Chapitre 1: Megan Mcneerth

33 6 10
                                    


                Megan Mcneerth poussa un soupir d'exaspération avant de se laisser tomber dans son fauteuil; cette affaire commençait vraiment à lui taper sur les nerfs.Cela faisait à peu près cinq mois qu'elle s'acharnait dessus, traquant le moindre petit indice, mais rien! Elle n'avait jamais en douze ans de carrière, vu une affaire pareille. Elle décapsula une canette de Coca et recommença à feuilleter nonchalamment le rapport pour la énième fois.

La victime était connue des services de polices de Boston: Eddy Williams, 48 ans, manifestation d'ivresse sur la voie publique, agressions diverses, violences conjugales...(Et pas mal d'années de prisons sur les bras) Ce qui lui avait d'ailleurs vallut d'être le suspect numéro un de la mort de sa femme jusqu'à ce que l'on découvrit qu'elle s'était suicidée. Eddy se retrouva donc seul avec son fils, Élie Williams. 

"Pauvre gamin, pensa Megan, il a pas dû avoir une vie facile...Une mère morte et un père alcoolique avec un casier judiciaire loin d'être vierge...."

Le rapport mentionnait aussi la disparition de ce dernier et l'envoi de plusieurs patrouilles de police à sa recherche, sans résultats. (Il était mort, c'est du moins ce que pensait l'opinion publique)

C'était une adolescente qui, vers 00h45, en rentrant de boîte de nuit, avait remarquée que la porte de l'appartement des Williams  était grande ouverte. (En bon samaritain)Elle était alors entrée pour dire à ses voisins que leur porte n'était pas fermée ; ce fut à ce moment qu'elle découvrit le corps inanimé du père Williams sur le sol du salon, vraisemblablement mort. Paniquée, elle avait suite à cette découverte, immédiatement appelé les secours. La police avait, quant à elle, été appelée quelques heures après. Megan se rappelait encore (en frissonnant) de la première fois qu'elle avait vu le cadavre d'Eddy Williams.

 Elle se souvenait avoir pensé, lorsqu'elle était arrivée sur les lieux, que l'état de l'appartement était vraiment minable (elle se rappelait même, au comble de l'ironie, l'avoir comparé à un cadavre en décomposition) et que l'odeur était insoutenable, puis elle l'avait vu. Non, elle ne l'avait simplement pas vu, elle l'avait fixé et ce pendant plusieurs minutes, elle l'avait fixé avec un mélange de dégoût et de fascination. On aurait dit un pantin désarticulé: tout son corps s'était tourné, s'était tordu, se...s'était distordu dans une position irréalisable. Son teint autrefois rose était blême et ses yeux, mon dieu, ses yeux! Ses yeux étaient ternes, éteints, vitreux, en bref: mort, mais pourtant, Megan avait eu la désagréable impression qu'ils la suivaient du regard, comme si, même après la mort, Eddy était toujours conscient. Ses lèvres charnues étaient entre-ouvertes, laissant apercevoir une rangée de dents jaunâtre et une langue, rose et épaisse qui pendait à quelques millimètres du sol. Du sang séché était étalé autour de sa bouche. 

Et cette odeur! Un mélange entre l'odeur de pourriture de l'appartement, l'odeur nauséabonde du cadavre.Megan se rappelait également avoir eu envie de vomir, ce qui ne lui était jamais arrivé depuis le début de sa carrière, mais elle n'avait rien fait et elle s'était contenté d'inspirer un bon coup et d'écouter le médecin légiste faire son speech. Ce dernier n'avait pas pu déterminer la cause de la mort, mais avait estimé qu'elle avait eu lieu entre 22h15 et 23h30. La plupart des gens, dont Megan, avaient pensé que se ne serait qu'une question de temps avant de découvrir la cause de la mort, seulement, lorsque l'on avait révélé que l'autopsie n'avait rien donné, la cause de la mort était devenue un véritable mystère. 

Personne ne pouvait dire si il s'agissait d'un accident, d'un suicide, ou bien d'un meurtre. Et la chose qui agaçait Megan au plus haut point, c'était qu'il n'y avait aucun indices, rien, nada, zéro! Pas de cheveux, pas d'empreintes digitales, RIEN! Le vide total. Aucun témoin surprise, aucune lettre d'aveux, et ça faisait cinq mois (soit 150 jours et 3600 heures) que l'enquête n'avançait pas, ça faisait cinq mois, cinq mois que l'enquête stagnait. 

La plupart des enquêteurs mis sur l'affaire avaient abandonné après les trente premiers jours et seul quelques personnes persévéraient encore.

Alors que Megan s'apprêtait à boire les quelques gorgées de boisson gazeuses restantes dans sa canette, la porte de son bureau s'ouvrit brutalement. Une petite silhouette se tenait sur le seuil en se balançant s'avant en arrière, comme le faisait les enfants parfois. C'était une jeune femme souriante, au teint livide, presque maladif et au regard fiévreux. Ses cheveux était long, bruns, bouclés et semblaient ne pas avoir vu de brosse depuis des années. Elle aurait pu être jolie si elle n'avait pas les paupières tombantes et autant de cernes.

"Bonjour bonjour partenaire!", s'exclama joyeusement la jeune fille .

Megan  répondit avec un grognement ; cette fille était Charlie Strang, le bînome qu'elle devait se taper depuis( un mois déjà )que ce crétin de Colin avait eu la bonne idée de la faire travailler en équipe.

Megan détestait devoir travailler avec quelqu'un, mais elle détestait encore plus devoir travailler avec elle. Pourquoi? Parce qu'elle la trouvait juste insupportable! C'était une gamine, une véritable gamine! Elle s'excitait pour la moindre petite chose et avait toujours un sourire moqueur en coin.

"Tu as l'air bien contrariée tout d'un coup, serait-ce moi qui t'agaces? Hehehe...tu vas devoir faire avec Meggie! Mais je crois que je ne suis pas la seule à t'agacer ici..., fit Charlie en pointant le rapport du doigt. Laisse moi deviner...C'est l'absence d'indice qui te mets dans tout tes états n'est-ce pas?"

Megan resta silencieuse. Il y avait ça aussi, et elle pensait que c'était ça qui l'énervait le plus chez Charlie ( Juste avant le surnom cul-cul la praline) : c'était le fait qu'elle puisse lire en elle comme dans un livre ouvert. Depuis sa plus tendre enfance, Megan faisait tout ce qu'elle pouvait pour ne jamais montrer ce qu'elle ressentait ou ce qu'elle pensait et le simple fait de savoir que cette gamine pouvait deviner ses sentiments en un coup d'oeil l'exaspérait profondément. Elle poussa un soupir puis demanda un peu sèchement:

"Peu importe...qu'est-ce que tu me veux?"

Charlie fit mine de réfléchir un instant. Tient, encore une chose que Megan haïssait; qu'on la prenne pour une idiote. Finalement Charlie se donna une petite tape sur la tête et sourit à Megan:

"Ah oui, ça me revient! Alan m'a demandé de venir te chercher pour ce qu'il a appelé une "affaire urgente". C'est peut-être un meurtre qui sait?"

Charlie avait formulé cette hypothèse si légèrement qu'elle aurait pu répondre avec le même ton si on lui avait demandé quel temps il faisait. Cependant, Megan fit semblant de ne pas l'avoir remarquer et se leva lentement de sa chaise.

"Génial, pensa-t-elle,on n'a toujours avancé pas sur l'affaire Williams et on a une autre enquête qui nous tombe du ciel. Et en plus j'vais devoir me coltiner la gamine ..."

"Allez allez dépêche toi un peu partenaire!" Fit Charlie avec ce que Megan définissait comme de l'impatience(?)

"-Ouais ouais...Pars devant, je te rejoins dehors..."

"-Okie dokie!"

Charlie sortit de la pièce en claquant la porte. Megan pouvait entendre de moins en moins distinctement ses pas s'éloigner  de son bureau avant de ne plus rien entendre du tout. Une fois qu'elle fut sûre que sa collègue n'était plus dans les parages, elle jeta la canette dans une poubelle et enfila son manteau. Son regard se posa involontairement sur le cadre photo sur son bureau. Megan soupira avant de dire malgré elle:

"Ah...Si Maman voyait ça..."

ÉlieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant