Jour 9 : Les racines nues

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Antonin est là dans le salon
et je regarde ses boucles tendres
et la terre sous ses ongles

j'aime sa façon de traiter
les fleurs comme s'il s'agissait
d'objets précieux.

Hier, quand je lui ai ouvert la porte
Il m'a longtemps regardé
ce n'était pas comme à la jardinerie
là son regard était assuré

Il m'a parlé
les yeux brillants

avec le désir de s'ouvrir
sans confidence ni aveu

dans un élan
inexplicable, simpliste

Il m'a dit

«J'ai eu peur
parce que tu vois
tu as fuis»

J'ai souris et nous
avons continué à parlé
c'est là qu'il m'a proposé
son aide

Nous coupons les tiges
des fleurs trop grandes

Il replace une mèche
derrière son oreille

il me parle
de quelques passages de son adolescence qu'il raconte sans détails
et de son père et de sa mère
du petit appartement qu'il occupait dans le 20e arrondissement

Il cite un peu Céline,
un de ses modèles de vertu

ne dis rien aussi

existe juste

Je le regarde

Antonin et sa douceur
Les mains dans la terre

Et à travers ses histoires
je remarque l'enfant immuable
qui est en lui  si vivant

Il est tard Antonin prend sa veste
et s'apprête à partir nous n'avons pas prévu de se revoir. Je ne veux pas ça.
Je sens la dépendance s'installer un peu mais je l'ignore prête à prendre le risque. Je l'arrête et le retiens.

Il se retourne

et tout doucement de ses doigts

commence à tracer le contour
de mon visage, de mes clavicules

je ne veux pas m'abandonner,
je ne veux pas me perdre
dans la facilité et pourtant
je le laisse faire, je le laisse
évaluer tous les plis et
tous les fragments.

je prend sa main
et m'arrête devant la chambre
comme poussée par le hasard

et alors dans l'intimité d'un faisceau lumineux,  nos corps se mêlent
se reconnaissent, se retrouvent.

Le pot de fleurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant