Chapitre 1

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Ava


La cloche de l'église sonne minuit. C'est le signal ! J'enfile ma capuche noire et me détache du cimetière pour me rendre discrètement jusqu'à la station service, à la sortie de la ville. Limerick m'attend, camouflé dans sa tenue noire, dans une ruelle face au petit magasin. Il me salue d'un simple signe de tête puis retire son sac de son dos et en sort une grosse brique ainsi qu'une bombe de peinture.

- Tu t'occupes des caméras et du tague ou de la vitrine ? » Me questionne-t-il avec un sourire en coin.
- Tu ne sais pas dessiner Li ! » Je me contente de lui répondre, moqueuse.

Il ricane puis me tend la bombe de peinture. Ensuite, il me rappelle une dernière fois le plan que nous avions préparé tout au long de la semaine puis me regarde m'élancer. Je traverse la route à pas de loup, vérifiant par dessus mon épaule que aucune voiture n'arrive. Puis, cachée derrière ma capuche, je m'approche de la caméra de surveillance et la recouvre de peinture d'un geste expert. Je me retourne vers Limerick et lui fait notre signe secret. Je le regarde remettre son sac sur son dos et traverser la route avec précaution.

- Bien joué ! Le tague maintenant ! Je m'occupe du reste ! » S'exclame-t-il tout en me rejoignant.

Je me contente d'acquiescer et recule pendant qu'il jette sa grosse brique contre la vitrine. Cette dernière explose et Limerick laisse échapper un cri amusé. Puis il donne quelques coups de pieds dans les derniers bouts de verre restant et rentre dans le magasin. Je le regarde voler des paquets de cigarettes et quelques bouteilles d'alcool qu'il cache rapidement dans son sac à dos. Puis je me mets au travail. Armée de la bombe de peinture, je commence à taguer le mur de notre signe préféré, celui de l'Anarchie.

Soudain, une sirène bien trop familière retentit à mes oreilles. Limerick jure et saute hors du magasin. Sans un mot pour moi, il part en courant dans le sens opposé aux voitures de police qui s'approchent rapidement du magasin. Je n'ai pas le temps de terminer le tag. Je lâche la bombe de peinture rouge au sol et prend mes jambes à mon cou. Limerick est déjà loin devant moi, je ne le vois même pas au bout de la grande avenue. J'accélère ma course mais les flics m'ont repérée et me suivent en voiture. Je n'ai aucune chance ! Je pourrais tenter de passer par les petites rues étroites que je connais mais malheureusement, les hommes du shérif connaissent mes techniques depuis le temps ! Ils sauraient me retrouver d'une façon ou d'une autre.

- Ava ! Arrête-toi ! » S'exclame l'un des policiers dans son porte voix.

Il n'a pas besoin de le dire deux fois. J'obéis immédiatement et m'arrête pour reprendre ma respiration. Ils m'ont parfaitement reconnue, ça ne sert plus à rien de courir ! Même si j'arrive à leur échapper, ils viendront frapper à ma porte ! Autant ne pas me fatiguer et risquer l'entorse ! Ce n'est pas la première fois que je finirai au commissariat et ce ne sera sûrement pas la dernière !

- Bon sang Ava ! Tu n'arrêteras donc jamais ! Avec qui tu étais cette fois ?! » S'exclame le même policier en descendant de sa voiture.
Une seconde voiture banalisée s'arrête à ma hauteur mais les deux policiers à l'intérieur ne quittent pas le véhicule. Ils me regardent, à l'affût.
- Personne. » Je mens en lui lançant mon plus beau sourire.
Cet homme, c'est mon policier attitré ! C'est toujours lui qui me passe les menottes lors de mes arrestations. Selon les rumeurs qui courent dans notre petite ville, il pourrait bien prendre la place du shérif d'ici quelques mois, lorsque ce dernier sera à la retraite.
- J'ai vu une autre silhouette, arrête de me mentir Ava ! Tu sais que le shérif sera plus clément avec toi si tu donnes le nom de ton complice ! » Insiste-t-il tout en me passant les menottes.
- Vous devriez consulter un ophtalmo ! » Je me contente de lui répondre avec un air moqueur.

