CHAPITRE 4 : Darek

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— Elle était pour moi, abruti !

Je me redresse avec rapidité, quelque peu sonné par le choc que vient de causer le contact brutal que j'ai eu avec mon coéquipier. Le ballon a roulé à plusieurs mètres derrière moi, arrêtant net toute tentative de l'équipe pour prendre du terrain. Lorsque mon cerveau a conscience de la personne avec laquelle je viens d'accrocher, mon sang ne fait qu'un tour. Visiblement lui savait depuis le départ sur qui il avait tapé.

— Holden ! hurle le coach depuis l'autre bout de terrain.

— Tu ferais bien d'ouvrir les yeux, capitaine, cingle le blond dont les cheveux et la moitié du visage sont cachés sous son casque noir.

— Fais attention à ce que tu dis.

Dans un geste énervé, j'arrache la lanière qui empêche mon casque de tomber et le retire de ma tête. Mes cheveux en désordre sont déjà en sueur et l'air presque froid de ce mois d'octobre s'engouffre dans mes mèches rebelles.

— Toi fais attention, tu as fait exprès de prendre la passe !

— Holden ! Prescott !

Coach Tavin s'égosille à une dizaine de mètres de nous, tandis que mon adversaire et moi, pourtant membre de la même équipe, commençons à nous jauger de la tête aux pieds. Prêt à lui faire passer l'envie de me prendre de haut, je me place à seulement quelques centimètres de lui, les yeux rivés dans les siens. Furieux, je peine à garder mon calme alors qu'il me fusille du regard.

— Tout doux les mecs !

En deux temps trois mouvements, notre quaterback, Adam, s'est placé à côté de nous, plaquant une main ferme sur mon torse pour me faire reculer. Les nerfs à vifs, je ne détourne pas une seule seconde mon attention de mon coéquipier.

— Je t'interdis de me parler sur ce ton, Eliott, je gronde à l'intention du deuxième année. Je ne suis ni ton pote, ni ton chien.

— Je t'ai dit que la passe était pour moi, il s'énerve en détachant à son tour son casque.

Ses cheveux blonds se libèrent de leur prise et virevoltent au vent, laissant une odeur suave et boisée me fouetter le visage. Ma mâchoire se serre davantage, provoquant une douleur lancinante dans mes gencives.

— Il va falloir que tu revois ton jeu, je lâche abruptement. Tu n'étais pas à ta place de receveur.

— C'est quoi votre putain de problème ?

Le coach vient de faire son apparition entre nous deux. Les sourcils froncés et les bras croisés, il nous assassine du regard en nous hurlant dessus. Toute l'équipe s'est arrêtée de jouer et nous regarde nous faire incendier. Ce n'est ni la première, ni la dernière fois que coach Tavin s'emporte. Disons que c'est un sanguin, pourtant à chaque fois qu'il hausse le ton, c'est assez impressionnant.

— Holden, tu n'étais pas sur ta ligne, il crache. Et toi Prescott, c'est quoi ce comportement ? Tu crois que c'est acceptable pour un capitaine ? Remettez-vous en place bande de morveux et arrêtez vos jérémiades. Je veux du football, pas des gamines qui se crêpent le chignon.

Il me pointe du doigt en s'approchant dangereusement de moi. Les poings serrés, je peine à calmer l'agacement qui m'anime.

— Et toi, il va falloir que tu contrôle tes sautes d'humeur mon garçon, sinon ça ne va pas le faire !

Puis, après nous avoir hurlé de nous remettre en jeu, il s'éloigne du terrain pour se replacer près du banc. Toujours l'un en face de l'autre, nous restons dans un duel silencieux avant que le coup de sifflet du coach nous ordonne de reprendre l'entraînement. Je me baisse rapidement pour récupérer mon casque et l'enfonce nerveusement sur ma tête avant de courir me remettre en ligne. Quel connard.

ESPRIT D'EQUIPE [ aux Editions Addictives]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant