First

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4 ans plus tard

Une musique assourdissante se dégageait des enceintes et les lumières fusaient de tous les côtés. Confortablement assise dans un immense canapé en velours rouge et dissimulée aux yeux de tous grâce à la pénombre du lieu, je m'autorisais un instant à lâcher prise, à me défaire du masque que je portais en permanence. 

Lentement, je sentis mes traits se relâcher et quitter l'expression froide que j'arborai au quotidien pour prendre une expression lasse et mélancolique. Sans que je ne puisse expliquer pourquoi, une larme dévala ma joue et vint s'écraser en milliers de petites gouttelettes sur la moquette.

Je me sentais vide, si vide. 

Si vide depuis qu'il était partit. Depuis longtemps, plus rien n'avait de sens. Les fêtes, les amis le lycée, rien ne me réconfortait, rien, rien n'arrivait à me faire oublier.

Non. 

Non. Il fallait que j'arrêtes d'y penser. Il fallait que je me concentres sur le brillant avenir qui m'attendait. 

Un brillant avenir... Oui.

Après tout, c'était pour le concrétiser que j'étais venue au monde. C'était le but ultime de ces années d'apprentissage prodiguées par mon père : épouser le futur dirigeant du pays, prendre la tête de la plus grande entreprise de télécommunication au monde, puis donner naissance à des héritiers et enfin m'éteindre tranquillement dans une villa près de la côte. 

Des mères tueraient surement pour que leur propre enfant ait une telle destinée. 

Et j'étais tellement heureuse à l'idée de l'accomplir... Tellement, tellement heureuse... 

N'est-ce pas ? 

Ce n'était pas comme si je n'aimais pas mon fiancé. Nous nous connaissions depuis si longtemps... Mais...

Une image fugace s'imprima devant mes yeux. Un visage chaleureux et souriant, des yeux noisettes malicieux, des cheveux bruns en bataille. J'eus un sursaut et mon coeur se mit à tout rompre tandis que ma respiration se faisait de plus en plus saccadée. 

Sans attendre, je sortis ma boite de pilule que je ne quittai jamais et avalai toutes celles qui restaient. L'effet fut immédiat : une douce torpeur s'empara de moi, et les violentes émotions qui menaçaient de me noyer s'évaporèrent comme de la fumée dans les airs.

Mais une voie dans un coin de ma tête ricanait et me rappelait sans pitié ma condition. 

"Pathétique, tu es pathétique". "Père aurait honte". 

Je secouai violemment la tête et le silence occupa à nouveau mon esprit embrumé. Calmée, je reconstituai ma façade, effaçai la moindre chaleur dans mes pupilles et me levai. Tout en lissant ma robe à sequin rouge je passai en revue les lieux, le club le plus chic de Manhattan, qui regorgeait de dorures et de lustres en crystal reflétant les lumières multicolores des projecteurs. Apercevant mes pairs au centre de la pièce riant et jouant comme si le monde leur appartenait, je pris une courte inspiration, plaquai un sourire méprisant sur mon visage et avançai, prête à affronter les prédateurs les plus féroces qui existaient.

L'élite de la côte Est.

The Perfect GirlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant