SECONDE CHANCE : Chapitre 2

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Depuis que sa vie avait basculé avec la mort de Thibault, le roi Edrick ne vivait plus que pour découvrir ce qui était arrivé à ce fils qu'on lui avait arraché sans qu'il n'ait eu le temps de le connaître. Il avait fait lever l'host et l'armée avait prit la route en direction du Nord pour gagner le village de Dree.

Pendant tout le trajet, le capitaine Dorval, qui connaissait bien son roi, fut inquiet de son air sombre et de son silence.Un silence dans lequel il semblait se muer depuis la mort de son fils. Dorval avait bien essayé de le soutenir, mais Edrick était quelqu'un de renfermé et qui était difficile à faire parler. Ce n'était pas qu'il ne faisait pas confiance ou qu'il n'appréciait pas son capitaine mais, comme il lui avait dit une fois « la fonction de roi rend obligatoirement seul ». Alors Dorval s'était contenté de le suivre pour pouvoir le soutenir physiquement car aucun des deux hommes ne savaient ce qui les attendait dans le Nord.

Plus ils approchaient de la ville de Dree et plus la tension était palpable. Personne ne savait ce qu'ils allaient découvrir mais la vision qui leur apparut soudainement semblait toute droite sortie d'un cauchemar apocalyptique.

Les maisons éventrées étaient réduites en cendres toujours légèrement fumantes. Des corps mutilés et en décomposition jonchaient toutes les rues. Certains avaient été décapités, d'autres empalés vivant sur des pieux ou éventrés, d'autres brûlés vifs, d'autres encore amputés de plusieurs membres ou juste transpercés pas des lames larges et tranchantes. Des jeunes femmes, en partie dénudées, avaient encore la bouche ouverte pour continuer à hurler la douleur des tourments physiques qu'elles avaient subis.

Un silence de mort se fit parmi les soldats. Certains d'entre eux s'arrêtèrent, vaincus par les nausées qui leur soulevaient l'estomac devant une telle vision d'horreur. Le capitaine Dorval, lui-même, porta la main à sa bouche pour s'empêcher de vomir. Il parvint à se maitriser mais un long frémissement de terreur le parcourut.

Au milieu de ce carnage, le roi Edrick immobilisa sa monture et mit pied à terre en tentant de se maîtriser. Il marcha en silence au milieu des corps mutilés, pensant à Thibault, effondré dans ses bras ainsi qu'aux horreurs que son fils avaient vues et subies avant de pouvoir s'échapper.

Il marchait donc au hasard, comme un fantôme, totalement perdu et presque en larmes lorsqu'il aperçut une silhouette humaine qui semblait aussi égarée que lui dans tout ce carnage. Une silhouette qui le fit sursauter et accélérer son pouls. Le roi pressa donc le pas, se demandant s'il n'était pas en train d'halluciner.

Une fois à la hauteur de la silhouette, qui ne semblait pas l'avoir entendu, il tendit la main et pressa l'épaule de l'homme qui était prostré devant une maison totalement en ruines.

- Thibault ?

Le jeune homme sursauta et redressa la tête, reconnaissant instantanément la personne debout à ses côtés.

- Mon Roi ?

- Thibault ? Ce n'est pas possible... murmura le roi en pressant plus fort le bras du jeune homme comme pour s'assurer qu'il n'était pas en train de rêver.

- Non votre Altesse, répondit le jeune homme. Thibault est mon frère jumeau. Je me nomme Mateas... Savez-vous où il se trouve votre Altesse ? S'il vous plaît... J'étais parti au marché sur Alvana et quand je reviens... tout... tout... tout le monde a été massacré...

Le jeune homme frémit et lutta contre les larmes qui lui montèrent aux yeux de manière totalement incontrôlée. Le roi se sentit touché et pressa plus fort l'épaule de ce deuxième fils tout en tentant de contrôler sa propre émotion.

- Doucement mon garçon.

- Je vous en prie mon Roi... Mon frère ? Demanda Mateas comme une supplique en se mettant à trembler.

