1~1) Nouvelle de @Lilapetitsourir14

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Il était présent à mes côtés, me tenant la main fermement. Alors que je tournai le regard vers lui, attendant uniquement son attention, il m'intima de capituler. Les yeux fixes, admirant le concert qui se déroulait devant nous, mais aucun intérêt pour la musique, non. Je n'admirais que cet homme qui se trouvait, par chance, à mes côtés. Je profitais de sa présence, me nourrissant de la seule idée d'un tel individu auprès de ma personne.
Malgré son refus de sentir mon regard peser sur son corps et le fait qu'il ait lâché ma main, je parvenais à imaginer son visage de façon très nette.

Ses cheveux en désordre, à l'instigation du vent, le sourire qu'il arborait constamment, surtout lorsqu'il me considérait précautionneusement. Son charisme était tel qu'il n'aurait pu provoquer autre réaction, chez moi, que de l'adulation.

J'étais passé par divers sentiments. D'un simple béguin au véritable amour. J'en étais à présent certain, et déçu que cette évidence ne me soit pas apparue auparavant. Je l'aimais. Et j'allais le lui prouver comme je l'attendais depuis tant d'années.

J'allais enfin lui dire.
Dès la clôture du festival.

Étrangement, l'atmosphère semblait différente de ce que j'avais déjà expérimenté dans le passé. Le désaccord de la mélodie m'atterra au premier abord, ainsi que le silence pesant qui ternissait la salle malgré la musique assourdissante. Ensuite, les visages fermés qui arpentaient le stade. Bien que je n'aie pas observé avec minutie le lieu, le public ne me semblait pas si vivant. Même le groupe, sur scène, avait l'air de se comporter au ralenti. La tête commençait à me tourner. Je mettais cette douleur sur le compte de l'émoi, la frénésie d'un moment partagé par l'être aimé.

La pression d'un air enivrant me tomba soudainement dessus et des sensations toutes aussi farfelues les unes que les autres m'assaillirent simultanément. Tandis que la musique s'emparait de l'entièreté de mes pensées, la lumière brûlait ma rétine déjà meurtrie, les battements des basses concordaient, en rythme, avec ceux que je pensais provenir de mon cœur. Si tant est qu'il me reste encore.

La salle fut plongée dans un silence sans contestation. Seuls quelques applaudissements malheureux résonnaient davantage en mon esprit, comme si l'intention de me rappeler à ma misérable et dépendante vie les animait. Le besoin de prendre sa main me brutalisa. Je tâtai la place voisine, mais le seul constat fut un siège qui figurait vacant.

Les larmes coulaient abondamment le long de mon visage, et, irrité par l'incompréhension que je manifestais à cette situation, je fermai les yeux de façon éphémère, sans chercher d'explication ni cacher cette expression blessée. Mes lèvres se tordaient difficilement en un sourire. Puis, je riais.
Je croisai le regard d'un musicien, sur la scène, une lueur de douleur au fond de son regard si confiant. Lui que j'avais surpris occupé à observer la place suivant la mienne. Je riais de plus belle. J'aurais voulu en rire durant toute une vie, devant cet individu qui avait osé regarder mon amour dont la seule ombre était si merveilleuse. J'aurais également voulu effacer cette douleur prodigieuse qui m'animait.

Je détournai rapidement l'attention et me concentrais sur la cacophonie qui se jouait devant moi. La mélodie avait de nouveau changé, elle se faisait davantage railleuse. Ma bouche se pinçait et je posai brusquement mes mains sur l'audition que j'étais sur le point de perdre.

Il me sembla se passer quelques heures. À moins qu'il n'ait été question que de secondes ?
La musique s'affaiblissait et ma respiration suivait, je m'en trouvais époumoné.

Une fois que l'éclairage ampliatif eut disparu, une voix imposante me ramena à moi. Le tumulte environnant s'était brusquement évaporé, et la faible ombre muette à mes côtés me confirmait tout de même la compagnie de celui qui m'était omniprésent.

La voix résonna une nouvelle fois, plus puissante.

Je me ployais aux instructions qui venaient de m'être déclamées, de cet aboiement destructeur que personne ne semblait avoir perçu, et qui était bel et bien différent du ton doux que portait d'habitude mon bien-aimé. Je doutais de son identité. Et si il n'avait fait que me mentir depuis le début ? Lentement et d'une façon méfiante, contrastant avec l'avidité que j'avais ressentie plus tôt, je jetais un coup d'œil de côté.

Et ce que je vis me glaça. Rien. Moi, seul, au centre de ce stade dépourvu de vie. Le piano, monotone, jouait un air lassé. Il semblait abandonné, comme tous les instruments qui étaient étendus sur la scène aphone. Les sièges courbés. Les cloisons confinant le son à la fois doux et oppressant de la musique.

Je savais à présent à qui appartenait cette ombre qui était ma seule compagnie. Elle me paraissait tellement pitoyable, à présent...

Un morceau d'âme si sombre, que seul l'amour aurait probablement pu éclaircir, ou sombrer davantage.
Une ombre perdue, teintée de solitude et de folie.

...la mienne.

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