Chapitre deux

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Comme d'habitude, j'étais allée me réfugier dans les toilettes, j'entrai rapidement dans une cabine, et me laissa lourdement tomber assise sur l'abattant. Tentant en vain de ne pas faire trop de bruit, je laissais librement s'écouler ma blessure sur mes pommettes rougies, je n'avais plus conscience du vacarme que je produisais, je sanglotais, pleurais, ça me faisait du bien et c'était tout ce qui comptait pour le moment.

Je me sentais à un milliard de kilomètres de moi-même parmi eux, tellement différente de ce que je suis réellement. Je repensai à ce qu'il venait de se passer quelques minutes plus tôt dans la cafétéria, j'avais cette étrange impression que toute cette scène n'était qu'une illusion, une simulation, quelque chose de complètement abstrait. Je repensais à ce que je n'ai pas dit, ce que je voulais dire, ce que j'aurais dû dire.


Mes coudes s'appuyaient sur mes genoux et mes mains enserraient ma tête, mes paumes pressaient mes tempes et mes yeux se fermaient. Ma bouche était naturellement ouverte, j'inspirais et expirais profondément.

Je reconnu le son fondu de la porte à battant. Elle claqua encore quelques fois avant de s'immobiliser. Puis plus rien. J'avalais lentement la salive qui demeurait au fond de ma bouche. Ce silence m'effrayait, d'une traite je relevai la tête et ouvris les yeux.

Des bruits de pas trainants se rapprochaient de moi. Un autre long moment de silence.

-Je sais que t'es là, Sigrid.

Mon sang ne fit qu'un tour, je retenais ma respiration mais mon rythme cardiaque foudroyant m'empêchait de le faire bien longtemps. Une grande bouffée d'air m'avait trahie. J'avais reconnu la voix d'Ethan.

-Tu sais, ça ne sert à rien de te cacher. C'est moins marrant, tu ne trouves pas ?

Je fermai les yeux, mon visage entier se crispait. Je serrai fort mes poings mais mes doigts tremblaient déjà.

-T'es vraiment minable, Sigrid. Allez, sors de là. Ne m'oblige pas à le faire.

Je pressais le plus fort possible mes paupières, je collais mes mains agitées sur mes oreilles, mes lèvres frémissaient et elles lâchèrent enfin un profond soupir chargé de larmes.

Il se mit à rire, il riait et je pleurais. Je n'avais plus conscience du monde extérieur, tout semblait flou, décontenancé, froid et inexistant. Un bref fracas me fit sursauter, comme s'il venait de frapper de toutes ses forces contre la fine porte qui nous séparait. Un frisson glaça mon sang, je fixais à présent la poignée, ma respiration était toujours haletante, les litres d'air que j'ingurgitais faisaient trembler mes lèvres.

A nouveau le silence. Je remarquai que mon rythme cardiaque avait repris sa fréquence normale. Je ne quittais plus cette poignée des yeux, tout semblait physiquement disparaitre autour de celle-ci. Il y a seulement quelques secondes encore, je paniquais de peur et là, j'étais étrangement calme. A nouveau, ce sentiment d'insignifiance, comme si je venais d'assister, de façon étrangère, à la scène que j'ai pourtant vécu.

Lentement je déverrouillais la porte, Ethan avait disparu, j'étais seule. Je me retournais doucement vers cet espace étriqué où les secondes m'avaient parue être des heures.

J'avais ainsi passée tout le reste du temps de midi aux toilettes, comme il l'avait prédit. La sonnerie venait de retentir, je n'ai pas attendu plus longtemps, je suis sortie pour rejoindre ma classe, en espérant qu'elle soit déjà ouverte pour m'y réfugier avant tout le monde.

-Salut, ça va ?

J'ai senti un souffle dans ma nuque et je me suis retournée en sursaut vers cette voix. Un visage rond et pale tourné vers moi, de grands yeux marron me fixaient et une paire de lèvres rouges me souriaient. Il me fallut un petit temps avant de lui répondre affirmativement, ce qui la fit sourire encore plus.

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 07, 2017 ⏰

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Je l'ai seulement dit à la luneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant