H U I T

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S E N S A T I O N S 

...

La voiture s'arrêta devant une petite maison, celle du lieutenant. Connor et lui sortirent de la voiture ; depuis un petit temps, l'androïde résidait chez l'homme. Avery trouvait ça amusant. Il est vrai, son père détestait les androïdes il y a de ça encore une semaine, et Connor était stoïque et coincé. Avec toutes ces enquêtes folles et ces émotions, les deux commençaient à bien s'entendre.. Et depuis l'arrivée du frère jumeau maléfique, les places pour machines étaient devenue restreintes au commissariat.

Ils rentraient d'une nouvelle mission, dès le lendemain de l'incident à Stratford. Ils avaient découvert quatre autres déviants, et comme RK900 était occupé avec autres choses, Hank et sa fille les avaient laissé partir.

Avery descendit à son tour de la voiture, grimaçant à cause de sa récente blessure.

"Je vais.. Je vais dormir ici cette nuit. À lundi, Gav'."

Elle claqua gentiment la portière, et entendit une autre s'ouvrir. Elle vit Nines la rejoindre, et entendit Gavin l'appeler à l'intérieur, mais la machine sembla l'ignorer.

"J'aurais besoin de vous parler. Je ne me vois pas parler au détective." Expliqua t-il en croisant les bras. "Je ne suis pas censé devoir le faire, mais je ne comprend pas ce qu'il se passe." continua t-il. "Et cela ne devrait pas arriver." son regard bleuté brilla dans le brun de la jeune femme, même dans la pénombre de la soirée. Elle hocha la tête et fit signe à Reed de s'en aller.

...

La neige avait cessé de tomber, mais une épaisse couche était tout de même présente. Seul le bruit de leur pas dans la poudre était perceptible. La jeune femme profita de ce silence, et du calme de ce quartier, le quartier de son adolescence. Elle emmena Nines dans un parc pour enfant, mais qui donnait une superbe vue sur un pont.

Elle enleva de sa main droite —protégée par un gant— la neige sur le banc positionné juste en face du paysage et y prit place.

"Je t'écoute." Elle brisa ce silence pourtant si agréable. Elle l'examina longuement. Il fixait le pont rougeâtre, sa diode partagée entre le jaune et le bleu. «Il était là depuis cinq jours et était déjà perturbé. Et il est dit plus performant que son prédécesseur? Voilà ce que ça fait de donner le pouvoir aux androïdes d'avoir une personnalité aussi forte que la sienne ; on l'utilise car on est programmé de cette façon, et puis après, on veut comprendre son fonctionnement. Bravo, Cyberlife.» pensa t-elle. Un sourire amusé parut sur ses lèvres.

"Je ne comprend pas."  avoua t'il après un moment.

"Ça, je l'avais deviné." répondit Avery. Le ton sarcastique dans sa voix sembla agacer 900. Il se retourna vers elle, ses prunelles lançant des éclairs.

"Êtes vous entrain de vous moquer de moi?"

"Moi? Je n'oserais jamais." elle chassa l'air de sa main, une grimace sur le visage. Son sourire était toujours présent.

"Vous êtes la personne la plus provoquante que j'ai pu rencontrer."

"Il faut l'être également pour le remarquer." Avery accompagna sa rétorque d'un clin d'œil.

Nines leva les yeux au ciel. Il n'eut aucune idée de pourquoi il fit ça. Par réflexe de son programme? Ou parce que c'est lui qui avait décidé de le faire. Il observa sa partenaire un moment. Elle le fixait également, souriante.

"Pourquoi faites-vous cela?"

"Pourquoi je fais quoi?"

"Me traiter comme une personne."

"Oh.. Eh bah- Je.."

"Je ne suis pas vivant. Je ne l'ai jamais été, alors pourquoi me traiter comme l'un des vôtres?"

"Quoi, t'aurais préféré que je te traites comme tous les autres le font? Que je t'insulte et te frappe à tout bout de champ?" Elle se leva du banc, le visage renfrogné. "C'est ça que tu veux?" l'androïde ne répondit pas.

La bouche légèrement ouverte, il du baisser les yeux pour voir sa partenaire s'avancer vers lui. Il pu voir les étoiles de la nuit dans ses yeux, les faisant briller de milles feux. Il ne pu déchiffrer le regard qu'elle lui portait, toutes ces émotions étaient inconnues pour lui. Ils les imitaient automatiquement, sans même les comprendre. Mais aujourd'hui, il voulu comprendre.

"Je te traites comme je le fais avec tous mes proches. Toi, tu ne fais juste que.. T'adapter à mon comportement. Alors, qui est le pire de nous deux? L'humaine qui est sympa avec l'androïde ou la machine qui s'adapte et imite l'humaine alors qu'il ne ressent absolument rien?" fut la dernière parole d'Avery. Son téléphone vibra dans la seconde d'après. Un message de Hank, réclamant son retour.

"À lundi, Nines."

Après un dernier sourire elle tourna les talons, prête à partir, mais le RK900 la prit par le bras pour la ramener vers lui. Délicatement, il enleva le gant noir de sa main droite afin de toucher sa peau une nouvelle fois. Une même secousse électrique secoua son corps, mais les émotions étaient différentes. Elle semblait frustrée, et son corps raidit donna raison à l'hypothèse de Nines.

C'était seulement la seconde fois qu'il pu la toucher de cette manière. Programmé pour être curieux –Cyberlife voulant savoir tout dans les détails–, il avait envie d'en découvrir plus. Ces fausses émotions qui lui avaient été implantée ne le faisait pas vivre, il ne faisait que les imiter comme il était si bien le faire. Il avait l'air de tout ressentir alors qu'il ne ressentait rien. Il ne prenait pas spécialement plaisir à communiquer ou même accomplir ses missions, avant d'être affecté au detective Reed. Pourtant, dès ce jour ou il avait échangé avec la Robertson, il avait été imprégné d'une amusante et vraie sensation. Elle avait une personnalité différente ; pas violente comme Gavin, mais pas non plus trop douce comme l'agent Tina. Avery était vraie et pure, et ressentait tout ce qui lui arrivait à 100%. Alors quand il l'avait touché par hasard et qu'il avait pu, rien qu'à travers ça, ressentir réellement toutes ces choses, peu importe ce qu'elles étaient, il comprit qu'il débutait probablement une certaine addiction.

Il voulu s'en empêcher, refusant de trahir cette petite voix dans sa tête qui lui donnait des ordres dans son cerveau, ainsi que Cyberlife qui lui faisait si confiance. Alors, vite, il lâcha la main de l'humaine après seulement quelques secondes, lui enfila le gant et reparti, comme si rien ne s'était passé.

...

Rentrant à la maison après quelques minutes, elle caressa le chien de compagnie et prit en flagrant délit Hank et Connor avoir ce qui semblait être un léger moment de complicité. Simplement l'homme qui avait posé sa main sur l'épaule du RK800, mais ce petit geste était déjà un énorme pas en avant. Alors l'amitié entre eux deux était vraiment possible ? Elle leur lança un sourire, leur souhaitant en même temps une bonne nuit, et parti se coucher.




R E A D YOù les histoires vivent. Découvrez maintenant