Silverdeath

2.Haut mentor en herbe (version modifiée)

Ulys parvint à se retenir de rire, durant approximativement un quart de seconde. Puis on l'entendit dans tout le hangar.

— Chut ! cria Athénor, aussi discret que son ami. La patrouille !

Lyros, se colla instinctivement contre la paroi du conteneur, l'oreille tendue, les sens en alerte.

— Vous allez nous faire prendre, gémit-il.

Ulys parvint à calmer ses nerfs puis s'assit contre un mur, une bouteille ouverte toujours à la main. Il but une gorgée du breuvage et, sans quitter le vaisseau qui lui attirait le regard, demanda à son ex-camarade de classe les origines de cette croyance improbable. Le wollion lui répondit par un haussement d'épaules.

— Si tu ne me crois pas tant pis, mais tu ne feras jamais décoller ce vaisseau sans.

Il partit sur ces entrefaites, sourds aux questions et autres moqueries d'Ulys.

— Je te parie qu'il a tout inventé, déclara Ulys à Athénor qui avait observé la scène silencieusement, comme à l'accoutumée.

Le meilleur moyen de calmer ces deux-là étaient de les laisser s'entretuer sans les interrompre. Ainsi, ils achevaient plus rapidement leurs disputes et la vie pouvait reprendre son cours normal. L'apprenti pilote reporta son attention sur le vaisseau et Athénor fit de même. Ils restèrent là un long moment, perdus devant la beauté de l'objet. Il était à peine croyable que l'armée puisse posséder un tel vaisseau, et que celui-ci soit encore intact, abandonné dans un hangar.

Lyros le leur avait rappelé : ils manquaient de tout ici. Les matières premières étaient une ressource rare dont ils ne pouvaient se passer. Alors demeurait la grande question. Comment était-il possible que ce vaisseau inutilisé ne soit pas en morceaux ?

Athénor ferma les yeux et s'endormit avant d'être aussitôt réveillé par les vibrations et les bruits émis par son communicateur. Il secoua Ulys, aussi endormi que lui, et se redressa.

— Il faut que je rentre, mon père consulte les relevés de la porte de nos quartiers, me surveiller est une seconde nature chez lui.

— Ma mère aussi va gueuler, ajouta Ulys alors qu'il se mettait debout sur ses jambes fébriles. Heureusement que nous sommes majeurs hein ?

Les deux humains rirent et reprirent ensemble le chemin des bons quartiers du vaisseau-cité. Dans quelques heures ils recevraient leur affectation et deviendraient de véritables membres actifs du vaisseau, au service de ce-dernier. Les cadets faisaient leurs derniers pas dans l'insouciance de leur jeunesse, trébuchaient régulièrement, mais parvinrent à destination.

Athénor s'effondra sur son lit, inconscient, insouciant, libre.

*****

« Second du haut mentor »

Athénor relu plusieurs fois cette ligne. La soirée de la veille, et le reste de la nuit, et le petit matin, avaient certes été difficiles, mais son cerveau était assez lucide pour que l'homme sache encore lire. Il se retrouvait dans l'ombre de son père, encore, pour toujours cette fois. Athénor n'était pas vraiment surpris, il était déçu, extrêmement déçu de n'être qu'un outil dans les mains de cet homme. Si le père et le fils se ressemblaient physiquement, une même haute et fine stature, la même chevelure blonde tirant sur le roux et des iris bleus verts, Athénor avait hérité du caractère téméraire de sa mère. D'elle il tenait son envie de liberté, de voyage et d'action, sa quête insatiable d'aventure et son humour détonnant. Il n'avait d'ailleurs jamais compris comment elle avait pu tomber amoureuse d'un homme aussi froid, calculateur et modéré que son père. Père qu'à l'heure actuelle il avait envie d'étrangler, heureusement que celui-ci se trouvait loin, du côté de colonies lichéennes, car sinon tout le vaisseau cité aurait entendu leur discussion. Athénor était certain d'avoir réussi ses examens, il était assez doué pour devenir second capitaine puis capitaine de vaisseau de combat, comme sa mère. La seule raison logique pour qu'il n'ait pas l'affectation était que son père, le noble haut mentor, lui ait choisi une autre voie.