- Je suis désolé... Il est mort.

Mateas frémit et s'exclama en pleurs tout en se laissant tomber à genoux.

- Je le savais... Je l'ai senti... Pourquoi lui ?... Je... Je suis tout seul maintenant...

Il y avait une réelle douleur dans la voix du jeune homme et le roi comprit que la vie de ses fils n'avaient pas dû être facile et cela finit de l'attrister. Si seulement il avait su... Si seulement il avait comprit lorsque Thibault s'était effondré dans ses bras... Le roi se mit donc à genou à côté de Mateas et sa main pressa de nouveau son épaule.

- Non, tu n'es pas seul mon fils.

Le jeune homme frissonna et redressa ses yeux rougis par les larmes pour croiser le regard de son roi.

- Qu'avez-vous dit votre Majesté ?

- Tu ne seras pas seul... Je serai là pour toi, mon fils, dit-il en tendant à Mateas le médaillon qui l'avait mis sur la piste.

Ce dernier le prit en tremblant et l'étonnement se lut une nouvelle fois sur son visage. Edrick lui sourit avant de prendre son visage entre ses mains. Du bout des doigts, il balaya ses larmes.

- Je suis désolé mon garçon... J'ai compristrop tard pour Thibault... C'est le médaillon qui m'a permis de faire le lien... Je n'ai pas pu le sauver mais je serai là pour toi.

- Mais, je ne comprends pas... Le médaillon... Le médaillon de maman ? Demanda le jeune homme en le faisant rouler entre ses doigts.

- Oui, ce portrait est le mien mon fils... Si tu savais comme j'ai aimé ta mère... Mais je n'ai pas eu le droit de continuer à la chérir lorsque je suis devenu roi... J'ai bien essayé mais tout a été fait pour nous séparer et ellea préféré partir par peur que je renonce au trône pour elle... Alors, je lui ai offert ce médaillon pour qu'elle sache que je ne l'oublierais jamais et que mon cœur lui appartiendrait jusqu'à ma mort... Si seulement j'avais su qu'elle attendait des enfants... qu'elle portait mes fils... Je l'aurais retenu... J'aurais eu le courage d'affronter les critiques... Je suis tellement désolé mon fils...

Le jeune homme frémit et baissa la tête, murmurant tout en ne quittant pas le médaillon des yeux.

- Maman n'a jamais voulu se marier... Elle disait que son cœur était déjà à quelqu'un...

- Comme le mien, répondit le roi.

Le regard des deux hommes se croisa une nouvelle fois et ils ne dirent rien pendant quelques secondes puis, le roi murmura.

- Je n'ai pu me résoudre moi non plus à la remplacer. Rien ne pouvait être plus fort que l'amour que j'ai éprouvé pour ta mère... Mais elle ne m'a rien dit... Pour vous deux, elle ne m'a rien dit... Sinon tout aurait été différent... mon fils...

Mateas continua à trembler doucement, luttant contre toutes les émotions contradictoires qui se déchainaient en lui... Son frère était mort mais cet homme, son roi, lui annonçait qu'il était son père... Un père dont il avait tant rêvé enfant et sur lequel sa mère faisait tant de mystère.

Edrick sentit sa peine et une légère inquiétude, dans son attitude, qui le touchèrent. Il se pencha donc en avant et noua ses bras autour des épaules de son fils pour le serrer dans ses bras. Mateas le laissa faire, déposant avec précaution sa tête sur l'épaule de ce père qu'il ne connaissait pas avant de se remettre à pleurer doucement, évacuant toutes les douleurs qui le vrillaient de l'intérieur. Le roi le sentit se mettre à trembler. Alors, Edrick le serra un peu plus fort contre lui pour le bercer tout en lui murmurant.

- Il ne faut plus pleurer... Nous sommes ensemble désormais mon fils... Le destin vient de nous offrir une seconde chance alors nous allons la saisir pleinement... Ne pleurs plus... Je suis avec toi

Seconde ChanceWhere stories live. Discover now