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Je ne tiens plus et je sors de chez moi rapidement. Je monte les escaliers à une vitesse folle et enfin je passe la porte qui mène au toit.

Elle est là, accoudée au rebord et elle me regarde. Ça peut paraître un peu idiot à dire pour moi qui suis tombée amoureuse de mots derrière un écran, mais je la trouve magnifique. 

Elle baigne dans la douce lumière du soleil couchant, accompagnée d'un ciel aux nuances bleutés.

Pas un nuage à l'horizon, pas le moindre signe de malheur ou de souffrance.

Juste la beauté de l'instant.

Je m'avance vers elle, le sourire aux lèvres. Pendant que je me rapproche de mon amour, elle me dit :

- Il y a un poème que je voudrais te réciter. Sans doute le dernier mais le plus beau à mon sens.

- Dis-moi.

- "L'espoir divin qu'à deux on parvient à former
Et qu'à deux on partage,
L'espoir d'aimer longtemps, d'aimer toujours, d'aimer
Chaque jour davantage ;

Le désir éternel, chimérique et touchant,
Que les amants soupirent,
A l'instant adorable où, tout en se cherchant,
Leurs lèvres se respirent ;

Ce désir décevant, ce cher espoir trompeur,
Jamais nous n'en parlâmes ;
Et je souffre de voir que nous en ayons peur,
Bien qu'il soit dans nos âmes.

Lorsque je te murmure, amant interrogé,
Une douce réponse,
C'est le mot : – Pour toujours ! – sur les lèvres que j'ai,
Sans que je le prononce ;

Et bien qu'un cher écho le dise dans ton cœur,
Ton silence est le même,
Alors que sur ton sein, me mourant de langueur,
Je jure que je t'aime.

Qu'importe le passé ? Qu'importe l'avenir ?
La chose la meilleure,
C'est croire que jamais elle ne doit finir,
L'illusion d'une heure.

Et quand je te dirai : – Pour toujours ! – ne fais rien
Qui dissipe ce songe,
Et que plus tendrement ton baiser sur le mien
S'appuie et se prolonge !"

François Coppée.

- Magnifique ! Moi aussi j'en ai un.

- Je t'écoute.

- "Je vivais sans coeur, tu vivais sans flamme,
Incomplets, mais faits pour un sort plus beau ;
Tu pris de mes sens, - je pris de ton âme,
Et tous deux ainsi nous nous partageâme :
Mais c'est toi qui fis le meilleur cadeau !

Oui ! c'est toi, merci... C'est toi, sainte femme,
Qui m'as fait sentir le profond amour...
Je mis de ma nuit dans ta blancheur d'âme,
Mais toi, dans la mienne, as mis le grand jour !

Je tombais, tombais... Cet ange fidèle
Qui suit les cœurs purs ne me suivait pas...
Pour me soutenir me manquait son aile...
Mais Dieu m'entr'ouvrit ton cœur et tes bras !

Et j'aime tes bras... tes bras mieux qu'une aile ;
Car une aile, hélas ! sert à nous quitter :
L'ange ailé s'en va, lorsque Dieu l'appelle...
Tandis que des bras servent à rester !"  

Jules Barbey.

Sans rien dire elle s'approche de moi et vient recueillir cet amour naissant dans un tendre baiser. Qu'il est bon ce baiser, il chasse les ténèbres et cette masse sur mon cœur. Je me sens revivre. 

Dans les bras de celle que j'aime, je peux le dire, il ne pleure plus dans mon cœur.

"Stances Amoureuses"Où les histoires vivent. Découvrez maintenant