. Mais comme personne ne peut lobserver

- Quoi ? Criais-je. Vous allez tuer ce pauvre chat ? Mais vous êtes un monstre !

- Mais non jeune homme ! Ce chat va simplement se retrouver dans état quantique superposé. Dans lun des états il sera vivant, dans lautre mort. Mais comme ce caisson de mon invention (il désigna le congélateur) est absolument hermétique et ne laisse passer aucune radiation ni aucune vibration, nous naurons aucun moyen de le savoir ! Vous allez voir (il appuya sur le bouton rouge).

- Je ne comprends rien à ce que vous racontez. Tout ce que je vois, cest que vous allez tuer ce chat. Et avec du plutonium en plus !

- Non, non, il ny a que quelques atomes de plutonium dans lappareil. Il peut se passer des jours avant que lun deux ne se désintègre. Cest sans danger. Sauf pour le chat, parce que le pistolet tirera si cela arrive. (Il sourit. Ma parole, il sourit !) Mais cela sera sans conséquence car il ny aura pas dobservateur pour le savoir. Vous comprenez ?

La Physique QuantiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant