Chapitre 5 Partie 2

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— Bonjour, je vous appelle pour l'annonce que j'ai vue sur internet, dis-je, en tentant de camoufler ma voix dans le creux de ma main.

— D'accord. Avez-vous de l'expérience dans le domaine du prêt-à-porter masculin ?

Si j'ai de l'expérience ? Merde, j'ai envie de rire. Tout dépend de quelle expérience parle Pierre ?

Déboutonner une chemise lentement en me dandinant sur moi-même, je sais faire. Défaire un pantalon sensuellement en effleurant légèrement l'objet de tous mes désirs, oh oui, j'adore, je suis douée dans ce domaine. Sourire dragueur, passage de ma langue sur mes lèvres, regard ténébreux, je suis une excellente vendeuse avec des atouts très tentants. Enfin, si on écarte les morceaux de viande défraichis, comme les vieux par exemple.

Je tente de reprendre mon sérieux, alors que j'ai soudainement chaud. Putain, ça fait combien de temps que je n'ai pas baisé ? Il faut vraiment que je retourne sur le droit chemin si je ne veux pas finir vieille fille avec plein d'accessoires sexuels dans mon tiroir de table de nuit. Bon, j'en ai déjà, j'avoue, néanmoins quand je ne trouve pas chaussure à mon pied, comme en ce moment, il faut bien que je me soulage. Il n'y a pas mort d'homme quand même.

— Bien sûr, j'ai travaillé un an dans une boutique identique à la vôtre.

— Parfait ! Nous pourrions nous rencontrer ? Disons dans une heure au magasin ? La place à prendre est libre de suite. Si votre CV me convient, nous pourrons parler contrat.

— Oh, je serai ravie.

Grimace ! Tirage de langue ! Et puis quoi encore ?

— Puis-je avoir votre nom de famille, ainsi que vos prénoms, s'il vous plaît ?

Je ne me souviens pas d'avoir eu à lui donner de suite mes prénoms lors de notre entretien. Cette fois, il est rapide. Il a vraiment besoin de renfort.

Je souris diaboliquement. Me voilà possédée par Lucifer, dieu des enfers. Quand mon ex-patron va entendre qui je suis réellement, je suis certaine qu'il va mourir sans avoir le temps de raccrocher.

— Lola Thérèse Huguette Marlot.

Quand on a trois prénoms, l'avantage, c'est que l'on peut prétendre à l'un d'eux pour se faire nommer. Mes parents, je pense, étaient bourrés le jour de ma naissance. Ils n'ont en aucun cas pensé à mon avenir. Jamais, je ne me ferais appeler autrement que Lola, ça, c'est certain.

Le point positif après avoir énuméré mon nom complet, c'est que Pierre n'a pas encore raccroché. J'ai dû l'achever à coup sûr.

— Très drôle ta petite blague Lola !

— Oh, allez, tu ne vas pas me faire croire que ça ne te fait pas plaisir d'avoir de mes nouvelles ? Pierre ? Allo ?

J'ai parlé beaucoup trop vite, il a raccroché. Y a-t-il quelqu'un dans ce monde avec assez d'humour pour me suivre ? Pierre et mon père pourraient très bien s'entendre. J'ai bien mon ancien patron, même s'il est trop sérieux. C'est marrant que je ne m'en rende compte que maintenant.

Je lâche un soupir digne d'un grand film et me laisse aller sur le canapé. Allongée sur le dos, je contemple le plafond. Que pourrais-je bien faire pour gagner suffisamment d'argent sans me fatiguer ? Me filmer en train de donner des conseils beauté ? Même pas en rêve, je n'y connais pas grand-chose. Ah, je sais ! Je devrais donner des conseils aux nanas indépendantes comme moi qui veulent juste partager un peu de bon temps. Ça marcherait, c'est certain.

Mon téléphone sonne interrompant mon idée de génie. Je l'attrape en grognant. Pierre ? Sans rire ? Qu'est-ce qu'il me veut ? Je décroche, réticente. Il va m'insulter et passer ses nerfs sur ma pauvre personne. Je colle mon smartphone à mon oreille en fermant les yeux.

Lola Où les histoires vivent. Découvrez maintenant