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         Jeno avançait à l'aveugle tandis qu'on l'entrainait par ses mains attachées. Ses ravisseurs et lui avaient fait un long voyage en voiture mais il n'avait pas été en droit de regarder le chemin emprunté. Il n'en savait pas vraiment la raison mais en vérité il ne s'était pas encore posé la question. Déjà qu'il pensait qu'il était impossible de survivre au delà du bunker, il n'en revenait toujours pas d'être en vie.

Il avait fait semblant de dormir la plupart du trajet pour écouter tranquillement leur discussion. L'un des deux avait une voix vraiment aiguë, particulièrement quand il riait. Il était persuadé qu'il devait être plus jeune que lui. Leurs conversations avaient été totalement banales mais elles n'en restaient pas moins intéressantes. Le plus grand n'avait cessé de se plaindre de la perte d'un dénommé Avocado. Il n'avait pas vraiment compris.

Tout ce qu'il savait maintenant c'était qu'on lui avait retiré son masque à gaz et qu'il arrivait pleinement à respirer, comme lorsqu'il était en haut de la tour. Comment était-ce même possible ? L'air était frais et faisait virevolter sa frange, caressant son épiderme frémissant. Il était peut-être privé de sa vue mais ses autres sens étaient en total éveil. Les odeurs étaient totalement différentes de ce qu'il avait toujours connu.

Les sons aussi d'ailleurs, il entendait de l'eau couler et la terre craquer sous ses pieds. Grâce à ce que lui avait appris Boa, il arrivait à peu près à imaginer le paysage. Même s'il aurait préféré le voir de ses yeux.

La température se réchauffant lui fit comprendre qu'ils étaient rentrés à l'intérieur d'un endroit, quelques chuchotements parvinrent à ses oreilles mais il n'arriva malheureusement pas à distinguer leur sens.

On le poussa finalement dans une pièce puis on détacha ses mains. Il eut à peine le temps de retirer son bandeau pour recouvrer la vue que la porte avait déjà été fermé à clé. Il détailla les alentours. Une chambre qui n'avait rien à voir avec la sienne. Tous les meubles étaient en bois et la couverture jaune canaris rendaient le lieu plutôt enfantin.

Il aurait trouvé ça chaleureux s'il n'était pas enfermé. D'autant plus qu'il n'y avait aucune fenêtre, il détestait la sensation d'être de nouveau enfermé sans savoir ce qu'on allait faire de lui.

Venait-il réellement de quitter une prison pour en rejoindre une autre ?

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Sicheng observait la scène qui se déroulait sous ses yeux sans réellement y faire attention, Yuta étant en train de retirer les puces de ses camarades. Il avait besoin de temps de son côté pour assimiler tous les souvenirs qu'il venait de récupérer. Il connaissait son passé maintenant, mais ça faisait deux ans qu'il vivait sans et ça lui donnait donc l'impression que quelqu'un d'autre avait vécu sa vie.

Il pensait à Hansol, à Johnny surtout. Son ami était mort et il n'avait même pas pu le pleurer convenablement. Qui d'autres avaient survécu ? Combien s'était sacrifié pour cet enfer ? Il se sentait faible de les avoir laisser tomber, de s'être laissé manipuler.

Et en plus de ça, il devait encaisser d'autres nouvelles tout aussi assourdissantes. Yuta avait brièvement eu le temps de l'informer que la survie à l'extérieur était possible et cela même pour les non-immunisés. Que l'oxygène en altitude était pure, que la pression atmosphérique faisait en sorte que la toxicité reste portée au sol. Il existait même un village dans la montagne qu'on appelait Tian, il avait recueilli les survivants.

Il ferma brièvement les paupières, pensant à tous les mensonges que la Bulle avait ancré dans son cerveau. C'était un endroit mauvais, il l'avait toujours su inconsciemment mais voir la vérité en face était difficile. Il songeait aux gens enfermés là-bas, dont le sort ne devait pas être mieux que le sien. Ils devaient tous obéir, sacrifier leur bonheur en pensant que c'était leur seul moyen de survie.

𝘦𝘢𝘳𝘵𝘩Où les histoires vivent. Découvrez maintenant