Bloody Sunday

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Un réveil difficile, un peu trop tôt pour un dimanche. Encore une belle journée qui s'annonce. Je ne comprendrais jamais les gens qui aiment le dimanche. Y a rien de plus déprimant qu'un dimanche. En général il pleut, on se fait chier chez soi, y a rien à la télé, donc on se retrouve planté devant des séries avec un paquet de Doritos. Et le soir, on se commande une pizza, parce que la flemme. Bon, j'avoue, j'adore les journées chill séries-chips-pizza. Mais j'ai pas la chance de passer ce genre de dimanche.

Un bon dimanche dans ma peau, ça commence par un message de ma mère, du genre:

 "11h30 à la maison. Ne sois pas en retard si tu ne veux pas rater l'apéro, Tante Martha a fait ses fameux cocktails. Prends une bouteille de vin, pour ne pas arriver les mains vides comme à ton habitude".

Puis, 5 minutes plus tard: 

"Chloé, tu réponds? S'il te plaît ne me dis pas que tu es toujours dans ton lit. T'es encore sortie, hier?"

Ces merveilleux messages me rappellent donc que, comme pratiquement chaque dimanche, j'ai un repas de famille. Ma famille n'est pas du genre soudée. Vraiment pas. Mais pourtant, ma mère et ses soeurs ont besoin de se prouver qu'elles peuvent s'apprécier, et elles insistent pour qu'on se réunisse toutes les semaines. Chaque repas du dimanche finit en engueulades, mais elles persistent. Je pourrais très bien ne pas y aller, mais je me force toujours, après tout, un repas de merde vaut bien une semaine d'harcèlement de ma mère.

Je me retrouve donc devant le miroir, à contempler ma tête décomposée du matin. Contrairement à ce que pense ma mère, je ne suis pas sortie hier soir. J'ai juste pleuré. Mes yeux bouffis en sont témoins. Pourquoi? Je ne saurais même pas l'expliquer. Parfois, on a besoin de pleurer, de laisser éclater la boule qui reste en permanence dans l'estomac, ou dans la gorge. Hier soir, c'était un de ses moments où j'ai juste envie de crier de toutes mes forces et de tout détruire. Ma boule n'est pas partie pour autant, au contraire, elle est même plus forte, mais je m'en fous, j'avais besoin de pleurer. Je suis tellement une pro de la déprime que j'ai trois playlists toutes faites, en fonction du type de déprime, une autre playlist qui regroupe toutes les scènes de séries et de films qui m'ont fait pleurer et une dizaine de paquets de chips et de pots de glace qui ne demandent qu'à être mangés.

Passée la phase maquillage "si je dis que je suis fatiguée ça passe", je me rends compte qu'il est déjà 11h20, et que je vais rater l'apéro de Tante Martha, oh non, c'est trop triste (soulignez l'ironie). Et c'est à ce moment-là, quand je me dis qu'heureusement, mon frère sera là pour me soutenir pendant le Triste Repas de Tante Martha, que je reçois un message. De mon frère. Vous voyez venir la couille (excusez du terme)?

"Ne me déteste pas. Il faut absolument que je voie Juliette, c'est la merde. Ils veulent annuler ma série, ces cons. Tu vas devoir affronter Le Terrible Dîner de Famille sans moi...Dis-leur que j'ai la gastro. Sorry, je t'aime"


Struggle, you'll be alrightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant