Chapitre 8

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Qu'est-ce qu'il fait là ? Comment il a su où j'habitais ? Et pourquoi mon cœur semble s'arrêter ? J'ai envie de fuir comme j'ai envie de me réfugier dans ses bras. Mais ça va pas ? On le hait. Ce n'est qu'un con prétentieux. Il a l'air tendu et très en colère. Pourquoi ? Il passe sa main dans ses cheveux. Ses mâchoires sont toujours aussi crispées. Je ne sais pas qui devrait parler en premier. J'ai envie de lui poser des centaines de questions mais ma tête m'oblige à rester stoïque et à attendre. Soudain, la porte d'entrée de mon appartement semble s'éloigner. Une fébrilité s'empare de moi.

— Où t'étais passée ?

C'est donc lui qui ouvre la conversation. Son ton est abrupte, froid et je peux sentir qu'il essaie de se retenir de hurler.

— Qu'est-ce que tu fais ici ?

— Commence pas à jouer à ça je te demande où t'étais passée ! Dit-il en ponctuant sa colère par un petit coup sur le mur qui le retient.

— Ne pas jouer à quoi ? C'est toi, je te rappelle, qui joue à un jeu dont toi seul connaît les règles.

A ces mots, je prends mon courage à deux mains et m'avance vers ma porte. Arrivée près de lui il se détache du mur, fait un pas vers moi et m'attrape le poignet.

— Tu devais mettre 45 min. Ça fait presque une heure que t'es partie.

Son ton redescend légèrement. Serait-ce de l'inquiétude dans ses yeux ? J'ai envie de hurler que ça ne le regarde pas, que je fais bien ce que je veux et qu'il n'a pas être là mais aucun mot ne me vient. Au contraire, je le conforte dans sa démarche en lui montre mes courses.

— J'avais une petite faim après avoir été forcée de marcher depuis l'appartement d'Ethan.

— Tu aurais du me dire que tu souhaitais que je te ramène.

Ses yeux sont plongés dans les miens. On dirait qu'il y cherche la part de moi qui a son nom tatouée au fer rouge, celle qui est prête à faire un pas vers lui. Celle qui, pour le moment est ligotée par ma raison. Toute cette situation est bien trop compliquée pour moi. Il sent ma distance et lâche mon poignet.

— « Mieux vaut être seul que mal accompagné », tu te souviens ?

— J'ai juste dit ça pour que les autres n'aient aucun soupçon sur ce qu'il se passe entre nous.

— Ce qu'il se passe entre nous ? Rien ne se passe entre nous ! Combien de fois faut-il que je te le dise ?

— Ah ouais ?

— Ouais.

— T'es sûre ?

— Oh oui.

— Donc ça te fait rien si je me rapproche de toi comme ça ?

Ses yeux sont remplis d'étincelles et un feu se propage en moi. Toujours le même, avec cette intensité propre au contact d'Adam. Ma raison semble mourir et, dans sa fin de vie, me souffle de mentir.

— Non, rien.

— Et si je me rapproche encore plus et que je mets une main sur ta hanche ?

J'ai un petit mouvement de recul mais le mur m'empêche d'aller plus loin. Sa main embrase instantanément mon corps. Je fais toujours non de la tête et me murmure à l'oreille:

— Et ça ne te fait rien si je te dis que te voir à côté de cette tête de con m'a fait bouillir de rage ? Que la simple idée qu'il ait pu partager ton lit me donne envie de lui mettre mon poing dans la tête ? Que la personne qui devrait avoir le privilège de toucher ton corps devrait être moi et moi seul ? Que le nom que tu dois crier quand tu atteins l'orgasme devrait être le mien ?

Mes yeux se ferment. Je ne trouve rien à dire. Ses paroles trouvent leurs chemin et s'immiscent dans les moindres recoins de mon corps. Je suis à sa merci, comme une proie piégée par son prédateur, et il le sait. Contrôle toi, contrôle toi, contrôle toi. Il faut que je me sorte de cette situation par tous les moyens.

— Finalement j'aurais peut être bien du rester avec Luke cette nuit, dis-je moi aussi dans un murmure.

Ce n'étais peut être pas la chose à dire mais c'est tout ce qui m'est passé par la tête. Son corps se raidit.

— Qu'est-ce que t'as dit ?

Sa voix est redevenue métallique et ses mâchoires sont tendues. Il se détache d'à peine quelques centimètres, assez pour trouver mon regard. Je ne peux m'empêcher d'esquisser un petit sourire à la démonstration de son évidente jalousie.

— Et ça te fait rire ?

Son sourire est revenu. Je ne peux m'empêcher de sourire un peu plus. Oh la la, je suis dans la merde ! Dans la merde ! De nouveau il se penche vers moi. Sa main droite vient presser le bas de mon dos. Quant à celle de gauche, elle se loge dans mon cou. Je suis au bord du gouffre. Un mot de plus et je suis perdue. Je sens son rythme cardiaque s'accélérer, comme sa respiration.

— Je vois que je te fais le même ef..

— Arrête de parler ! M'exclamai-je en pressant ma bouche contre la sienne.

Nos langues s'épousent, nos corps se confondent. Son étreinte se fait encore plus forte et mes mains se perdent dans ses cheveux. Le contact du mur froid me permet de ne pas fondre sous son corps brulant. Il vient chercher ma jambe gauche qu'il soulève et colle contre sa hanche. Le voilà qu'il abandonne ma bouche pour s'engouffrer sans mon cou. Je gémis sous la brutale douceur de ses baisers. Cette lente ascension vers un plaisir bestial me fait légèrement ouvrir les yeux. Quelque chose bouge et capture mon attention: la porte de l'appartement d'en face. Mme Goldberg ! Instinctivement je repousse Adam qui me regarde d'un air perplexe.

— Mme Goldberg, dis-je. Que faites-vous à une heure aussi tardive ?

Adam se retourne pour découvrir la raison de mon rejet soudain.

— Oh ma petite Rose ! Je ne vous avez pas vue. J'allais juste jeter mes poubelles. Je vous y aller plus tôt mais j'ai été happée par un très bon policier. Oh ! Mince !

Sa poubelle lui tombe des mains et à mon grand étonnement, Adam se précipite pour l'aider.

— Merci beaucoup jeune homme. Vous êtes très gentil d'aider une vieille dame comme moi, répond-elle.

Je profite de cet incident pour mettre une main sur la porte d'entrée et déverrouiller la serrure de l'autre le plus discrètement possible. Une fois la porte ouverte de quelques centimètres je souhaite bonne nuit à Mme Goldberg et, sans qu'Adam ne puisse comprendre ma machination, m'engouffre dans mon appartement et verrouille la porte. Le dos collé contre elle je l'entends qui m'appelle et me supplie de lui ouvrir la porte. Le ton de sa voix transcrit de l'incompréhension et une... déception ? Mon coeur tambourine dans ma poitrine. Ce soir encore j'ai failli céder au diable. Merci merci merci Mme Goldberg !

Au bout de quelques minutes j'entends les pas d'Adam s'éloigner dans le couloir. Je peux enfin respirer. Ce weekend a été riche en émotion et je n'en voyais plus la fin. Je me laisse glisser contre la porte et, assise dans mon entrée, seule avec moi même dans mon cocon, je ne peux m'empêcher de me remettre en question. Qu'est-ce qui me fait perdre tous mes moyens en sa présence ? Normalement je ne me pose aucune question et je fonce mais je n'arrive pas à faire abstraction de ce que je sais de lui. Il épinglait les culottes sales des filles avec qui il avait couché dans les couloirs du lycée. Sur chacune d'elles y été inscrit le prénom, le nom et la classe de la victime. Une fois à l'université, il s'est amusé à jeter par la fenêtre les vêtements de ses conquêtes, les obligeant à regagner leur chambre en cachant ce qu'elles pouvaient de leurs mains. Il a aussi eu parié sur le temps qu'il lui faudrait à dépuceler une vierge. Plus tard, consommée par la vengeance, l'une d'entres elles, maintenant internée en asile psychiatrique, essaiera de mettre le feu à son appartement. Cependant, rien de tout ça ne semble nuire à sa réputation. Et même moi semble être sous l'emprise de ce démon. J'ai besoin d'un exorcisme pour me débarrasser de lui. Mais surtout, j'ai besoin de savoir pourquoi il a jeté son dévolu sur moi. Je sais que je peux être un peu parano parfois mais, ne croyant pas au destin, ces nombreuses confrontations me semble un peu soupçonneuses. Que veut-il de moi ? Je vais devoir mener ma petite enquête, et tout va commencer avec Ethan, son pote de toujours. 

Il était une foisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant