Chapitre 4

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Enfin, nous arrivons devant l'igloo réservé aux dirigeants. C'est un grand dôme de glace dont l'extérieur est décoré avec des peaux de bêtes suspendues par des cordes, le tout couvert de neige. A côté de l'entrée délimitée par une fourrure peinte en rouge et vert, ils ont également installé une cloche.

Alrick la fait sonner avec force. Un petit bonhomme chauve du nom de Geyrson sort de l'igloo.

« Les frères Alrick et Huko ? Pourquoi êtes vous là ?

Il aperçoit la gosse perchée sur les épaules de mon frère.

– Mais, mais... Qui est cette petite ?!

– Geyrson, nous n'avons pas le temps de tout t'expliquer, je déclare d'un ton autoritaire. Nous devons parler aux chefs le plus vite possible, c'est urgent !

– Très bien, très bien... Venez par ici... » accepte t-il en nous laissant entrer.

Mon frère dépose la gamine au sol et nous pénétrons dans le grand igloo sans perdre une seconde de plus. Malgré ma peur, je suis assez excité de découvrir à quoi ressemblent les lieux.

La salle est très chauffée, je n'ose pas imaginé toute la graisse de baleine qu'ils font brûler pour obtenir une température pareille. Une bonne odeur d'encens flotte dans l'air, même si elle est peut-être un peu trop forte pour des narines qui n'y sont pas habituées, comme les miennes. Une grande table ronde est installée au milieu de la pièce. Y sont déposés des sortes de figurines en bois et des cartes encore à moitié enroulées pour la plupart. De plus, je remarque que le plafond est couvert d'un tissu composé de peaux de divers animaux rapiécées entre elles. Les chefs, au nombre de trois, sont réunis autour de la table.

Ils posent tous les yeux presque immédiatement sur la gamine. Le plus jeune, un blond aux yeux brillant portant une cuirasse pousse une exclamation de stupeur ; le quinquagénaire, brun avec une barbe taillée à la perfection, rentre dans une étrange paralysie. Enfin, le dernier, plus vieux que les deux autres réunis, a un rictus de dédain, si ce n'est même de haine. La mioche va se réfugier derrière Alrick qui se met à lui caresser les cheveux.

« V-vous avez osé... ?! bégaie le blond.

– Comment avez-vous pu ?! s'exclame le barbu en se levant de sa chaise.

– Vous voulez dire, amener une lokire ? je m'agace face à leurs réactions démesurées.

– Arrêtez votre petit jeu, tous les deux ! ordonne le blond en serrant les dents.

– Bon sang ! Nous n'avons rien fait de mal ! Je m'emporte en tapant du pied au sol.

– Petit insolent !! Je vais te montrer ce qu'est le respect !! » s'écrie le plus jeune en me fonçant dessus.

Soudain, une voix chevrotante, mais impérieuse, s'élève, calmant nette la dispute, c'est celle du vieillard :

« Assez. Yassin, Lucien, laissez-les. Ils ne savent pas. »

Le blond m'adresse un regard supérieur, puis me tourne les talons. J'ouvre la bouche pour demander ce que nous ne savons pas, mais Alrick me fait signe de me taire. Soudain, la voix de l'ancien se fait entendre à nouveau :

« Tu as bien compris, ce qui nous dérange est son appartenance au clan des lokires. Je refuse que cette enfant parle dans ma demeure, et je refuse de supporter tout autre manque de respect. Larick...

– Alrick, je corrige d'un ton irrité.

– Ne me coupe pas la parole, et tais toi donc, je t'ai assez entendu pour toute une vie, déclare le vieux avec un geste dédaigneux de la main. Hum... Je disais donc, Larick, tu vas me raconter tout ce qui s'est passé depuis ce matin, est-ce bien clair ? Je ne veux entendre rien d'autre que les faits. Épargne moi ton avis inutile.

– Oui, chef... accepte mon frère avec un respect dont je suis parfaitement incapable.

– Bien, tu peux commencer. Geyrson, sers nous du thé chaud, et moins lentement d'habitude, je commence à avoir froid. »

Le chauve s'exécute, non sans bougonner un peu au passage. Mon frère commence alors son récit. Il modifie un peu la vérité pour qu'elle corresponde davantage à ce que veulent entendre les chefs – il omet par exemple de parler de sa crise de peur et surtout du fait que nous quitterons le village peu importe leur décision. Cependant, il insiste dès qu'il le peut sur la puissance écrasante de l'ennemi. Pour ma part, j'affronte le blond du regard en m'efforçant de comprendre en détail l'histoire de mon frère, pour ne pas le contredire si je devais prendre la parole.

Enfin, le vieux déclare sans même consulter les autres dirigeants :

« Nous ne fuirons pas, si c'est ce que vous voulez savoir. Nous allons rester ici, et quand viendront nos ennemis, nos guerriers nous défendront, et nous gagnerons. Sachez, les enfants, que les choses n'ont pas toujours été comme vous les connaissez. Il fut un temps, quand j'étais encore plus jeune que vous, où notre grand peuple maintenant réparti sur beaucoup de villages, n'était qu'une toute petite tribu parmi d'autres, et nous nous faisions sans cesse la guerre. Cependant, mon grand-père, qui était un glorieux dirigeant, a réussi à nous sortir de cette spirale infernale en vainquant toutes les autres tribus autour de nous, sauf les lokires. Ils furent nos plus grands ennemis, et nous n'avons réussi qu'à les repousser au loin, dans les montagnes, comme vous le savez déjà. Les lokires n'ont jamais accepté leur défaite, et reviennent maintenant pour tenter de se venger... Pour eux, l'affront qu'ils ont subi ne peut se laver que dans le sang, notre sang. »

Je frissonne de peur, et j'entends mon frère gémir. Comment une voix si frêle peut être si effrayante ? Je pose une main sur son dos d'un geste rassurant, puis il l'étreint avec force.






J'ai été incapable de trouver la source de l'image, si vous l'avez par chance n'hésitez pas à me la donner :d


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⏰ Last updated: Jan 12, 2019 ⏰

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