Mon cœur bat à tout rompre dans ma poitrine. Il s'approche de moi, lentement. Tranquillement. Tout va bien. Il me murmure des choses que j'avais rêvé entendre. Rêvé depuis si longtemps. Sa main se pose. Le tissu se plisse. Et se plie. Un drappé rouge sang qui semble rugir douloureusement. Un doux hurlement de terreur. Pour être arraché à sa pureté jadis blanche comme neige. Un cri d'effroi que je ne pousse pas. Le chemin se fraye sur l'épiderme. Brûlant. Enflammé. Mais tremblant. Un bruit sourd et le drappé claque sur le sol. Puis soudainement ce sont les jambes dociles. Écrasées contre ce même sol. Les délicates phalanges caressant ce même sol. Je ne dis rien. Muette. Clic. La ceinture au sol. Elle revient entre ses griffes. Clac. Peau meurtrie. Tant pis. Voilà venu le moment. Le clou du spectacle d'enfant. Le dénouement de la tragédie. La mort elle-même se languissait de cet instant.
L'artiste se prépare.
Soyez sur vos gardes.
3...
Car sa frappe unique.
2...
Bien qu'elle ne tarde.
1...
Reste si inique.
0...Clac.
Le clac de fin. Ou clap de fin. Comme celui d'un film. Mais c'est réel. Oui, sûrement, peut-être bien, il se pourrait que oui.
Je ne m'étais pas rendue compte que je pleurais. Mon mascara va couler. Il me trouvera laide. Mais peu importe. Une question m'as toujours intrigué. Que fais-je ici ? Interrogation terminée. Puisque mon corps et mon cœur, à l'unisson, crient la réponse.《 Je t'en prie, Elérina... Parle-nous. Tu es en sécurité ici.》
Non. Je ne le suis pas. Plus. Enfin, je ne sais plus. Brisée ? Je le suis. Mon âme l'est autant que mon cœur. Je ne peux rien dire. Pourquoi parler ? Non. Inutile. Je n'ai rien à dire.
《 Il t'a menacé ? Avec une arme ? Il t'a fait du chantage ? 》
La seule arme qu'il a utilisé, c'est l'amour. Pour me prendre tout ce que j'avais. Mes maux remplacent mes mots. Je ne dis rien. Je n'ai rien à dire.
《 Elérina, regarde moi s'il te plaît. 》
Je relève non sans peine la tête. Son regard. Il est plein de pitié. C'est une chose plutôt drôle. Que d'avoir pitié d'une enfant sale. Enfin je trouve. Je crois. Je ne sais plus.
《 Tu n'as opposé aucune résistance. J'aimerais savoir pourquoi. Ce qu'il t'a fait est absolument dévastateur, je le sais. Mais il faut que tu m'aides à l'envoyer derrière les barreaux. 》
Barreaux de fer. Barreaux de lois. Je suis enfermée. Derrière mes barreaux dorées. J'ai tellement attendu ce moment. Et maintenant ils veulent tout gâcher. Je suis bien, dans ma prison dorée. Merveilleuse. Scintillante punition. J'ai tellement attendu.
《 Faites-le entrer. Il nous faut un témoignage à chaud d'la gamine. 》
Clac. La porte s'ouvre. C'est lui. Mon divin apollon. Ses traits sont sombres. Son visage est creusé. Ses yeux n'ont plus cette lueur qui animaient ma vie. Éteint. Il ne rayonne plus. Ne sourit plus. Ne vit plus. Il n'est plus lui. Il n'est plus celui que j'ai connu. Il n'est plus celui que j'ai aimé. Il est devenu celui qui m'a brisée.
Ô sauveur de mon âme déjà bien impure, tu n'as fait qu'en finir. Tu as abrégé mes souffrances, tu as détruit les ruines de mon être et tu as mis à terre mon enveloppe corporelle sans vie. Je te remercie, grâce à toi je sais ce à quoi je suis promise. Mais je n'atteindrai jamais cet idéal. Certains l'appellent "avenir" ou "futur". Je préfère juste dire que je n'en vaudrai jamais la peine.
Je tourne la tête vers lui et souris. J'avance un peu sur mon assise. Ma paume rencontre sa joue, comme autrefois. Je le regarde, les regards médusés autour de moi oubliés. Mon existence entière est ici, comme résumée en lui.《 Je... t'aime. 》
Quelques jours plus tard...
Une foule d'ombres pleurant à chaudes larmes se presse devant une petite table. Sur cette dernière se trouve un écriteau, des fleurs, des bougies et un livre doré. Un groupe de filles les mains jointes adressent une dernière prière. Une mère se trouve là. Elle regrette ce qu'elle a fait à sa fille. Un père aussi. Il se dit qu'il n'a rien vu mais qu'il a été un bon père. Une fille en sweat noir est à genoux, inconsolable. Personne ne peut lui enlever toute la peine qu'elle porte en son cœur. Parmi tous ces personnes, deux sont présents autrement. Deux photos encadrées, posées sur la petite table, au milieu des fleurs, des bougies et derrière le livre doré. Seul l'écriteau permet de mettre des noms sur ces photos. Voici ce qu'on peut y lire :
À la mémoire de Elérina et de son professeur de littérature, que le souffle de la vie a quitté à leur souhait. Qu'ils reposent en paix, ensemble.
Note de l'auteur :
J'espère que 0h YE5 ! vous a plu, c'est une fiction que j'ai écrite avec le soutien de ma petite sœur que je remercie infiniment. J'hésite encore à écrire un tome 2, cela dépendra totalement de votre avis ;)
Eloseok ~
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0H YE5 !
RomanceUne salle de classe, Un regard appuyé, Une remarque en face, "Monsieur" pour qui je suis tombée.