Il me regarde d'un air désespéré tout en soupirant. Puis il m'entraîne jusqu'à sa voiture sans insister et protège ma tête pendant que je m'assois à l'arrière du véhicule. Les deux voitures repartent et j'ai comme l'impression qu'ils ont déjà oublié Limerick. Personne ne part à sa recherche, comme si le simple fait de m'avoir arrêtée était assez satisfaisant pour eux. Je reste silencieuse durant le trajet jusqu'au commissariat, même si mon « policier attitré » continue son interrogatoire pour connaître l'identité de mon complice.

Lorsque la voiture de police se gare devant le commissariat, suivie de près par la seconde, je perds mon sourire moqueur. Je dois maintenant affronter le face à face le plus difficile pour moi, celui avec le shérif. Ce dernier se tient dehors, aux pieds des escaliers qui mènent au bâtiment. Il sait déjà qui est assit dans cette voiture : moi, sa fille adoptive qui le déçoit tant, jour après jour.

- Faites-la sortir de là ... » Soupire-t-il en s'adressant à mon flic.
Ce dernier obéit et prend également la liberté de me retirer mes menottes.
- Salut Karl ! » Je tente avec un faible sourire.
- Dans mon bureau ! » Se contente-t-il de répondre tout en tournant les talons.

Il ne prend même plus la peine de me hurler dessus dès ma sortie de la voiture ou d'avoir l'air sévère. Il semble seulement las de la situation. Je le suis jusqu'à son bureau et m'installe dans le fauteuil en face de lui.

- Tu t'es bien amusée, me questionne-t-il, tu n'étais pas censée réviser pour ne pas rater une seconde fois ton diplôme ?
- J'avais besoin d'une pause ! » Je me contente de lui répondre sans oser le regarder dans les yeux.
Voilà pourquoi ce face à face est le plus difficile pour moi. Je n'arrive toujours pas à m'habituer à cette déception que je peux percevoir dans son regard lorsqu'il me fixe.
- Et avec qui as-tu pris cette pause ? James ? Lena ? Limerick ? Connor ? » Continue-t-il dans un soupir.
- J'étais seule. » Je mens de nouveau tout en jouant avec les lacets de mes doc martens.
- Ce n'est pas ce que j'ai entendu dire mais bon, passons. Tu ne diras rien de toute façon. Alors si tu ne veux pas parler, moi, j'ai quelque chose à te dire. Je refuse que tu passes encore tes vacances de Noël à vandaliser tous les bâtiments de la ville ! J'en ai marre de te retrouver dans mon poste de police tous les weekend ! Alors j'ai pris une décision !
- Attends, quel genre de décision ? » Je panique immédiatement en me redressant dans le fauteuil.
- L'orphelinat de la ville recherche des bénévoles pour le mois de décembre. Je leur ai dit que tu étais intéressée. Ils t'attendent dès lundi ! » M'annonce mon père adoptif d'un air neutre.
Je saute littéralement hors du fauteuil.
- Pardon ? Tu as perdu la tête ?! J'ai passé les trois quarts de ma vie dans ce genre d'endroit sordide ! Ne compte pas sur moi pour mettre un seul pied dans cet orphelinat ! Je ne sais même pas comment tu oses me proposer une chose pareille ! » J'explose tout en frappant violemment le bureau.
- Ce n'est pas une proposition Ava. C'est un ordre. Et je t'accompagnerai personnellement jusqu'à l'orphelinat lundi matin. » Insiste-t-il sans même sourciller.
- Sérieusement ?! Karl ! » Je hurle, hors de moi.
- Je suis ton père, et je t'arrête tout de suite, je sais que je ne suis pas ton père biologique ! Mais Ortense et moi, nous t'avons adoptée il y a bientôt 6 ans et ce jour là, tu es devenue notre fille ! Je ne peux plus rester là, à te regarder gâcher ta vie sans rien dire ! » S'explique-t-il avec un air plus sévère.
- Ne compte pas sur moi lundi matin ! Je n'y irai pas ! » Je termine avant de quitter le commissariat en claquant les portes.

Make a wish for ChristmasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant